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Le parcours du demandeur d’asile. Par Eric Tigoki, Avocat.
Parution : jeudi 21 décembre 2017
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Le réfugié est un étranger à qui l’asile est accordé et qui se voit reconnaître cette qualité. Reconnaissance liée au fait qu’il satisfait, selon les cas, notamment aux exigences de la convention de Genève ou à celles de la Constitution [1].
Fait d’obligations et de droits [2], ce statut permet au réfugié de mener une vie, a priori, ordinaire. De sorte qu’à sa rencontre, l’on pourrait ne pas se figurer les aspérités de son parcours.
Sans doute, l’actualité rappelle-t-elle les épreuves endurées, évitées ou redoutées par le migrant [3].
Il en va, en revanche, différemment de la procédure qui lui permet de se voir reconnaître le statut de réfugié.
Relativement longue et éprouvante, elle peut comporter deux phases : l’une administrative (I), l’autre juridictionnelle (II).

I-La phase administrative

Exclusion faite des associations [4] qui l’accueillent, le renseignent et l’accompagnent dans diverses démarches, le demandeur d’asile est ici en relation avec différents services publics qui relèvent de l’administration active. Avec les uns, pour l’enregistrement de sa demande ; avec l’autre, pour son examen.

A – L’enregistrement de la demande

Le demandeur s’adresse à la plateforme d’accueil pour demandeurs d’asile (PADA), qui lui remet une convocation à se présenter devant un guichet unique (GUDA) [5]. Ce guichet regroupe les services de la préfecture chargés de l’enregistrement des demandes d’asile et ceux de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) responsables de l’accueil et de l’hébergement des demandeurs d’asile.
Les services de la préfecture enregistrent l’identité du demandeur, prennent ses 10 empreintes digitales et procèdent à un entretien individuel destiné à retracer son parcours depuis son pays d’origine pour déterminer le pays responsable de l’examen de sa demande [6]. Il reçoit, outre l’attestation de demande d’asile valable un mois qui vaut autorisation de séjour [7]] et le guide du demandeur d’asile, le formulaire OFPRA. Comportant notamment son état civil, celui de sa famille et le récit des raisons qui l’ont contraint à quitter son pays (craintes de persécution, menaces pour sa vie, son intégrité physique, sa liberté etc.), ce formulaire est adressé à l’OFPRA dans un délai de 21 jours.

B- L’examen de la demande

Il convient de rappeler que l’Office français de protection des (OFPRA) est un établissement public doté de l’autonomie administrative et financière créé par la loi du 25 juillet 1952.
Placé sous la tutelle du ministre de l’Intérieur après avoir été sous celle du ministre des Affaires étrangères, il est administré par un Conseil d’administration [8] (comprenant 17 membres ayant une voix délibérative [9] et trois personnalités qualifiées [10] qui ne disposent pas d’une voix délibérative à l’exception des décisions relatives à l’établissement de la liste des pays d’origine sûrs [11]) et géré par un Directeur Général (nommé par décret du président de la République, sur proposition conjointe du ministre en charge de l’asile et du ministre des Affaires étrangères).

L’OFPRA exerce trois missions : l’instruction des demandes de protection ; la protection juridique et administrative des réfugiés statutaires et des bénéficiaires de la protection subsidiaire [12] ; le conseil dans le cadre de la procédure de l’asile à la frontière. Il rend, à ce dernier égard, un avis au ministre de l’Intérieur sur le caractère manifestement fondé ou non d’une demande d’autorisation d’entrée sur le territoire français au titre de l’asile.
Les demandes d’asile sont instruites au sein de six divisions géographiques d’instruction [13] Elles [14] sont subdivisées en plusieurs sections, unités d’instruction, comprenant chacune entre 8 et 12 officiers de protection [15]. En fonction des dossiers, l’Office statue selon une procédure normale [16] ou selon une procédure dite accélérée [17].
L’OFPRA, sauf s’il déclare la demande irrecevable, convoque l’intéressé à un entretien. Il peut être assisté, s’il le demande, d’un interprète, d’un avocat rémunéré par lui ou du représentant d’un association agréée par l’Office.
La décision de l’OFPRA – octroi du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire, ou rejet de la demande – est notifiée à l’intéressé par courrier. Pour certains demandeurs d’asile, le parcours s’arrête ici, puisque le statut sollicité leur est reconnu. D’autres verront leur patience et leur témérité mises à rude épreuve, dès lors qu’insatisfaits, il leur faudra former un recours [18] contre la décision de l’OFPRA devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) [19].

