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Année lombarde, panorama des cours d’appel au 1er semestre 2018. Par Jean-Simon Manoukian, Avocat.
Parution : mardi 24 juillet 2018
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La tendance générale est à la nécessaire démonstration mathématique du préjudice subi par l’emprunteur.
La Cour d’appel de Bordeaux semble amalgamer l’année lombarde au TEG. Les Cours d’appel de Colmar et Lyon se singularisent par une jurisprudence favorable aux banques et juridiquement critiquable en matière d’intérêts intercalaires. Les Cours d’appel de Reims et Riom privilégient le droit sur le chiffre. La motivation de Riom, exemplaire, est ici reproduite dans sa quasi intégralité.

Aix-en-Provence [1] : TGI Aix-en-Provence, Digne-les-bains, Draguignan, Grasse, Marseille, Nice, Tarascon, Toulon.

La clause 30/360 est sans incidence sur le montant des intérêts inclus dans une mensualité "pleine", mais augmente la charge des intérêts pour les mensualités "incomplètes" ou "brisées" qui doivent être calculés selon le nombre de jours pendant lesquels les fonds sont à la disposition de l’emprunteur.
Il appartient à l’emprunteur de démontrer le préjudice qu’il subit par le calcul d’une échéance brisée en année lombarde, faute de quoi il doit être débouté de son action en nullité.

Bordeaux [2] : TGI Bordeaux, Angoulême, Bergerac, Libourne, Périgueux.

L’emprunteur doit démontrer par un calcul vérifiable l’utilisation de l’année lombarde dans le calcul d’intérêts et préciser quelle en est l’incidence sur le TEG.

Colmar [3] : TGI Colmar, Mulhouse, Saverne, Strasbourg.

L’emprunteur doit établir que la banque a calculé les intérêts sur la base d’une année lombarde, ce qui ne se déduit pas de la clause 30/360.
Le calcul d’intérêts intercalaires selon la méthode lombarde ne donne pas lieu à nullité de la stipulation d’intérêt mais à remboursement du surcoût d’intérêts.

Douai [4] : TGI Arras, Avesne-sur-Helpe, Béthune, Boulogne-sur-mer, Cambrai, Douai, Dunkerke, Lille, Saint-Omer, Valenciennes.

Le calcul de la part d’intérêt de la première mensualité selon la méthode lombarde constitue une majoration dissimulée du montant des intérêts qui a nécessairement une incidence sur le montant des intérêts calculés pour les échéances postérieures en ce qu’elle se répercute sur le calcul de la part d’amortissement du crédit à chaque échéance.
La preuve est ainsi rapportée que le taux d’intérêt conventionnel mentionné dans l’offre n’a pas été effectivement appliqué par la banque de sorte que le taux réel de l’intérêt était supérieur à celui mentionné dans l’offre de prêt, il y a lieu de considérer que la banque a enfreint les exigences légales relatives à l’indication préalable et par écrit du taux conventionnel et de prononcer la nullité de la stipulation conventionnelle d’intérêts mentionnée dans le contrat de prêt, laquelle appelle la substitution du taux légal au taux conventionnel à compter de la date du prêt et selon le taux légal en vigueur à cette date.

Lyon [5] : TGI Lyon, Villefranche-sur-Saône, Roanne, Saint-Étienne, Bourg-en-Bresse.

Les intérêts intercalaires des échéances rompues doivent être calculés en jours et, selon l’usage interbancaire, avec application d’un taux d’intérêt quotidien égal au taux d’intérêt annuel divisé par 360.
La clause prévoyant de telles modalités de calcul qui ont sur le taux nominal et sur le TEG une incidence inférieure à 0,1 % est légale.
La facturation d’intérêts intercalaires sur la base de 360 jours consécutivement à la modification de la date d’échéance ne saurait faire la preuve de l’existence d’une clause relative au mode de calcul des intérêts journaliers sur une année de 360 jours.

Paris [6] : TGI Auxerre, Bobigny, Creteil, Evry, Fontainebleau, Meaux, Melun, Paris, Sens.

Une demande d’expertise judiciaire ne peut prospérer que si elle repose sur une démonstration, la simple affirmation d’un calcul en année lombarde ne suffit pas.

Poitiers [7] : TGI La Roche Sur Yon, La Rochelle, Les Sables d’Olonne, Niort, Poitiers, Saintes.

