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Tenue de l’assemblée générale annuelle et prorogation du délai d’approbation des comptes : formalités procédurales et délais. Par Narcisse Hervé Ekome Essake, Avocat.
Parution : mercredi 17 janvier 2018
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Brève présentation de la procedure de prorogation de la date de tenue de l’assemblée générale annuelle d’approbation des comptes - conditions et délais à la lumière de l’Acte uniforme OHADA relatif au droit des sociétés et des groupements d’intérêt économique.

Passée l’euphorie de la saint sylvestre et l’exercice fiscal clos, voici venu le temps des assemblées, notamment l’assemblée générale annuelle d’approbation des comptes de l’exercice écoulé. Nous nous proposons de présenter brièvement, à travers quelques interrogations les exigences légales liées à la tenue de l’assemblée générale ordinaire et les modalités d’introduction par les dirigeants sociaux d’une requête en prorogation de délai.

1- Existe-t-il une obligation légale de tenue de l’assemblée générale annuelle au cours d’une périodicité déterminée.

C’est un truisme d’affirmer que quelque soit la forme qu’elles épousent, les sociétés commerciales sont tenues de procéder à l’approbation des comptes de l’exercice clos par la tenue d’une assemblée générale annuelle au cours de laquelle les associés devront donner au mandataire quitus de sa gestion et approuver les comptes qui leur sont présentés.

L’article 140 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés et du groupement d’intérêt économique révisé le 30 juin 2014 dispose notamment :
« Dans les sociétés anonymes, les sociétés par actions simplifiées et, le cas échéant, dans les sociétés à responsabilité limitée, les états financiers de synthèse annuels et le rapport de gestion sont adresses aux commissaires aux comptes, quarante-cinq (45) jours au moins avant la date de l’assemblée générale ordinaire.

Ces documents sont présentés à l’assemblée générale de la société statuant sur les états financiers de synthèse qui doit obligatoirement se tenir dans les six (6) mois de la clôture de l’exercice ».

Plus spécifiquement, cette exigence est formulée pour les formes les plus usuelles, c’est-à-dire les sociétés anonymes, la société à responsabilité limité et la société par actions simplifiées respectivement par les articles 548 et 348.

La convocation de l’Assemblée générale annuelle doit donc intervenir avant le 30 juin de chaque année pour les entreprises dont l’exercice fiscal est clos au 31 décembre.

2- Quels sont les risques encourus par les dirigeants sociaux qui n’ont pas tenu d’assemblée annuelle dans le délai de 6 mois prévu par l’Acte uniforme.

Les dirigeants sociaux qui ne se sont pas astreints à leurs obligations légales encourent aussi bien des sanctions civiles que pénales.

Au civil, il peut être mis à leur passif une faute de gestion tandis qu’au pénal, ils peuvent être poursuivis sur le fondement de l’article 892 de l’Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et groupements d’intérêts économique pour défaut d’établissement des procès-verbaux d’assemblées dans les formes requises.

Cependant, l’Acte uniforme a offert aux dirigeants sociaux la possibilité de solliciter en justice une prorogation des délais de tenue de l’assemblée générale ordinaire.

3- Quelle est la procédure pour obtenir du juge la prorogation du délai de tenue de l’assemblée générale ordinaire ?

Il résulte de la lecture de l’article 348 alinéa 1er de l’Acte uniforme que les dirigeants sociaux peuvent demander une prorogation du délai de tenue de l’assemblée générale

Ils doivent pour ce faire saisir le président du Tribunal d’instance compétent du lieu de situation du siège de la société. Selon l’organisation judiciaire interne des États, il pourrait s’agir du président du Tribunal de première instance à l’instar du Cameroun ou alors le président du Tribunal de commerce à l’image du Sénégal. La requête doit être présentée avant l’expiration du délai de 6 mois.

À la requête signée du représentant légal de la société doivent être annexés les documents ci-après : un extrait d’immatriculation au RCCM, les statuts, et dans l’hypothèse d’une première assemblée manquée, un procès-verbal de carence.

Par contre, faute de tenue de l’assemblée dans le délai légal et en l’absence d’une requête formulée en prorogation, le ministère public ou tout tiers intéressé peut saisir le juge des référés, lequel peut désigner un mandataire ad hoc ou assortir d’astreinte l’injonction faite aux dirigeants sociaux de convoquer l’assemblée.

4- Existe-t-il des exceptions à l’obligation de convocation et de tenue d’une assemblée générale ordinaire pour approbation des comptes ?

Il est utile de relever que le délai de six (06) mois courant à compter de la clôture de l’exercice pour convoquer une assemblée générale n’est pas applicable aux SAS dont l’associé unique est le (la) Président(e). Dans cette hypothèse, il existe deux alternatives : soit le président procède à l’approbation des comptes après rapport du commissaire aux comptes le cas échéant dans le délai de six (6) mois à compter de la clôture de l’exercice avec inscription dans un registre spécial, soit il fait déposer au registre de commerce et de crédit mobilier l’inventaire et les comptes annuels, lequel dépôt vaut approbation des comptes.

Pour la SARL avec associé unique, les décisions sont prises par l’actionnaire unique dans les six (6) mois de la clôture de l’exercice, c’est la substance des articles 347 alinéa 1er, 558 alinéa 1er et 559 alinéa 1er.

Bien plus, il n’est pas vain d’évoquer un autre cas excepté. C’est celui de certaines sociétés commerciales qui ne sont pas obligées d’approuver les comptes en raison de la prise en compte de la période au cours de laquelle elles ont débuté leur activité. En pratique l’Administration fiscale prend en considération, dans une approche certes discutable, la date d’édition de la carte de contribuable.

L’article 7 alinéa 3 de l’Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation des Comptabilités des entreprises dispose en ce sens « La durée de l’exercice est exceptionnellement inférieure à douze mois pour le premier exercice débutant au cours du premier semestre de l’année civile. Cette durée peut être supérieure à douze mois pour le premier exercice commencé au cours du deuxième semestre de l’année »

Il est donc acquis que les sociétés qui débutent leur activité au second semestre de l’année civile « n » ont la possibilité d’approuver les états financiers en année « n+2 » soit un (1) an et demi plus tard : on parle alors d’exercice long.

En considération des spécificités liées à chacune des hypothèses envisagées, il est toujours utile pour les entreprises de se faire accompagner par un professionnel.

Narcisse Hervé Ekome Essake Avocat-Associé
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