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Dirigeants et cadres d’entreprises : quels sont vos droits en garde à vue ? Par Juliette Chapelle, Avocat.
Parution : mardi 24 octobre 2017
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Les dirigeants d’entreprises et cadres sont de plus en plus mis en cause dans des procédures pénales, augmentant ainsi le nombre de garde à vue à leur encontre. Peu familier à cette mesure il y a encore quelques années, des affaires médiatiques comme les affaires Tapie ou celles relatives aux dirigeants d’Uber ont souligné l’importance pour les dirigeants et cadres d’appréhender en amont cette mesure.

Aujourd’hui, environ 4 000 mesures de garde à vue par an concernent des dirigeants d’entreprise. Deux raisons peuvent être avancées afin d’expliquer ce nombre qui augmentent d’année en année : une pénalisation croissante de la vie des affaires et, corrélativement, un recours plus fréquent à la procédure pénale par les autorités, les salariés et même les concurrents.

Une mesure de garde à vue permet aux autorités policières de placer sous contrainte une personne contre laquelle il existe des raisons de soupçonner qu’elle ait commis une infraction pour une durée de 24h renouvelable plusieurs fois sous certaines conditions.

Il est aujourd’hui nécessaire si ce n’est indispensable que les dirigeants et les cadres des entreprises puissent appréhender sereinement une mesure de garde à vue.

1. La préparation en amont de la garde à vue

La plupart du temps, vous recevrez une convocation au commissariat vous « invitant » à vous présenter au commissariat à une date déterminée sans autre indication. Le premier réflexe est de prendre contact avec le commissariat afin soit de confirmer la date soit d’obtenir une date différente en cas d’indisponibilité de votre part à la date proposée. Il est d’ailleurs opportun de modifier la date si vous êtes convoqué dans l’après-midi. En effet, il vaut mieux être convoqué tôt le matin afin d’éviter de passer la nuit en cellule de garde à vue.

Prenez contact avec un avocat pénaliste pour vous assister pendant la mesure de garde à vue. Ce dernier connaît d’une part, la procédure pénale et saura pointer d’éventuelles irrégularités de procédure dès le début de la mesure. D’autre part, il connaît en détail le droit pénal et saura souligner les insuffisances du dossier selon les informations qu’il arrivera à obtenir des policiers. En effet, votre avocat n’a pas le droit de consulter le dossier. Il n’a accès qu’à un nombre limité de documents, incluant le procès-verbal de notification des droits.

Par ailleurs, si vous avez un traitement médical, n’hésitez pas à aller chez votre médecin afin qu’il vous prescrive vos médicaments et éventuellement qu’il fasse un certificat médical détaillant votre maladie et une éventuelle incompatibilité avec une mesure de contrainte d’une durée importante.

2. Les droits en garde à vue

Lorsque vous arriverez au commissariat, vous serez placé en garde à vue. Tous vos objets seront placés dans votre « fouille ». L’officier de police judiciaire vous lira vos droits et vous donnera à signer un procès-verbal de notification des droits reprenant le ou les délits qui vous sont reprochés et énonçant vos droits incluant le droit de demander l’assistance d’un avocat, le droit d’être examiné par un médecin, le droit à un interprète, le droit de faire prévenir un proche ou encore le droit de s’entretenir avec un proche au téléphone. C’est à ce moment-là qu’il conviendra d’indiquer à l’officier de police judiciaire que vous souhaitez être assisté de votre avocat en donnant son nom et si possible son numéro de téléphone.

Vous aurez droit à un entretien confidentiel d’une durée de 30 minutes avec votre avocat. Il pourra ainsi s’assurer du respect de vos droits lors du placement en garde à vue et déposer des observations. Pendant les auditions, il pourra vous poser des questions en fin d’audition et déposer également des observations écrites relatives tant au respect des règles de procédure pénale que sur les infractions reprochées.

Quant à l’audition, il est important d’avoir en tête quelques règles simples mais qui permettent d’éviter tout contresens et de limiter l’auto-incrimination.

Une mesure de garde à vue offre la possibilité aux autorités d’identifier et d’établir des éléments qui pourraient être utilisés contre vous par la suite. Il ne s’agit donc en aucun cas d’une opportunité qui est offerte pour faire des déclarations générales ou discuter de l’affaire sur la base des éléments dont vous avez connaissance. Sachez que chaque mot pourra et sera retenu contre vous.

Ainsi, il faut être certain de bien avoir compris la question et, au besoin, demander au policier de répéter la question. Il est également important lorsque vous donnez une réponse d’être certain. Les faits sont parfois anciens et il peut être difficile de se rappeler des détails, des dates, des personnes présentes. Il ne faut pas hésiter à nuancer sa réponse afin de ne pas donner des informations brutes qui pourraient s’avérer inexactes et nuire par la suite à votre crédibilité.

En tout état de cause, sachez que vous avez le droit de vous taire et qu’en droit français, vous n’avez aucune obligation de dire la vérité. Cependant, l’expérience montre que mentir se retourne généralement contre la personne. Il est donc préférable de se taire ou d’indiquer que vous ne vous souvenez plus plutôt que de mentir.

3. L’après garde à vue

Après une ou plusieurs auditions et confrontations, la garde à vue arrive à sa fin. Plusieurs possibilités s’offrent au procureur de la République :

Sachez que si vous êtes placé en garde à vue et libéré sans connaître immédiatement les suites qui seront données à la procédure, vous avez droit de consulter le dossier de la procédure et de déposer des observations à l’expiration d’un délai d’un an après la mesure. Cela permet notamment d’interroger le procureur de la République sur les suites données ou susceptibles d’être données.

Juliette Chapelle Avocat au Barreau de Paris cabinet@chapelleavocat.com / www.chapelleavocat.com