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Le defaut d’information du chirurgien esthétique, par Agathe Euvrard
Parution : lundi 26 novembre 2007
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Le Tribunal de Grande Instance de PARIS a fait droit à nos demandes en condamnant, par jugement du 17 septembre 2007 à présent définitif, un médecin ayant réalisé une opération de chirurgie esthétique du nez, sans informer sa patiente des risques de l’intervention (I), ni des photos de celle-ci publiées sur Internet (II)

A l’origine des faits, une femme de 38 ans avait fait appel à un chirurgien esthétique pour une rhinoplastie.

Compte tenu du résultat obtenu et des difficultés respiratoires engendrées, ce même médecin avait ensuite procédé à une reprise chirurgicale dont le résultat n’avait pas été davantage satisfaisant, conduisant la patiente à subir une troisième puis une quatrième opération.

I/ Sur le devoir d’information du praticien assigné, le tribunal rappelle que le contrat médical met à sa charge : "l’obligation de dispenser au patient une information claire, loyale et adaptée sur la nature de l’acte médical ou chirurgical proposé, ses conséquences et ses risques, et ce, afin de permettre à ce dernier d’y consentir en toute connaissance de cause".

Faute d’établir une information claire sur les imperfections qui peuvent résulter de ce type de chirurgie et l’éventualité de reprises chirurgicales, le juge considère que le médecin a manqué à son devoir d’information.

Quant au formulaire dit "de consentement éclairé" produit par la défense, en l’absence de signature de la patiente, il ne suffit pas à rapporter la preuve de l’information.

Le manquement à cette obligation engage la responsabilité du praticien dès lors qu’il : "en résulte pour le patient un préjudice direct et certain, lequel s’analyse en une perte de chance de refuser l’intervention, et donc, d’éviter le risque survenu".

En l’espèce, la perte de chance de renoncer à l’intervention est évaluée à 30%, en prenant en compte la motivation de la patiente pour subir l’intervention mais également son âge ainsi que sa situation personnelle et familiale.

Le médecin est donc déclaré responsable des conséquences dommageables du défaut d’information et condamné in solidum avec son assureur à réparer les préjudices subis par sa patiente dans la proportion précitée.

II/ Le tribunal retient ensuite qu’en ayant publié sur son site Internet des photos du profil de sa patiente sous une rubrique intitulée "chirurgie du nez- cas clinique", une telle publication s’apparente à une opération publicitaire qu’elle n’a pas acceptée, lui ouvrant droit également à réparation. Le médecin est ainsi condamné à lui verser la somme de 1 000 € pour atteinte à son droit à l’image.

Cette décision rappelle avec force le devoir d’information du médecin et l’importance primordiale de la confiance qui doit l’unir à son patient, plus particulièrement en matière de chirurgie esthétique.

Agathe EUVRARD

Avocat à la Cour

agathe.euvrard chez gfe-avocats.com

GARLIN-FERRARD & EUVRARD AVOCATS