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Le traitement des revenus mixtes réalisés en Israël et à l’étranger. Par Boaz Feinberg, Avocat.
Parution : mardi 27 mars 2018
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En vertu de l’Ordonnance Fiscale Israélienne, un nouvel immigrant qui arrive en Israël ne sera imposé que sur les revenus qu’il réalise en Israël et bénéficiera donc d’une exonération sur les revenus réalisés à l’étranger. La situation se complique lorsqu’un nouvel immigrant réalise dans la même année des revenus à la fois en Israël et à l’étranger. Si le traitement de ces revenus mixtes s’effectuait conformément à une position de l’Autorité fiscale Israélienne, cette position a été remise en cause par une décision rendue par le Tribunal de District de Lod.

Afin d’attirer les Juifs du monde entier à immigrer en Israël et/ou à investir leurs fonds en Israël, le jeune Etat qui fêtera bientôt ses 70 ans s’est doté d’une politique fiscale plus qu’incitative à l’égard de ces derniers.

En effet, Israël a introduit en 2008 une réforme fiscale dans la Section 14 (a) de l’Income Tax Ordinance (« ITO ») ayant pour objectif d’encourager les Nouveaux Immigrants ("Olim Chadashim" en hébreu) et les Résidents de Retour ("Toshavim Chozerim" en hébreu) à s’installer définitivement en Israël en leur accordant des avantages fiscaux conséquents.

L’article 14 (a) de l’ITO prévoit que les Nouveaux Immigrants et les Résidents de Retour ont droit notamment à une exonération de l’impôt israélien sur les revenus réalisés à l’étranger tels qu’énumérés par les sections 2, 2A et 3 de l’ITO. Cette exonération dure 10 ans à partir de la date à laquelle l’intéressé devient un résident fiscal israélien (« Période d’Exonération »). En d’autres termes, pendant la Période d’Exonération, les Nouveaux Immigrants et les Résidents de Retour ne sont imposés que sur les revenus qu’ils réalisent en Israël (e.g. dividendes distribués par des sociétés israéliennes, services fournis en Israël…etc.).

Par conséquent, la question de savoir si un Nouvel Immigrant ou un Résident de Retour réalise un revenu en Israël ou à l’étranger permet de déterminer si ce dernier va payer ou non des impôts en Israël sur ces revenus pendant la Période d’Exonération.

Dès lors que l’autorité fiscale israélienne, l’Israeli Tax Authority (ITA), considère que le revenu d’un tel contribuable est réalisé en dehors d’Israël, ce dernier sera exonéré d’impôt en Israël sur ledit revenu pendant la Période d’Exonération. A l’inverse, si le revenu est considéré comme étant réalisé en Israël, le contribuable sera alors imposé en Israël sur ce revenu comme n’importe quel autre résident israélien. Dans ce cas, l’une des problématiques les plus complexes est alors de savoir comment sera imposé le revenu d’un Nouvel Immigrant ou d’un Résident de Retour qui a séjourné à la fois en Israël et à l’étranger au cours d’une même année pendant la Période d’Exonération.

Sur cette question, la position de l’ITA est de considérer que si un Nouvel Immigrant ou un Résident de Retour travaille en Israël et à l’étranger au cours d’une même année pendant la Période d’Exonération, les revenus dégagés par cette activité « mixte » seront considérés comme ayant été réalisés en Israël (et seront donc imposés en Israël) à proportion du nombre de jours que le contribuable a séjourné en Israël. Symétriquement, ces revenus « mixtes » seront considérés comme ayant été réalisés à l’étranger (et seront donc totalement exonérés d’impôt en Israël) à proportion du nombre de jours que le contribuable a séjourné en dehors d’Israël.

Cette position de l’administration fiscale, bien qu’elle semble être le moyen le plus simple de partager de tels revenus mixtes, est injuste et crée une distorsion importante dans de nombreux cas, étant donné qu’une personne qui reste en Israël principalement pour prendre des vacances et passer du temps avec sa famille alors qu’elle travaille principalement en dehors d’Israël, subit un préjudice considérable du fait de cette position de l’ITA.

Récemment, dans l’affaire Yehuda Talmi rendue le 21 janvier 2018 par le tribunal de district de Lod, la juridiction s’est penchée directement sur la position de l’ITA et a jugé que cette position n’était pas contraignante et ne constituait seulement qu’un point de départ du raisonnement. Dans cette affaire, le tribunal de district a jugé que si le contribuable produit un calcul alternatif dans lequel il divisera son revenu entre Israël et l’étranger en fonction des différentes fonctions qu’il a exercées en Israël et à l’étranger, tout en étayant le calcul par des documents et des explications fiables, alors son revenu peut être réparti entre Israël et large selon ce calcul alternatif et non selon le critère "technique" des jours passés en Israël et à l’étranger.

Un autre élément remarquable qui ressort de l’affaire Talmi est que, pour permettre le calcul de la répartition des revenus mixtes entre Israël et l’étranger, ainsi que pour étayer toute autre demande concernant le statut de Résident de Retour (ou de Nouvel Immigrant) et les avantages fiscaux qui en découlent, il n’ y a pas de substitut à un avis juridique étayé par des références ordonnées et raisonnées. En effet, ce dernier permet de soutenir le statut du contribuable en tant que Résident de Retour (ou Nouvel Immigrant) et permet aussi de justifier les diverses fonctions de son travail en Israël et à l’étranger.

Boaz Feinberg Avocat associé, en charge du Département Tax Law et Anti-Money Laundering du Cabinet ZAG-S&W E-mail: [->boazf@zag-sw.co.il]