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Compte à l’étranger non régularisé au 1er janvier 2018, que faire ? Par Frédéric Naïm, Avocat.
Parution : mercredi 7 mars 2018
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Début 2018, un certain nombre de contribuables disposant d’un compte à l’étranger n’ont pas choisi ou pas pu régulariser leur compte auprès de la cellule de régularisation, le STDR (Service de Traitement des Déclarations Rectificatives), qui a fermé au 1er janvier. Que se passe-t-il maintenant depuis cette fermeture ?

Aujourd’hui, on n’a pas de visibilité sur le cadre juridique des régularisations à venir, mais rien ne vous interdit bien évidemment de continuer à régulariser votre compte au-delà du délai légal. La seule différence notable est que vous ne pourrez plus bénéficier de la remise de pénalité liée à la circulaire Cazeneuve ; cependant, à mon sens, aucune règle ne s’oppose à ce vous choisissiez de régulariser votre compte. Comment évaluez la situation ? J’ai pu rencontrer pas mal de personnes qui, sachant qu’elles ne se situaient plus dans le cadre juridique du STDR, s’interrogeaient sur le véritable intérêt de régulariser et la différence entre régulariser et ne pas le faire.

Il est vrai que l’amende pour défaut de déclaration du compte à l’étranger est la même. Qu’on régularise ou non le compte, le montant de l’amende est le même et il n’y a pas de ‘bonus’ à régulariser.

Je mets de côté la menace brandie par l’administration fiscale, mais peu crédible à mes yeux, de dire que les dossiers où il n’y a pas eu de régularisation sont plus sujets à pénalisation ; en effet, je ne vois pas pourquoi on aurait un traitement différencié de ces dossiers. En revanche, le changement le plus notable, non prévu par les textes mais existant en pratique, est que l’administration a donné comme consigne à ses agents d’appliquer un arsenal législatif précis à ceux qui ne régularisent pas leurs comptes. Cet arsenal législatif précis est l’opposition de l’article L23 C du livre de procédures fiscales : l’administration a comme consigne de venir dire au contribuable qui serait détecté et n’aurait pas régularisé, qu’elle lui applique un « impôt » égal à 60% du montant des comptes détenus à l’étranger, considérant que c’est une donation d’une personne étrangère, sans lien familial, et taxe ces sommes aux droits de mutation à 60%.

Ce texte a un fondement légal qui est largement contestable, et aujourd’hui plusieurs recours sont initiés contre cette disposition ; mais elle sera quand même appliquée et constitue une différence psychologique de taille. Si vous choisissez de régulariser, vous êtes à peu près certain que ce cadre ne vous sera pas opposé.
On peut tout à fait supposer que les dossiers qui n’ont pas été régularisés avant le 31 décembre 2017 sont des dossiers difficilement régularisables pour diverses raisons, peut-être des recettes non déclarées trop récentes pour entrer dans le cadre d’une régularisation ; mais il faut intégrer le fait qu’à compter d’aujourd’hui et notamment grâce à l’échange automatique des informations prévu sur le papier, on a tout de même un risque d’avoir un échange d’informations dans le temps avec l’administration fiscale française, qui fait que votre risque augmente d’année en année. Donc les personnes qui choisissent de ne pas régulariser mais qui maintiennent la détention d’un compte à l’étranger continuent de courir un risque qui va être finalement de plus en plus élevé d’année en année.

Le conseil qu’on peut donner bien évidemment est de tenter la démarche de la régularisation lorsque cela est possible, et sinon de cesser d’avoir un compte à l’étranger qui crée un vrai risque de poursuite d’une faute vis-à-vis de l’administration fiscale ; au moins essayer de ne plus avoir de compte à l’étranger pour faire cesser le risque pour l’avenir. Sachant qu’une fois le compte fermé, le risque continuera d’exister sur les dix années précédentes, mais dans dix ans finalement votre risque sera terminé et d’année en année il diminuera par 10ème grâce au jeu de la prescription.

Maître Frédéric Naïm, avocat fiscaliste Spécialiste du contrôle fiscal, redressement fiscal, contentieux fiscal [mail->frederic@naimavocats.fr] www.naimavocatfiscaliste.com