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Les jours de réduction du temps de travail (RTT) : mode d’emploi. Par Emmanuelle Destaillats, Avocat.
Parution : vendredi 25 mai 2018
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Les jours de RTT (Réduction du Temps de Travail) ont été instaurés, à partir du 1er janvier 2000, par la loi du 13 juin 1998 d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail qui prévoyait un passage progressif de la durée légale hebdomadaire de travail de 39 à 35 heures.

La réduction du temps de travail (RTT) est un dispositif conventionnel qui prévoit d’attribuer des journées ou des demi-journées de repos à un salarié dont la durée de travail est supérieure à 35 heures par semaine, dans la limite de 39 heures hebdomadaires.

Le bénéfice des jours de RTT est fixé nécessairement par une convention ou un accord collectif, conclu avant le 22 août 2008 et qui détermine notamment :
- les salariés concernés ;
- le nombre de jours attribués ;
- les modalités de prise des journées ou des demi-journées de repos, notamment les délais dans lesquels ces repos sont pris dans la limite de l’année ;
- les modalités de répartition dans le temps des droits à rémunération ;
- le cas échéant, l’alimentation du compte épargne temps (CET) par des jours de repos.

La loi n°2008-789 du 20 août 2008 a supprimé en tant que dispositif spécifique le régime des JRTT.

Toutefois, les accords conclus avant cette loi restent en vigueur.

Mode d’emploi du dispositif RTT.

Pour quels salariés ?

Le dispositif des RTT vise à ramener la durée moyenne hebdomadaire du salarié à 35 heures. Il concerne donc les salariés travaillant au-delà de 35 heures par semaine.

Les JRTT s’acquièrent au-delà de la 35e heure et au maximum jusqu’à la 39e heure.

Sont exclus du système de JRTT :
- les salariés à temps partiel sauf si l’accord collectif en dispose expressément autrement.
- les cadres dirigeants définis à l’article L. 3111-2 du Code du travail, lesquels ne sont pas soumis aux dispositions légales relatives à la durée du travail ;
- les salariés soumis à un forfait annuel en jours.

Attention en effet pour les salariés au forfait jours : même si les jours de repos dont ils bénéficient sont souvent appelés, à tort, des « RTT », ces jours n’obéissent pas au même régime. En effet, en matière de forfait jours, la durée du travail est uniquement décomptée en jours, sans référence au nombre d’heures travaillées. Il n’est donc pas question de ramener la durée hebdomadaire de travail du salarié à 35 heures. Les salariés au forfait jours bénéficient de jours de repos supplémentaires - qui ne sont pas de JRTT - octroyés afin de respecter le volume de jours travaillés fixé par la convention individuelle de forfait.

Enfin, il est également fréquent que l’accord collectif organisant les JRTT exclut les intérimaires et/ou les contrats à durée déterminée, notamment lorsque ces contrats sont prévus pour une courte durée.

Combien de jours RTT ?

Les jours de RTT ont pour objet de compenser les heures effectuées au-delà de 35 heures et dans la limite de 39 heures.

Dès lors, le nombre de JRTT dépend de la durée hebdomadaire accomplie par le salarié.

Il peut être fixé selon deux méthodes :
- La méthode “réaliste” selon laquelle le nombre de jours de RTT est calculé à partir des semaines pendant lesquelles le salarié a travaillé plus de 35 heures, si bien qu’il varie d’une année à l’autre en fonction des jours fériés, des congés payés, des arrêts maladie etc.

- La méthode “forfaitaire” selon laquelle le nombre de jours de RTT par an est prédéfini directement par l’accord collectif instituant ce dispositif. Les salariés ont donc le même nombre de JRTT chaque année, peu important les jours fériés - ce qui permet une gestion plus simple pour les entreprises. Cela n’empêche toutefois pas que le nombre de JRTT soit diminué en raison des absences du salarié (maladie, congé sans solde…).

L’impact des absences du salarié sur le nombre de JRTT.

Les absences telles que les arrêts maladie, les arrêts pour accident du travail, le congé maternité ou d’adoption entraînent en principe une diminution du nombre de JRTT.

