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Les différentes étapes de la levée de fonds. Par Alina Paragyios, Avocat.
Parution : mardi 28 novembre 2017
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Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui considèrent la levée de fonds comme l’élément incontournable de la réussite d’une start-up. Cependant, faire rentrer des investisseurs extérieurs dans le capital de la société n’est pas une démarche évidente, et de nombreuses étapes sont à franchir afin d’y parvenir.

Tout d’abord, avant de monter un dossier pour réaliser une levée de fonds, il est primordial que l’entreprise réfléchisse à sa stratégie sur le long terme. Il faut donc avoir une vision claire dans le futur et pouvoir expliquer l’intérêt d’une levée de fonds pour l’entreprise :
- L’entreprise a-t-elle réellement besoin de cet argent ?
- L’entreprise a-t-elle conscience des conséquences sur elle de la levée de fonds ?
- Quelle stratégie de sortie proposer aux investisseurs ?

Après avoir réfléchi à ces questions, l’étape suivante consistera en la rédaction du business plan. En effet, rédiger un business plan est obligatoire lorsqu’un entrepreneur souhaite lever des fonds.

1) La rédaction d’un executive summary et du business plan

Le business plan ou plan d’affaires est le document de pilotage et de démonstration du succès futur d’un projet. C’est un document écrit qui démontre qu’un projet entrepreneurial crée de la valeur de manière pérenne.
Ainsi donc, si une startup souhaite lever des fonds auprès de Business Angels ou auprès d’un fonds, alors le business plan est indispensable. En effet, sur 500 dossiers, un fonds d’investissement n’en finance que 10, le business plan est ainsi l’outil permettant de se distinguer.
Aussi, si l’étape de l’executive summary a été passée, alors l’investisseur voudra lire le business plan avant de rencontrer l’entrepreneur. Dès lors, le business plan va permettre à l’investisseur de mieux comprendre le marché de la startup, le sérieux de sa démarche et la rentabilité escomptée.

Un business plan est un document relativement standard même si chacun doit adapter ce document à sa problématique personnelle.
Il ne doit pas être trop long, 20-30 pages maximum avec l’information juste nécessaire, pas trop technique afin que les potentiels investisseurs puissent le comprendre dans son intégralité, pas descriptif sinon démonstratif et surtout bien présenté. Ainsi l’insertion de schémas et graphiques, à conditions qu’ils soient accompagnés d’explications est nécessaire.
Le business plan ne doit pas être rédigé par l’entrepreneur seul sinon par l’équipe entière. Il s’agit ici de réfléchir ensemble à la stratégie de l’entreprise et de faire valider chaque hypothèse par les membres importants.
Ce sera le business plan qui permettra de convaincre l’investisseur.

2) L’identification des investisseurs ou des fonds

Une fois le dossier rédigé et complet, il faut alors chercher les investisseurs qui seraient intéressés par le projet de la startup. Il faut cibler les investisseurs en fonction de leurs secteurs d’activité, du type d’entreprise dans lesquelles ils ont déjà investi, du stade de développement de ces entreprises, et aussi en fonction du montant que l’entrepreneur souhaite lever.

Il est important de retenir qu’un investisseur peut être pertinent à deux titres :
- Soit parce qu’il apporte des financements ;
- Soit parce qu’il offre un réseau et un savoir-faire, une expertise métier.

L’investisseur idéal devra remplir ces deux critères.

Dès que les investisseurs potentiels sont repérés, il faut envoyer les dossiers.
Si l’investisseur est intéressé alors il proposera à l’entrepreneur un rendez-vous pour en savoir plus sur son projet. Le premier rendez-vous sera décisif car c’est à ce moment-là que l’investisseur saura s’il veut suivre ou non le projet.
Les derniers rendez-vous quant à eux servent à mettre en place les conditions de l’opération que l’entrepreneur devra négocier avec l’investisseur (montant de l’opération, répartition du capital, modalités du pacte d’actionnaires, gouvernance de l’entreprise…).

3) Les Due Diligence

Lorsqu’un accord préalable est trouvé mais avant l’accord définitif, commencent les Due Diligence. L’investisseur réalise les dernières vérifications sur les chiffres que l’entrepreneur lui aura donnés, sur la véracité du business plan, sur l’équipe dirigeante.
C’est aussi le moment d’une véritable analyse juridique qui doit être anticipée. Un audit juridique en amont est donc indispensable.
La longueur des Due Diligence dépend de la taille et de la nature de l’entreprise.

