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Valorisation fiscale du statut de bénévole associatif. Par Gabin Migliore, Avocat.
Parution : vendredi 15 juin 2018
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Une proposition de loi tend à valoriser fiscalement les bénévoles afin de faire face au manque de ressources humaines des associations. Fondé sur les dispositifs existants, son objectif est de gratifier les bénévoles dont le statut est bien souvent méconnu.

La liberté d’association, principe fondamental reconnu par les lois de la République, tient aujourd’hui sa vivacité des personnes qui donnent de leurs temps pour les autres. Ce don est constant chez plus de 13 millions de bénévoles en France [1] mais les associations déplorent l’insuffisance du nombre. Sans doute faut-il rechercher les causes de ce constat dans le manque d’accompagnement, mais également dans l’absence de valorisation de ce statut. De récentes propositions de loi tendent à résorber cette dernière difficulté notamment par une récompense fiscale de l’engagement pour autrui.

Un statut de bénévole associatif méconnu méritant d’être reconnu.

Liberté et gratuité sont deux notions qui caractérisent le bénévole associatif. Cette personne de bonne volonté, comme le souligne l’étymologie du mot, est un acteur incontournable de la vie associative. Il exerce notamment des fonctions administratives, comptables, juridiques, financières qui sont vitales pour de nombreux groupements. Pour autant, certains déplorent l’absence de définition juridique du bénévolat.

La définition la plus souvent avancée est celle du Conseil Économique et social issue d’un avis du 24 février 1993 : le bénévole est une « personne qui s’engage librement pour mener une action non salariée en direction d’autrui, en dehors de son temps professionnel et familial » [2]. Si celle-ci ne permet pas de combler ce manque, le bénévole ne sombre pas pour autant dans un néant juridique.

Il dispose en effet d’un statut en adéquation avec la définition précitée. Sa situation se distingue d’une relation de travail puisque n’étant pas salarié, il ne perçoit pas de rémunération et n’est soumis à aucune subordination juridique. Le bénévole intervenant dans un cadre associatif n’exécute donc pas de travail sous l’autorité d’un employeur disposant du pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné [3]. Il reste libre de mettre fin à sa simple participation, le cas échéant, conformément aux statuts de l’association.

Certains groupements peinent à maintenir un nombre suffisant de personnes pour constituer leurs instances dirigeantes. La disponibilité que la fonction induit peut rebuter, toute comme l’importante responsabilité financière encourue. Le législateur tend toutefois à réduire le champ des contraintes.

Une proposition de loi visant à alléger la responsabilité financière des dirigeants associatifs a en effet été adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture le 17 mai 2018 [4]. Cette dernière vise à compléter l’article L. 651-2 du Code de commerce et à étendre « l’exception de négligence » audits dirigeants.

S’il n’est pas certain que cette volonté d‘allégement soit suffisante pour susciter des vocations, l’instauration d’un crédit d’heures défiscalisables semble plus attractif.

Une valorisation fiscale comme source de reconnaissance du statut de bénévole associatif.

La philanthropie du bénévole commande à ce dernier de ne percevoir aucune rémunération. Ce don de soi, librement consenti, se conçoit difficilement hors du cadre de la gratuité. Si certains bénévoles peuvent recevoir sous certaines conditions une rémunération en qualité de dirigeant [5], la plupart se contentent de ne pas entamer leurs richesses.

En effet, les femmes et les hommes qui agissent gratuitement peuvent se faire rembourser les frais engagés pour la structure. Ces dépenses doivent cependant être réelles et justifiées. À défaut, la sanction est celle de la qualification d’avantages en nature emportant requalification des sommes perçues en salaire imposable à l’impôt sur le revenu. Le bénévole garde toutefois la possibilité de s’écarter de ce régime et de préférer celui de la déduction fiscale.

La dépense effectuée personnellement, par celui qui renonce expressément à toute contrepartie, ayant pour caractéristique d’être réelle, justifiée et engagée conformément à l’objet social de la structure à but non lucratif, peut lui permettre de bénéficier de la réduction d’impôt afférente aux dons pour les frais qu’il engage personnellement [6].

La déduction fiscale est alors égale à 66 % des sommes versées, dans la limite de 20 % du revenu imposable. Ces plafonds sont mêmes augmentés si la structure apporte certaines aides gratuites aux personnes en difficulté [7]. Cette mesure étant considérée comme insatisfaisante, le législateur propose de passer un cap par le biais d’une valorisation fiscale.

Une proposition de loi récente vise en effet à mettre en place un crédit d’heures défiscalisables. Elle vise uniquement les bénévoles associatifs disposant de cette qualité depuis plus de 3 ans au sein d’une association ayant plus de 5 ans d’existence. Si cette conditions est remplie, le bénévole pourra prétendre au dispositif s’il effectue au moins 150 heures par an avec un plafond de 300 heures. Ce nombre d’heures sera alors transformé monétairement, avec la prise en compte de 50 % des heures, à un taux horaire égal au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) [8]. La concrétisation d’un tel dispositif serait sans nul doute un atout pour maintenir et attirer des membres actifs, au prix d’une certaine communication des groupements d’accueil.

La valorisation du statut de bénévole est louable lorsque l’on connaît les difficultés rencontrées par certaines associations. Il serait toutefois utopique de penser que seule la loi dispose du pouvoir d’endiguer la pénurie de sociétaires, les dirigeants associatifs ont eux aussi les moyens de récompenser ceux qui s’engagent pour les autres.

Gabin Migliore Avocat en droit du sport et mandataire sportif https://miglioreperrey-avocats.com/

[1Ministère de l’Éducation nationale. Le guide du bénévolat. 2017-2018.

[2Ibid.

[3Cass. soc., 13 novembre 1996, n° 94-13.187.

[4Proposition de loi en faveur de l’engagement associatif, n° 848, déposée le 4 avril 2018.

[5Article 261, 7, 1° d du Code général des impôts.

[6BOI-IR-RICI-250-20.

[7Article 200 du Code général des impôts.

[8Proposition de loi visant à valoriser le statut du bénévole dans les associations, n° 780, déposée le 21 mars 2018.

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