II- La phase juridictionnelle

Deux juridictions sont susceptibles d’être (successivement) saisies : la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) et le Conseil d’Etat.

A- Examen du recours par la CNDA

La Cour nationale du droit d’asile est une juridiction administrative placée sous l’autorité d’un président membre du conseil d’Etat désigné par le vice-président du Conseil d’Etat. C’est l’article 29 de la loi n°2007-1631 du 20 novembre 2007 qui a retenu la nouvelle appellation, abandonnant ainsi l’ancienne Commission de recours des réfugiés de la loi du 25 juillet 1952 [20]. Elle comporte des formations de jugement comprenant chacune un président [21] et deux assesseurs [22]
La procédure devant la CNDA est écrite, inquisitoire et contradictoire. Par ailleurs, il est acquis depuis la décision du Conseil d’Etat, Aldana Barrena du 8 janvier 1982 que le juge de l’asile est un juge de plein contentieux. Plusieurs conséquences. D’une part, il appartient au juge « non pas d’apprécier la légalité de la décision qui lui est déférée, mais de se prononcer lui-même sur le droit des intéressés à la qualité de réfugié d’après l’ensemble des circonstances de fait et de droit établies à la date de sa décision, et même jusqu’à la date de lecture de celle-ci » (CE 19 nov.1988, Mlle B.,n°100288 ). D’autre part, les irrégularités de la procédure suivie à l’Office ne peuvent être invoquées à l’appui du recours sauf si une garantie essentielle est en cause, comme c’est le cas du droit du demandeur d’asile à un entretien personnel à l’office. Enfin, le juge de l’asile a le pouvoir d’accorder lui-même la protection internationale en substituant sa propre décision au refus de l’OFPRA [23].
La CNDA doit en principe statuer dans un délai de cinq mois. Ce délai est réduit à cinq semaines en cas de procédure accélérée [24].
Après l’enregistrement du recours, le dossier est confié pour une instruction contradictoire à un rapporteur. Il analyse le dossier à partir des éléments communiqués par l’Office et complétés par le recours, les mémoires et pièces versés au dossier.
A l’issue de l’instruction, le requérant (qui peut être est assisté d’un interprète [25]) et son avocat sont convoqués à une audience devant une formation collégiale [26] ou devant un président qui statue seul en application de l’article L.731-2 du CESEDA. Les débats ont lieu en audience publique, sauf si le requérant a demandé le huis clos ou si le président décide que l’audience se poursuivra hors la présence du public, lorsque les circonstances de l’affaire l’exigent. Il peut également interdire l’accès de la salle d’audience aux mineurs ou à certains d’entre eux.
La décision est lue en audience publique dans un délai de trois semaines environ après l’audience. A l’issue de ce délai, le sens de la décision est affiché dans les locaux de la cour. Le jugement est ensuite adressé aux parties, par voie postale. La lettre notifiant la décision indique les voies et délais de recours contre cette décision. La Cour peut soit rejeter la demande, soit accorder la protection subsidiaire ou le statut de réfugié [27]. Autrement dit, certains obtiennent satisfaction à l’issue de cette étape. D’autres devront encore attendre.