Toutefois, certaines absences sont assimilées légalement par la loi à du temps de travail effectif pour l’acquisition des JRTT, comme les temps de formation.

De même, l’accord collectif instituant les JRTT ou même un usage d’entreprise peut prévoir que certaines absences n’impactent pas le nombre de JRTT du salarié.

Comment utiliser les JRTT ?

C’est l’accord collectif instituant les JRTT qui détermine la procédure à respecter pour demander à bénéficier des jours de RTT. Celui-ci prévoit notamment :

- les procédures de prise des journées ou des demi-journées de repos (pour partie au choix du salarié et pour partie au choix de l’employeur) ;

- les délais maxima dans lesquels ces repos sont pris (dans la limite de l’année) ;

- les délais de prévenance pour fixer les JRTT ou modifier les dates de fixation.

L’employeur doit s’assurer que le salarié a pris tous ses RTT avant la fin de la période de référence fixée par l’accord collectif. En effet, les JRTT doivent nécessairement être pris sur cette période sous peine d’être perdus. Ils ne peuvent pas être reportés sur l’année suivante.

Si le salarié n’a pu poser tous ses JRTT du fait de l’employeur, il peut exiger leur paiement.

Les JRTT peuvent être accolés entre eux ou à des congés payés.

L’hypothèse du don de JRTT.

Depuis la loi n°2014-459 du 9 mai 2014, les salariés peuvent légalement donner des jours de RTT à leurs collègues parent d’enfant gravement malade (article L.1225-65-1 et suivant du Code du travail).

Très récemment, la loi n° 2018-84 du 13 février 2018 a étendu cette possibilité de don de JRTT non pris aux proches aidants de personnes en perte d’autonomie ou présentant un handicap (articles L.3142-16 et suivants du Code du travail).

Quid de l’articulation entre l’exercice d’un mandat de représentation du personnel et les JRTT ?

Les représentants du personnel peuvent utiliser leur crédit d’heures pendant leur JRTT.

Cependant, il n’est pas possible pour un représentant du personnel du cumuler deux rémunérations pour la même journée, c’est-à-dire celle due au titre d’un JRTT et l’indemnité au titre des heures de délégation.

Il faut souligner que les absences au titre des heures de délégation des représentants du personnel, ou au titre des réunions à l’initiative de l’employeur, n’impactent pas le nombre de JRTT de ces derniers.

A l’inverse, la prise de JRTT n’impacte pas le nombre mensuel d’heures de délégation attribué au représentant du personnel.

Peut-on racheter des JRTT ?

La loi n°2008-789 du 20 août 2008 permettait au salarié, jusqu’au 31 décembre 2009, avec l’accord de l’employeur, de renoncer à une partie de ses JRTT en contrepartie de leur paiement majoré lequel faisait l’objet d’exonérations sociales et fiscales.

Depuis le 1er janvier 2010, le salarié ne peut plus se faire racheter ses JRTT, même avec l’accord de son employeur.

Comme évoqué précédemment, un accord collectif peut toutefois prévoir la possibilité pour le salarié l’affecter ses JRTT sur son Compte Épargne Temps (CET).

Dès lors, le salarié pourra utiliser ces jours pour un départ anticipé à la retraite, le financement d’une formation ou d’un long congé ou encore les monétiser.

Comment sont rémunérés les JRTT ?

Le salarié qui bénéficie d’une journée ou demi-journée de RTT est rémunéré aux conditions habituelles, comme en matière de congés payés.

Il faut noter que les heures travaillées au-delà de la limite de 39 heures hebdomadaires ou au-delà de 1 607 heures annuelles sont considérées et rémunérées comme des heures supplémentaires.

Quid des JRTT au moment de la rupture du contrat de travail ?

Les JRTT acquis et non pris seront payés lors du solde de tout compte.

Sur demande du salarié, l’employeur peut accorder par anticipation des JRTT non encore acquis par le salarié - qui seront dès lors déduits du solde de tout compte.

Si l’employeur dispense le salarié de préavis, le salarié continue d’acquérir des JRTT qui seront payés dans le cadre du solde de tout compte [1].

Emmanuelle DESTAILLATS Avocat spécialiste en droit du travail, droit de la sécurité sociale et droit de la protection sociale.
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