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Un fonctionnaire peut-il être sanctionné pour des faits relevant de sa vie privée ? Par Tom Riou, Avocat.
Parution : vendredi 15 juin 2018
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Lors des conseils de discipline, se pose parfois la question de la qualification, en fautes professionnelles, de faits relevant de la vie privée du fonctionnaire. Une sanction peut-elle être infligée à un fonctionnaire (ou à un agent contractuel) qui a commis des actes répréhensibles, en dehors de son service ?

La réponse est oui.

En effet, l’agent public reste constamment assujetti aux obligations liées à son statut, même dans sa vie privée, de sorte que des faits commis en dehors du service peuvent être considérés comme constitutifs d’une faute disciplinaire et justifier que le fonctionnaire soit sanctionné :
- parce qu’ils sont incompatibles avec l’exercice d’une fonction publique ;
- ou parce qu’ils ont un caractère grave et sont incompatibles avec les fonctions exercées (par exemple, un policier qui, n’étant pas en service, provoque un accident et blesse un autre conducteur alors qu’il circule dans son véhicule personnel en état d’imprégnation alcoolique).

Le fonctionnaire est ainsi tenu, même en dehors de ses horaires de travail, de faire bonne figure étant, aux yeux de tous, le représentant de son administration et, plus largement, du service public dans son ensemble.

Ainsi, le fonctionnaire ou le contractuel de droit public peut être sanctionné lorsque son comportement porte atteinte à la réputation de l’administration.

Cela a, notamment, été le cas s’agissant d’un agent condamné pour avoir blessé par balles un voisin, à la suite d’une altercation. De même, a pu être sanctionné un CRS cohabitant avec une prostituée, ce comportement étant de nature à déconsidérer le corps auquel appartient l’agent.

Le fonctionnaire devra, dès lors, prendre garde à maintenir, en toutes circonstances, un comportement jugé digne du service public qu’il représente.

Ce, non seulement dès le jour où il intègre la fonction publique, mais tout au long de sa vie, une jurisprudence classique considérant que des faits antérieurs au recrutement peuvent donner lieu à sanction, lorsqu’ils ont été tardivement portés à la connaissance de l’autorité disciplinaire.

De même, des faits commis alors que le fonctionnaire est en congé maladie peuvent justifier l’engagement d’une procédure disciplinaire à son encontre.

Ainsi, le fait de participer à une compétition sportive durant un congé maladie, alors que l’arrêt de travail ne comporte aucune autorisation de sorties libres, constitue un manquement à l’obligation de loyauté du fonctionnaire à l’égard de son employeur, qui justifie l’infliction d’une sanction disciplinaire.

S’agissant de la preuve des fautes commises par le fonctionnaire, dans le cadre de sa vie privée, il convient de noter que, dans le respect du principe de loyauté, l’administration employeur peut recourir à une agence de détectives privés, afin d’apporter la preuve de faits commis en dehors du service par un de ses agents.

L’administration peut, également, se fonder sur des propos tenus sur une page Facebook, dès lors qu’ils n’ont pas été tenus à l’occasion d’une correspondance privée, mais dans le cadre d’une discussion susceptible d’être lue par l’ensemble du réseau de connaissances du fonctionnaire et par toutes les personnes ayant accès à sa page Facebook .

Tom Riou, Avocat au Barreau de Paris tomriou.avocat@gmail.com [->https://www.tomriou-avocat.com/]
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