B- Recours contre la decision de la CNDA  [28]

1- La décision de la CNDA peut être contestée devant la Cour elle-même, notamment par la voie du recours en rectification d’erreur matérielle. Ce recours peut être introduit par le demandeur (ou par l’OFPRA), lorsqu’une décision de la CNDA comporte une erreur matérielle, imputable à la juridiction, qui peut avoir exercé une influence sur le jugement de l’affaire. Tel est par exemple le cas lorsque la cour a commis une erreur dans le calcul du délai de recours et a considéré à tort le recours comme tardif ou encore lorsque que la formation de jugement a statué sans que les services de la cour ne lui aient transmis un mémoire dument enregistré auprès du greffe avant la clôture d’instruction. Il en va encore de même en cas de non concordance entre les motifs de la décision qui octroient la protection subsidiaire et le dispositif qui reconnaît la qualité de réfugié [29].

2- La décision de la CNDA peut faire l’objet d’un recours en cassation devant le Conseil d’Etat, qui vérifie la régularité de la procédure suivie et sanctionne les erreurs de droit. Le délai de recours est de 2 mois à compter de la notification de la décision de la Cour. Le Conseil d’Etat ne réexamine pas l’ensemble des éléments de l’affaire, mais seulement le respect des règles de procédure, l’absence d’erreur de fait et la correcte application du droit par le juge e de l’asile.
Si le Conseil d’Etat annule la décision, il peut renvoyer l’affaire devant la cour, qui doit alors se prononcer à nouveau sur l’affaire, mais il peut aussi décider de statuer lui-même définitivement sur l’octroi ou le refus de la protection [30]
Cette procédure peut être longue, eu égard aux délais de jugement du Conseil d’Etat, et coûteuse car le recours en cassation devant le Conseil d’Etat (pourvoi en cassation) doit être présenté par un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation [31].

Eric TIGOKI Avocat au Barreau de Paris Docteur en droit Chargé d’enseignement de droit public à l’Université d’Evry Val d’Essonne

[1Aux termes de l’article L.711-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « la qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de de son action en faveur de la liberté ainsi qu’à toute personne sur laquelle le Haut – commissariat des nations unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu’adopté par l’assemblée générale des nations unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l’article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux réfugiés en vertu de la convention de Genève susmentionnée »
La convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés reconnait l’asile à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ».
Le 4eme alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 proclame : « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d’asile sur le territoire de la République. »
Et aux termes de l’article 53-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 : « Les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif. » (Loi constitutionnelle n°93-1256 du 25 novembre 1993)
L’on relèvera que les deux dispositions n’ont pas la même force contraignante. Comme le souligne, en effet, le Professeur Guy CARCASSONNE : « Seulement, là où l’intéressé en application du préambule de 1946, bénéficiait d’un droit qu’un principe de valeur constitutionnelle lui accordait formellement, obligeant ainsi, en principe, les autorités françaises à le lui reconnaître, ce nouveau texte n’en fait plus qu’une possibilité : le titulaire du droit n’est plus l’étranger qui peut le faire valoir, il est devenu l’Etat qui peut, ou non, accorder l’asile. Il est difficile de voir là un progrès. Ce n’est même pas le maintien du statu quo ante. C’est une régression pure et simple par rapport à l’un des principes les plus traditionnels du droit français. » La Constitution, Paris, Seuil, 9eme édition, p. 266.

[2Au nombre de ses obligations figure celle, générale, de se conformer aux lois et règlements de la République française ainsi qu’aux mesures prises pour le maintien de l’ordre public.
Quant à ses droits, ils ont trait au séjour, y compris pour ses proches, aux prestations sociales et à la possibilité de travailler e France.
Ainsi, en application de l’article L.314-11-8° du CESEDA, la carte de résident d’une validité de 10 ans est délivrée de plein droit à l’étranger qui a été reconnu réfugié, sauf en cas de menace à l’ordre public.
Un titre de voyage est également délivré par la Préfecture du lieu du domicile du réfugié sur sa demande. Il est en principe valable deux ans pour tous les pays sauf celui de sa nationalité ou de résidence habituelle.
Le réfugié peut solliciter la nationalité française par naturalisation dès la reconnaissance de son statut sans attendre d’avoir 5 ans de résidence. Il doit cependant remplir les autres conditions concernant notamment la maîtrise de la langue française et l’intégration dans la société française.
Il bénéficie des prestations versées par la Caisse d’allocations familiales de manière rétroactive à son entrée en France, dans la limite de deux ans.
Le réfugié peut demander à bénéficier du revenu de solidarité active (RSA) dès la reconnaissance de son statut.
Exempté de la taxe de primo délivrance du titre de séjour, il peut demander à être rejoint par son conjoint et ses enfants au titre de la réunification familiale.

