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L’Impôt sur la Fortune Immobilière en 7 points. Par Paul Creusat, Elève-avocat.
Parution : vendredi 5 janvier 2018
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La loi de finances pour 2018 abroge l’ISF et créé un nouvel impôt sur la seule fortune immobilière. Présentation du nouveau dispositif en 7 points clefs.

Moins d’un an après l’élection présidentielle, l’engagement pris par le candidat Emmanuel Macron de transformer l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) en Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) est concrétisé par l’article 31 de la loi de finances pour 2018. Celle-ci a été votée en dernière lecture par l’Assemblée Nationale le 22 décembre 2017. L’essentiel des dispositions de ce texte a été validé par le Conseil Constitutionnel le 28 décembre 2017 (décision 2017-758 DC).

Revue du nouveau dispositif de taxation du patrimoine en 7 points.

1. Sur la forme.

Le législateur a choisi d’abroger entièrement les dispositions régissant l’ISF (articles 885 A et suivants du Code Général des Impôts - CGI). Les praticiens de la fiscalité patrimoniale vont désormais devoir s’habituer à citer un nouveau chapitre du CGI dédié à l’IFI : l’impôt est institué à l’article 964 du même code.

Certains vestiges textuels de l’ISF survivent toutefois au sein des dispositions régissant l’IFI. C’est notamment le cas de la tarification et du barème de l’impôt, qui restent inchangés.

De plus, la loi de finances pour 2018 a également permis d’intégrer à la loi des éléments qui relevaient en matière d’ISF de la simple tolérance administrative. Ainsi, et par exemple, la holding animatrice est légalement assimilée à une société opérationnelle (ie. société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale) en matière d’IFI.

2. Assiette générale de l’IFI.

On assiste à un véritable changement de philosophie en matière d’imposition du patrimoine. Alors que le principe en matière d’ISF était la taxation de l’ensemble des actifs détenus par le contribuable (sauf exceptions), le nouvel impôt n’a vocation qu’à taxer les biens ou droits immobiliers.

A ce titre, sont distingués deux types de biens ou droits immobiliers taxables :
- ceux détenus directement par le redevable ;
- ceux détenus par l’intermédiaire d’une société.

3. Actifs détenus par le contribuable.

En principe, l’ensemble des biens et droits immobiliers détenus par le contribuable entrent dans le champ de l’IFI.

Sont également taxés les titres de sociétés au sein desquelles le redevable détient une participation.

Néanmoins, les biens affectés à l’activité professionnelle du contribuable ont vocation à être exonérés de l’IFI.

C’est ainsi le cas des actifs immobiliers et des titres de sociétés détenus directement et affectés à l’activité commerciale, industrielle, artisanale, agricole ou libérale du contribuable lui-même ou d’une société (sous réserve dans cette dernière hypothèse du respect d’un certain nombre de conditions tenant notamment à l’exercice d’un mandat social et à des seuils minimum de détention de capital).

Les titres de société détenus par le contribuable qui ne bénéficient pas de l’exonération sont taxés pour leur valeur vénale, après application d’un coefficient représentatif de la valeur des biens immobiliers détenus par la société.

4. Titres de sociétés ne bénéficiant pas de l’exonération générale.

Les titres de sociétés détenus par les redevables de l’IFI sont taxés à hauteur du produit de leur valeur vénale avec un coefficient égal au rapport entre la valeur vénale des biens et droits immobiliers détenus par la société et la valeur vénale de la totalité des actifs de la société.

De façon générale, ne sont pas retenues les participations au sein de sociétés ayant une activité opérationnelle et au sein desquelles le redevable détient moins de 10% du capital et des droits de vote (sauf lorsqu’il bénéficie de la jouissance des biens immobiliers de la société).

Par ailleurs, le législateur a souhaité exclure de l’assiette de l’impôt les actifs participant à un cycle de production.

Ainsi, ne sont pas pris en compte pour le calcul de l’actif taxable les biens immobiliers détenus par une société ayant une activité opérationnelle et qui sont affectés à cette dernière. Le texte fiscal étend cette exception au sein des groupes, permettant d’éviter dans certains cas l’imposition de biens immobiliers affectés à l’exploitation de sociétés mères ou soeurs.

5. Limitations à la déduction des passifs grevant la valeur des biens ou droits taxés.

La valeur des actifs taxables est en principe réduite à hauteur des passifs afférents (dépenses d’acquisition, de réparation, d’entretien, impôts…).

Toutefois, le nouvel article 974 du CGI institue un certain nombre de limitations à leur déductibilité.
Les passifs concernés sont essentiellement les dettes contractées par le contribuable auprès des membres de sa famille ou par une société envers le contribuable lui-même. En principe, ils ne sont donc pas déductibles.

La possibilité est toutefois offerte au contribuable de les déduire, à condition de démontrer leur caractère normal (par exemple au regard du montant des remboursements et du respect du terme des échéances).

6. Plafonnement du passif déductible.

Le IV du nouvel article 974 du CGI instaure un plafond au-delà duquel les passifs déductibles ne sont admis en déduction qu’à hauteur de 50% de leur valeur.

Ainsi, lorsque la valeur vénale des actifs taxables excède 5 millions d’euros et que le montant total des dettes venant en déduction de la valeur des biens imposables excède 60% de cette valeur, l’excédent ne peut être déduit qu’à hauteur de 50%.

Là encore, il est prévu une clause de sauvegarde, le contribuable pouvant déduire intégralement les dettes dont il peut justifier qu’elles n’ont pas été contractées dans un objectif principalement fiscal.

7. Modalités déclaratives.

Les redevables de l’ISF disposant d’un patrimoine supérieur à un certain montant (2,57 millions euros en 2017) devaient déposer une déclaration spécifique au cours du mois de juin de chaque année.

A partir de 2018, tous les redevables de l’IFI déclareront leur patrimoine imposable simultanément à leur déclaration servant à l’établissement de l’impôt sur le revenu.

Conclusion.

Les contribuables susceptibles d’être redevables de l’IFI doivent dès à présent établir une cartographie précise de leur patrimoine afin de localiser les biens et droits immobiliers taxables.
De la même façon, la déductibilité de l’ensemble des passifs grevant leur patrimoine doit être vérifiée.

Dans certains cas, les redevables de l’IFI pourraient être confrontés à des difficultés dans l’obtention des informations nécessaires auprès des sociétés dont ils détiennent des titres. Une raison de plus pour certains contribuables de travailler dès maintenant à l’établissement de leur déclaration de patrimoine.

Élève avocat