La clause 30/360 ne suffit pas à établir que les intérêts conventionnels ont été calculés sur la base erronée d’une année de 360 jours.
Il appartient à l’emprunteur qui allègue une erreur dans le calcul du taux d’intérêt conventionnel ou dans le taux effectif global mentionné dans l’offre ou l’acte de prêt d’en rapporter la preuve.

Reims [8] : TGI Reims, Chalons-en-Champagne, Charleville-Mézières, Troyes.

la contestation de la méthode de calcul des intérêts conventionnels ne porte pas sur le calcul du taux effectif global.
La clause de calcul des intérêts intercalaires sur une base annuelle de 360 jours révèle que le taux d’intérêt na pas été calculé sur la base d’une année civile de 365 ou 366 jours, ce qui a pour effet d’entraîner la nullité de la stipulation de l’intérêt nominal et la substitution du taux légal au taux conventionnel initialement prévu.

Riom [9] : TGI Aurillac, Clermont-Ferrand, Cusset, Montluçon, Moulins, Le Puy-en-Velay.

La violation du principe selon lequel le taux d’intérêt conventionnel doit être calculé par référence à l’année civile de 365 ou 366 jours et non par référence à l’année bancaire de 360 jours, entraîne la nullité de la clause d’intérêt, peu important que les mensualités prévues au tableau d’amortissement soient conformes au taux stipulé.

L’emprunteur doit recevoir une information lui permettant de comprendre et comparer les coûts qu’il devra supporter sans faire appel à des usages et des notions réservées aux professionnels du crédit.

Les conditions générales de ces deux contrats stipulent que ’les intérêts seront calculés sur le montant du capital restant dû, au taux fixé aux Conditions Particulières sur la base d’une année bancaire de 360 jours, d’un semestre de 180 jours, d’un trimestre de 90 jours et d’un mois de 30 jours.

Cette clause fait entrer dans le champ contractuel l’utilisation de l’année dite lombarde, c’est-à-dire d’une année théorique de 360 jours en vue du calcul des intérêts conventionnels.

La stipulation concernant le taux conventionnel visant une période de 360 jours se trouve frappée de nullité, emportant substitution de l’intérêt général, dès lors qu’en présence d’une telle clause, aucun taux d’intérêt n’a été valablement stipulé, l’emprunteur n’ayant pas été en mesure au moment de la conclusion du contrat d’évaluer le surcoût susceptible d’en résulter.

L’emprunteur n’a aucune démonstration mathématique à produire dans cette hypothèse, car la seule stipulation d’une clause prévoyant le calcul des intérêts sur la base d’une année de 360 jours est sanctionnée par la nullité de la stipulation de l’intérêt nominal et sa substitution par le taux légal.

S’agissant de l’avenant au contrat de prêt, il est précisé que le contrat n’entraîne pas novation au contrat principal, que toutes les autres clauses et conditions contenues dans l’acte sont maintenues.
Aussi, a été maintenue dans les conditions financières de l’avenant, l’application de la clause litigieuse calculant les intérêts sur 360 jours.
Le calcul des intérêts sur 360 jours n’a pas été remplacé par un autre mode de calcul des intérêts. Il ne peut être considéré que l’avenant a produit un effet novatoire et a purgé les vices du contrat de prêt initial.

La sanction du calcul des intérêts conventionnels sur la base de l’année lombarde de 360 jours est la nullité de la stipulation relative aux intérêts conventionnels, et par voie de conséquence, la substitution du taux légal au taux conventionnel du prêt.

Le prononcé de la nullité de la clause n’a pas à prendre en compte le préjudice subi par l’emprunteur car il ne s’agit pas d’une question de responsabilité contractuelle, mais de l’annulation d’une clause irrégulière : L’emprunteur n’a pas à rapporter la preuve d’un quelconque préjudice. C’est en effet la formation du contrat et non pas son exécution qui est en cause.

Jean-Simon Manoukian, avocat au barreau de Nantes, [->http://teg-taeg-jsmanoukian.com]

[122 mars 2018 RG 16/17282, 17 mai 2018 RG 16/22364 et 17/02660, 31 mai 2018 RG 16/12630

[28 février 2018 RG 16/06439

[318 avril 2018 RG 16/03526, 23 mai 2018 RG 16/04231

[425 janvier 2018 RG 16/04042

[53 mai 2018 RG 16/02202, 15 mai 2018 RG 17/02040, 3 juillet 2018 RG 17/03740

[617 mai 2018 RG 17/03941

[719 juin 2018 RG 17/01710

[810 juillet 2018 RG 17/01977

[94 avril 2018 RG 17/00048

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