[3Terme générique qui désigne toute personne vivant dans un autre pays que celui de sa naissance, quelles qu’en soient les raisons, pour une durée supérieure à un an. Sont donc concernés : les réfugiés, les étudiants, les travailleurs étrangers. (Définition proposée par l’ONU, citée par M. DENIS-LINTON, Le droit d’asile. Paris. Dalloz, Coll. « A savoir » p. 2
« Ce qui caractérise fondamentalement un demandeur d’asile par rapport à celui qui sollicite un titre de séjour ou qui séjourne irrégulièrement dans un pays, c’est la nécessité pour le premier de fuir son pays d’origine, pour échapper à des persécutions ou des atteintes graves à sa vie ou sa liberté, et rechercher dans un pays d’accueil une protection dont il est privé alors que le second quitte son pays pour trouver ailleurs des conditions moins défavorables pour vivre et travailler », précise Mme DENIS-LINTON, Le droit d’asile Op ; Cit. p. 2

[4Sans être exhaustif : CIMADE, France Terre d’Asile, La Croix rouge.

[5Les plateformes d’accueil des demandeurs d’asile ont pour mission de :
- Renseigner le formulaire électronique d’enregistrement de la demande d’asile ;
- prendre rendez-vous au guichet unique et remettre à l’intéressé une convocation, qui lui indiquera le lieu, le jour et l’heure auxquels il devra se présenter au guichet unique. Ce rendez-vous a lieu au plus tard 3 jours après sa présentation auprès de l’association. Il peut être porté à 10 jours en cas de forte affluence ;
- prendre les photographies d’identité qui seront demandées au guichet unique.
L’ensemble du dossier est transmis au guichet unique par voie dématérialisée.

[6En application du Règlement n°604/2013 du Parlement européen et Conseil du 26 juin 2013, dit DUBLIN III. Il se peut en effet qu’un autre Etat européen que la France soit responsable de l’examen de la demande d’asile. Il en va ainsi :
- Si un autre Etat membre a délivré un titre de séjour ou un visa en cours de validité
- S’il est établi que l’intéressé a franchi irrégulièrement par voie terrestre, aérienne ou maritime la frontière extérieure d’un autre Etat membre
- S’il est entré sur le territoire de l’union européenne en franchissant en premier les frontières d’une Etat membre dans lequel il est dispensé de visa ;
- S’il a déjà demandé l’asile dans un autre Etat membre.
Si tel est le cas, la Préfecture entreprendra des démarches auprès de cet Etat pour lui demander de prendre en charge le demandeur d’asile.

[7L’attestation sera renouvelée pour une durée variable selon la procédure (9 mois pour les procédures normales et 6 mois pour les procédures prioritaires) Cf. CESEDA, 7eme édition, p. 615.

[8Il a été créé par la loi n°2006-911 du 25 juillet 2006 avant d’être modifié dans sa composition et ses compétences par la loi n°2015-925 du 29 juillet 2015 portant sur la réforme de l’asile, laquelle a introduit des mécanismes de parité et renforcé la participation des élus et des représentants de la société civile.

