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Eurojuris France : après l’information, la concrétisation.
Parution : vendredi 29 juin 2018
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Lors de son premier mandat, Sophie Clanchet et son équipe ont pris à bras le corps, au sein d’Eurojuris France, la question du digital. Le réseau pluriprofessionnel a ainsi multiplié les actions pour informer et sensibiliser ses membres – avocats et huissiers – sur les enjeux et les opportunités de la transition numérique.
Suite à sa réélection en tant que présidente du réseau, Sophie Clanchet souhaite passer un nouveau cap : après avoir été observateurs, le réseau et ses membres doivent devenir acteurs sur ce marché de l’innovation. Alors qu’Eurojuris sera présent au prochain Village de la Legaltech, elle a accepté de nous en dire plus sur les nouvelles perspectives d’évolution.

Clarisse Andry : Vous venez d’être réélue présidente d’Eurojuris France. Quels sont vos objectifs pour ce nouveau mandat ?

Sophie Clanchet : Mon ambition est de confirmer les axes de travail mis en place dans le cadre de mon précédent mandat. L’équipe sortante et moi-même avions décidé d’amener nos avocats à la transition digitale, de démontrer que les avocats pouvaient être innovants, et que nous étions également un réseau innovant.

Nous avons créé des services et des aides destinés aux membres dans le cadre du développement de leur cabinet, en termes de communication, de formation en management, de veille technologique… L’idée est de continuer à les mener à bien et de les développer, pour qu’à la fin de ce second mandat, le prochain président puisse avoir d’autres projets, peut-être plus innovants encore, ou d’autres pistes à explorer.

"Nous avons toujours des réflexions sur l’interprofessionnalité".

Nous avons toujours des réflexions sur l’interprofessionnalité. Nous sommes un réseau pluriprofessionnel et avons développé nos relations de partenariat par la mise en place, sur la plateforme Eurojuris, d’un lien direct entre les avocats et les huissiers. Nous avons toujours notre groupe de travail qui collabore avec un réseau d’experts comptables sur la création d’outils communs, afin d’accompagner notre clientèle d’entreprises. Et nous accompagnons concrètement la pluriprofessionnalité dans notre réseau : aujourd’hui des cabinets d’avocats et des études d’huissiers sautent le pas pour s’installer ensemble ou créer des produits ensemble, et nous les aidons dans leur réflexion sur les meilleures structures à adopter et sur les meilleures façons de pouvoir coordonner ce rapprochement.

Comment votre réseau prend-il en compte l’impact du numérique sur les métiers du droit ?

Nous l’avons pris en compte depuis mon premier mandat, puisque notre première mission était justement d’accompagner nos membres dans le cadre de la transition numérique. Le congrès anniversaire de 2017, à Versailles, a d’ailleurs été extrêmement pédagogique. Aujourd’hui, les membres du réseau, que ce soit les avocats ou les huissiers, ont tout à fait conscience que nous sommes dans une période inédite, où l’innovation est au cœur de nos réflexions, qu’il faut que nous saisissions les opportunités qu’elle nous offre. Nous voulons faire passer ce message : maintenant que vous êtes informés, il faut aller au delà et concrétiser cette transition digitale, mais de façon créative et propre à chacune de vos structures. Car, comme nous avons des structures très différentes, ce qui est pertinent dans l’une ne le sera pas nécessairement dans l’autre.

Avez-vous de nouveaux projets en cours ?

Nous avons créé le Lab, d’abord pour qu’il ait une fonction de veille technologique au profit des membres. Nous avons reçu des entreprises qui nous semblaient avoir des solutions à prendre en compte, nous avons discuté automatisation, cybersécurité, intelligence artificielle, moteur de recherche intelligent, et conclu des partenariats avec des start-ups de la legaltech, soit qui répondent à des demandes clients, soit qui offrent aussi des services à nos membres.

"Le Lab va devenir une société commerciale à part entière."

Nous franchissons cette année un cap, puisque le Lab va devenir une société commerciale à part entière. Nous avons envie de nous donner les moyens d’accompagner nos projets d’innovation, d’investissements, d’incubations, de soutenir des projets développés par les tiers, et nous avons des projets aussi pour nos cabinets. Lors du dernier congrès, nous avons organisé un hackathon destiné à nos membres, et deux beaux projets en sont sortis : un à destination des études d’huissiers et l’autre à destination des cabinets d’avocats. Ils ont ainsi prouvé qu’il ne faut pas nécessairement être start-upper pour concevoir des produits et des solutions à destination des clients.
Nous avons aussi beaucoup travaillé à l’arrivée du RGPD.
Nos membres ont été formés pour qu’ils soient conformes au RGPD au 25 mai, ils ont pris ça très au sérieux, et des cabinets ont mis en place un véritable accompagnement client sur la problématique, très tôt et avec aussi des produits à destination client et qui bénéficient au réseau.

Nous avons également décidé de soutenir le Digital Law Moot Court, le concours de plaidoirie du droit du numérique. Ce n’est pas seulement un sponsorship, car nous avons offert au meilleur plaideur un stage dans l’un des plus prestigieux cabinets du réseau. C’est donc un vrai engagement d’Eurojuris en faveur du monde étudiant. Nous avons également participé au jury du Lab EFB, parce que nous estimons qu’Eurojuris et ses cabinets sont habilités à aider et à participer aux programmes d’enseignement innovants sur les transformations digitales. En retour, nous recevons cette richesse qui vient des jeunes professionnels et de leur vision innovante de la profession dans les années à venir.

Vous participez au Village de la Legaltech [1] qui se tiendra en novembre prochain : pourquoi avoir choisi de rejoindre cette manifestation ?

Jusqu’à présent, nous avons été associés à de nombreuses manifestations, comme VendômeTech, Electrochoc numérique ou Open Law, où l’on nous demandait un éclairage de réseau expert. Aujourd’hui, nous voulons aussi être acteurs, et plus seulement spectateurs, consultants, ou bêta-testeurs. Le réseau a un rôle à jouer dans le cadre de l’innovation, et comme nous sommes partenaires du Village de la Justice de longue date, cela nous a semblé logique de participer au Village de la Legaltech, pour montrer que les cabinets d’avocats et les études d’huissiers peuvent avoir des solutions innovantes à présenter.

Dans le cadre des démarches du réseau, nous avons les mêmes réflexions que d’autres regroupements d’avocats ou cabinets d’avocats. Nous avons regardé autour de nous, appréhendé les évolutions du marché, et nous pensons que nous pouvons aussi imaginer de vraies avancées pour nos clients.

"Nous nous sommes aussi rendus compte que nous étions nécessaires aux acteurs de la legaltech..."

Nous nous sommes aussi rendus compte que nous étions nécessaires aux acteurs de la legaltech et à la conception ou l’amélioration de ce qu’ils proposaient. Je suis contente de voir toute cette émulation qui se fait aujourd’hui.

Notre métier se transforme, et ce qui est satisfaisant, c’est que les avocats, qui avaient peur, ont su se ressaisir très rapidement et prendre le train de l’innovation.

Propos recueillis par Clarisse Andry Rédaction du Village de la Justice