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Plagiat à l’université : quelle sanction privilegier ? Par Yves Le Duc.
Parution : jeudi 22 mars 2018
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Le plagiat à l’université semble désormais plus facile à détecter grâce aux logiciels anti-plagiat.
Mais les réponses administratives, juridiques et pédagogiques au plagiat sont elles beaucoup plus mal aisées à élaborer.

Une étudiante préparait son dernier semestre de licence professionnelle mention intervention sociale à l’université Paris Descartes.
A l’issue de la soutenance de son mémoire de projet tuteuré, elle s’est accusée d’un plagiat de quelques pages.
Le directeur des études de la licence professionnelle lui a répondu par mail que : "plagier était un délit mais qu’elle n’aurait pas de sanction disciplinaire et que son plagiat impacterait sa note de projet tuteuré".

Les règles de validation du diplôme national de licence professionnelle ont été fixées par arrêté en date du 17 novembre 1999.
Ces règles prévoient que pour la délivrance de ce diplôme, tous les semestres doivent avoir été validés, que les unités d’enseignement (UE) se compensent entre elles à condition que leur note soit de 7/20 minimum et que la moyenne de l’ensemble des UE doit être au moins de 10/20
L’étudiante a obtenu la note de 9/20 à son projet tuteuré et une moyenne de 12, 286 au dernier semestre.
En application de la réglementation du diplôme de licence professionnelle, l’étudiante pouvait donc légitimement réclamer la délivrance de son diplôme.

En l’absence de note éliminatoire, les juges de la Cour administrative d’appel de Paris lui ont donné raison et ont ordonné à l’université la délivrance du diplôme dans un délai de 2 mois.

Quelle sanction pour un plagiat ?

Le plagiat constitue un délit qui expose son auteur à des sanctions pénales et (ou) disciplinaires.
Une procédure disciplinaire peut donc être engagée par une université, conformément à son règlement des examens et en respectant la procédure s’appliquant dans tous les établissements publics d’enseignement supérieur (voir décret du 13 juillet 1992).

De nombreuses universités ont rédigé des chartes anti-plagiat définissant la fraude par plagiat et les réponses qu’elles souhaitaient y apporter.
Ces chartes sont à usage aussi bien des étudiants que des enseignants.
Mais les enseignants plutôt que de recourir à des sanctions disciplinaires peuvent vouloir privilégier des sanctions à vocation pédagogique pour des fraudes de moindre envergure.

C’est l’option qui avait été choisie par le responsable de la licence de l’université Paris Descartes.
La sanction consiste alors à abaisser la note de l’épreuve durant laquelle l’étudiant a au recours à des moyens frauduleux.
Cette méthode à l’avantage de graduer la sanction en fonction en fonction de la gravité de la fraude.
Mais elle peut aussi soulever des difficultés techniques : la sanction doit en effet être proportionnelle à la faute commise, ni plus ni moins.

Les magistrats de la Cour administrative d’appel (CAA) de Marseille avaient déjà admis la légalité d’une sanction pédagogique sans y voir une sanction disciplinaire déguisée : Arrêt de la CAA de Marseille du 16 janvier 2007.
Dans cette affaire, une note de 6/20 avait été infligée à un étudiant pour un plagiat de 3 pages dans son mémoire de DEA.

Dans l’affaire jugée à Paris, les magistrats ont repris la même argumentation : les "simples" sanctions pédagogiques sont juridiquement autorisées pour répondre à un plagiat.

A la lumière de ces jurisprudences, il est probable que le débat sur l’intérêt des sanctions pédagogiques se déplace en partie sur le terrain de leur justification morale.
Arrêt n°17PA00477 CAA de PARIS du 13 mars 2018

YLD
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