[9- Deux députés (une femme et un homme) désignés par l’Assemblée nationale ;
- Deux sénateurs (une femme et un homme) désignés par le Sénat ;
- Deux représentants de la France au Parlement européen (une femme et un homme) désignés par Décret ;
- Dix représentants de l’Etat ;
- un représentant du personnel de l’OFPRA élu pour trois ans par le personnel de l’Office dans les conditions fixées par un arrêté du ministre chargé de l’asile.

[10Ces trois personnalités sont nommées pour trois ans par décret sur proposition du ministre chargé de l’asile après avis des ministres représentés au conseil d’administration.

[11La notion de pays d’origine sûr est issue du droit communautaire. La loi n°2015-925 du 29 juillet 2015 précise la liste de des critères de détermination des pays d’origine sûr : « Un pays est considéré comme un pays d’origine sûr lorsque, sur la base de la situation légale, de l’application du droit dans le cadre d’un régime démocratique et des circonstances politiques générales, il peut être démontré que, d’une manière générale et uniformément pour les hommes comme pour les femmes, il n’y est jamais recouru à la persécution, ni à la torture, ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants et qu’il n’y a pas de menace en raison d’une violence qui peut s’étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle dans des situations de conflit armé international ou interne ».

[12La protection des réfugiés, apatrides ou bénéficiaires de la protection subsidiaire consiste à établir les documents d’état civil aux personnes protégées par l’Office qui se trouvent, du fait de leur statut, dans l’impossibilité de s’adresser aux autorités de leur pays d’origine pour en obtenir.
En effet, lors de leur arrivée en France, les réfugiés, apatrides et bénéficiaires de la protection subsidiaire ne possèdent bien souvent pas d’actes c d’état civil, soit qu’aucun acte ne leur ait été dressé dans leur Etat d’origine, soit qu’ils ne puissent en réclamer une expédition aux services d’état civil de cet Etat.
Afin de leur faciliter la preuve des évènements d’état civil les concernant, l’OFPRA a reçu une compétence générale pour leur établir des certificats attestant ces faits. Les actes et documents établis par l’office ont valeur d’actes authentiques (art L.721-3 et R.722-4 du CESEDA). Ainsi l’OFPRA, après enquête s’il y a lieu, reconstitue les documents d’état civil pour le réfugié, le bénéficiaire de la protection subsidiaire et l’apatride pour les évènements antérieurs à la reconnaissance du statut et, le cas échéant, pour les évènements postérieurs les ayant modifiés. Les documents que l’OFPRA reconstitue sont : les actes de naissance, les actes de mariage, les actes de décès. Elle consiste également à gérer tous les évènements de la vie civile des personnes bénéficiant de l’asile et à prendre en charge toutes les questions relatives au maintien du statut.

[13Depuis le mois de janvier 2017, celles-ci sont réparties en deux pôles d’instruction distincts : Europe Asie et Amériques-Afrique. Chaque pôle est composé de trois divisions géographiques : Europe (EU), Asie (AS), Europe-Asie (EA) pour le premier ; Afrique (AF), Amériques-Maghreb(AM) et Amériques-Afrique(AA) pour le second.

[14Elles portent le nom d’une personne qui a été reconnue réfugiée en France :
La Division Europe : Maria CASARES
La Division Asie : ATIQ RAHIMI
La Division Europe-Asie : Rudolf NUREEV
La Division Afrique : Geoffrey ORYEMA
La Division Amérique-Maghreb : Miguel ANGEL ESTRELLA
La Division Amérique-Afrique : Maya SURDUTS

[15Deux divisions apportent un concours particulier aux instructeurs. La division des affaires juridiques européennes et internationales (DAJEI). Elle a notamment pour mission : l’appui à l’instruction par le biais de réponses juridiques et pratiques aux consultations des autres divisions et services, la diffusion des informations juridiques et la participation à l’harmonisation de la doctrine et des pratiques de l’office ; la représentation de l’office devant les juridictions ;
La Division de l’information, de la documentation et des recherches(DIDR). Sa principale mission est d’apporter un appui à l’instruction en fournissant aux agents de l’Office une information fiable, objective, transparente et actualisée sur les pays d’origine afin d’aider à la prise de décision. Elle est également chargée de la formation des officiers de protection instructeurs sur les pays d’origine.