4) La signature des contrats de confidentialité ou « non-disclosure agreement »

Le but est de garantir le secret des négociations en cours. C’est le véritable point de départ des négociations portant sur le montant de la levée, sur les actions données en contrepartie et sur la valeur desdites actions.

5) La lettre d’intention ou « Letter Of Intent » (LOI)

Elle reprend précisément les conditions financières et les conditions juridiques (modifications des statuts, création des parts sociales, dilution du capital). C’est le cadre fixant les futures règles qui seront appliquées.

6) La négociation et la rédaction d’un nouveau pacte d’actionnaire

L’une des premières discussions que doivent avoir les entrepreneurs et leurs investisseurs lors d’une levée de fond concerne la manière dont les investisseurs vont pouvoir sortir du capital de l’entreprise.
C’est dans ce contexte que la rédaction et la signature d’un pacte d’actionnaires est essentielle. Ainsi, parmi les clauses les plus importantes du pacte d’actionnaires doivent figurer celles qui prévoient la sortie des investisseurs du capital de l’entreprise.
Et pour cause, l’objectif de l’investisseur est de pouvoir sortir rapidement du capital de l’entreprise en ayant réalisé la plus grande plus-value possible. En effet, à moins que les investisseurs ne soient des Business Angels (c’est-à-dire des particuliers investissant leur propre argent), ce sont généralement des fonds d’investissement qui ont eux-mêmes des comptes à rendre et une certaine rentabilité à atteindre auprès de leurs propres investisseurs. Les fonds d’investissement ont donc un calendrier et des échéances à respecter pour leurs propres investissements, ce calendrier devra également figurer dans le pacte d’actionnaires signé des investisseurs.
Dès lors, au moment d’une levée de fonds, il y a une négociation qui s’engage entre les fondateurs de l’entreprise et les investisseurs pour prévoir les règles qui régiront leur association et les conditions de sortie des investisseurs.

La sortie des investisseurs peut se faire de deux façons principales :
- La cession de gré à gré : les actions sont rachetées par la société même, par un autre investisseur ou par un acquéreur industriel, c’est-à-dire un acteur qui se trouve dans le même secteur d’activité que l’entreprise et qui a tout intérêt à contrôler son capital (dans ce cas, cet acquéreur va généralement chercher à obtenir la totalité des actions) ;
- L’introduction en bourse : c’est la meilleure sortie pour les investisseurs, ils récupèrent leur investissement et obtiennent une importante plus-value.

7) La convocation d’une assemblée générale extraordinaire (AGE) pour acter l’augmentation de capital

Il s’agira ici de convoquer les actionnaires de la société, de préparer les résolutions, les propositions de modifications et de procéder au vote.

8) L’émission des bulletins de souscription d’actions aux investisseurs

C’est à faire au moment de la signature du pacte d’actionnaires. Les investisseurs les renverront ensuite à la société dument complétés.

9) La délivrance du certificat du dépositaire par la banque sur présentation des bulletins de souscription

Lorsque les virements sont effectués, la banque délivrera un certificat du dépositaire constatant la réalisation des souscriptions. Le Président devra alors émettre un procès-verbal de constat de l’opération attestant de la modification des statuts.

10) L’enregistrement des formalités au greffe du Tribunal de commerce

Il s’agit ici d’accomplir les dernières procédures administratives, à savoir, l’enregistrement des statuts qui auront été modifiés, la publication obligatoire dans un journal d’annonces légales et l’enregistrement du formulaire CERFA M2 au greffe du Tribunal de commerce compétent.

En conclusion, la levée de fonds présente certains avantages. En effet, elle n’est en rien assimilable à un prêt, il n’y a ni remboursement de capital ni paiement d’intérêts. La principale rémunération des investisseurs est constituée de la plus-value qu’ils réalisent lorsqu’ils cèdent leurs parts. La levée de fonds ne nécessite par ailleurs pas de garanties personnelles.
Les fonds propres de l’entreprise sont renforcés mais l’entreprise ne contracte pas de dettes pour autant. D’un point de vue financier et comptable, la levée de fonds est donc extrêmement positive.

De plus, il serait faux de penser qu’une levée de fonds permet simplement d’apporter de l’argent. Les investisseurs apportent souvent également un accompagnement, une expertise, un carnet d’adresses, un conseil en termes de gestion et d’organisation…
En contrepartie, évidemment, l’entreprise subit une dilution de ses parts dans l’entreprise d’où la nécessité absolue de conclure un pacte d’actionnaires avec les investisseurs prévoyant leur sortie.

Me Alina PARAGYIOS Cabinet A-P, Avocats au Barreau de Paris http://www.cabinet-ap.fr @cabinet_ap