[16Dans le cadre de la procédure normale, l’Office dispose d’un délai de six mois pour statuer.

[17Dans le cadre de la procédure accélérée, ce délai est de quinze jours. Elle s’applique :
Aux ressortissants de « pays tiers sûrs » parce que considérés comme respectant les droits fondamentaux, ainsi qu’aux ressortissants des Etats membres de l’Union européenne ;
Aux personnes qui déposent une de réexamen après l’échec d’une demande antérieure.
Peuvent également être placées en procédure accélérée les personnes qui :
- Refusent de laisser scanner leurs empreintes ;
- Produisent de faux documents sur leur identité, leur nationalité, leur parcours d’exil ;
- Ont présenté d’autres demandes d’asile sous des identités différentes ;
- Déposent leur demande plus de cent vingt jours après leur entrée en France ou après la notification d’une mesure d’éloignement à leur encontre ;
- Sont considérées comme une menace grave pour la sécurité ou l’ordre public ou pour la sûreté de l’Etat.
La procédure accélérée, largement appliquée par l’administration, entraîne un abaissement des garanties de procédure : l’OFPRA doit- en principe-statuer dans les quinze jours et, en cas d’appel devant la CNDA, celle-ci doit stature dans un délai de cinq semaines au lieu de cinq mois, la requête étant examinée par un juge unique. De plus, l’OFII peut refuser d’accorder les « conditions matérielles d’accueil » (allocation et hébergement).

[18Le recours devant la CNDA est suspensif et permet de rester en France aussi longtemps que la décision n’a pas été rendue. En 2016, le taux de recours contre les décisions de rejet de l’OFPRA était de 81,1%. Cour nationale du droit d’asile. Rapport d’activité 2016. p. 6.

[19A peine d’irrecevabilité, ce recours doit être exercé dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision de l’office. Le délai de recours est augmenté d’un mois pour les requérants qui demeurent en Guadeloupe, en Guyane, à la Martinique, à la Réunion, à Saint Barthélémy, à Saint Martin, à Mayotte, à Saint Pierre et Miquelon, en Polynésie française, dans les iles Wallis et Futuna, en Nouvelle Calédonie et dans les terres australes et antarctiques françaises. (art.R.733-7 du CESEDA.)

[20La commission des recours des réfugiés, créée par la loi n°52-893 du 25 juillet 1952 a tenu sa première séance le 30 juillet 1953.
L’idée d’une juridiction spécialisée surgit au Parlement lors des débats relatifs à la création de l’OFPRA.
Elaboré par le gouvernement en 1950, le projet de loi portant création d’un Office français de protection des réfugiés et apatrides n’est débattu au parlement que deux ans plus tard.
Il ne prévoyait pas la création d’une juridiction spécialisée. Afin d’accorder des garanties supplémentaires aux réfugiés, la commission des affaires étrangères de l’assemblée nationale introduit un amendement créant une « commission des recours »
La juridiction n’est citée ni dans le titre de la loi du 25 juillet 1952 ni dans celui du décret du 2 mai 1953. Son appellation exacte a évolué : « Commission des recours » dans le texte fondateur, elle s’est intitulée à l’usage « Commission de recours des réfugiés et apatrides », puis « Commission de recours des réfugiés » avant de prendre sa dénomination actuelle en 2008 : Cour nationale du droit d’asile. Voir site Internet de la CNDA.

[21Le président de formation de jugement désigné par me président de la CNDA est nommé soit parmi les magistrats permanents de la cour, soit parmi les magistrats non permanents ayant au moins six mois d’expérience en formation collégiale à la cour. (Art.L.732-1 du CESEDA).

[22Deux personnalités qualifiées de nationalité française respectivement nommées :
- Par le Haut-Commissaire des Nations unies pour les réfugiés sur avis conforme du vice – président du conseil d’Etat en raison de ses compétences dans les domaines juridique ou géopolitique ;
- Par le vice-président du conseil d’Etat en raison de ses compétences dans les domaines juridique ou géopolitique (art.L.732-1 du CESEDA).

[23Voir (M.) DENIS-LINTON, Le Droit d’Asile, Paris, DALLOZ, Coll. « A savoir » 2017.

[24Le délai moyen constaté global de jugement est de 6 mois et 26 jours. Cour nationale du droit d’asile. Rapport d’activité 2016.p. 8.

[25Un interprète rétribué par l’Etat est désigné dans l’une des cent vingt langues pratiquées par la Cour et que le requérant a indiquée dans son recours ou dans une langue dont il est raisonnable de penser qu’il la comprend.

[26Composée d’un président et de deux assesseurs.

[27Sur 42968 décisions rendues, la qualité de réfugié a été accordée dans 4511 décisions. Ce qui correspond à 10,5% du total des décisions. Cour nationale du droit d’asile. Rapport d’activité 2016. p. 9.

[28Hors l’hypothèse particulière du réexamen. Tout individu, une fois sa demande d’asile définitivement rejetée, peut déposer une demande de réexamen ou de réouverture de sa demande d’asile à condition qu’il ait un nouvel élément à présenter à l’OFPRA concernant ses craintes de menaces ou de persécutions.
L’élément nouveau doit justifier les craintes de l’intéressé en cas de retour dans son pays et être en rapport étroit avec sa situation personnelle. Ce fait doit être intervenu :
- Soit postérieurement à la date de la décision de la CNDA (ou décision de l’OFPRA si la CNDA n’a pas été saisie) ;
- Soit avant la dernière décision, dans le cas où le demandeur établit qu’il n’a pas pu en avoir connaissance plus tôt. (cf. articles L.723-15 et L.723-16 du CESEDA)
L’intéressé doit se présenter à la Préfecture pour enregistrer sa demande de réexamen. A compter de ce nouvel enregistrement, il dispose de huit jours pour introduire une demande de réexamen auprès de l’OFPRA.
L’OFPRA procède à un examen préliminaire des faits ou des éléments nouveaux que le demandeur peut présenter. Lors de l’examen préliminaire, l’OFPRA peut ne pas procéder à un entretien. ( La cour précise que l’examen préliminaire de recevabilité ne fait cependant pas obstacle à la présentation de faits antérieurs à la décision définitive, dès lors que ces faits se rapportent à une situation réelle de vulnérabilité ayant empêché l’intéressé d’en faire état dans sa demande précédente. CNDA n°15025487 150 25488)
Lorsque, à la suite de cet examen préliminaire, l’OFPRA conclut que ces faits ou éléments nouveaux n’augmentent pas de manière significative la probabilité de justifier des conditions requises pour prétendre à une protection, il peut prendre une décision d’irrecevabilité.
Dans cette hypothèse, le recours devant la CNDA n’est pas suspensif et n’empêche l’exécution de la mesure d’éloignement.

[29CNDA 28 févrr.2008, Directeur général de l’OFPRA c/Mme Y. épouse A. req. n°615113 : rec. 2008. 18.

[30En 2016, 847 décisions rendues par la Cour nationale du droit d’asile ont fait l’objet d’un pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat (623 décisions en 2015), dont 14 pourvois introduits par l’OFPRA et 833 pourvois introduits par des requérants.
A l’issue de la procédure d’admission, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur 21 pourvois (contre 22 en 2015) et a censuré 16 décisions, renvoyant l’affaire à la CNDA pour qu’elle statue à nouveau. Cour nationale du droit d’asile. Rapport d’activité 2016. P. 10.

[31Une demande d’aide juridictionnelle peut être déposée auprès du Bureau d’aide juridictionnelle du Conseil d’Etat, mais elle ne sera en principe accordée que pour les dossiers considérés comme sérieux.