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Le e-sport, de sa définition à ses évolutions. Par Charlotte Caron.
Parution : mardi 30 octobre 2018
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Avec plus de 3,8 millions d’adeptes en France, le e-sport désigne « l’ensemble des pratiques compétitives ayant pour moyen de confrontation [...] un support numérique, et en l’occurrence un jeu vidéo ».

Ne répondant pas à la qualification d’activité sportive, il a fallu attendre l’entrée en vigueur de la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 pour que le e-sport soit officiellement reconnu et encadré juridiquement.

A l’approche des Jeux de Paris pour 2024 et du débat de son éventuelle intégration aux Jeux Olympiques, sa qualification juridique ne semble cependant pas avoir fini de faire débat.

Phénomène mondial pratiqué par des millions de joueurs, le sport électronique, ou « e-sport » en anglais, désigne « l’ensemble des pratiques compétitives ayant pour moyen de confrontation [...] un support numérique, et en l’occurrence un jeu vidéo » [1].
En d’autres termes, il s’agit des compétitions de jeux vidéo qui confrontent au moins deux joueurs ou équipes de joueurs pour un score ou une victoire [2].

D’après une étude réalisée par le centre d’analyse et de recherche sur les jeux vidéo NewZoo, le nombre de téléspectateurs de e-sport était de 200 millions en 2017. Cet engouement se remarque surtout chez les Millenials comprenant les jeunes nés dans les années 80 et 90. En France, cette pratique rassemble plus de 850.000 joueurs et 4 millions de téléspectateurs [3].

L’hexagone occupe en effet une place importante dans le marché du e-sport. C’est ainsi à Paris qu’est organisée chaque année l’"eSports World Convention" (ESWC) où des joueurs venus des quatre coins du monde s’affrontent pendant plusieurs jours pour devenir champion du monde de leur discipline. La dernière rencontre a d’ailleurs eu lieu au Parc des Expositions de la Porte de Versailles du 26 au 30 octobre 2018 [4].

Les compétitions de e-sport ont pourtant longtemps évolué dans un contexte d’insécurité juridique.

Si le titre de la discipline nous incite à procéder à une assimilation de cette pratique avec le sport traditionnel, il n’est cependant pas aisé d’appréhender l’e-sport sous l’angle de la notion juridique de sport [5].

En effet, l’article 2 de la Charte européenne du sport du 24 septembre 1992 définit le sport comme « toutes formes d’activités physiques qui, à travers une participation organisée ou non, ont pour objectif l’expression ou l’amélioration de la condition physique et psychique, le développement des relations sociales ou l’obtention de résultats en compétition de tous niveaux ». [6]

Or, l’absence de « réelle » performance physique de la part des joueurs semble notamment avoir conduit à exclure le e-sport de la qualification de sport [7].

La Fédération Française des Jeux Vidéo en Réseau (FFJVR) s’est ainsi vue refuser l’agrément délivré par le ministre chargé des sports en 2007 au motif que la pratique du jeu vidéo ne pouvait être qualifiée d’activité « physique et sportive » en ce que les efforts mis en œuvre ne tendent pas à la performance physique [8].

Ne répondant pas à la qualification d’activité sportive, les compétitions de e-sport étaient alors associées au régime des loteries et frappées en conséquence de l’interdiction des loteries physiques.

Il a fallu attendre l’entrée en vigueur de la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016 pour que le e-sport soit officiellement reconnu et encadré juridiquement.

Les articles 101 et 102 de la loi sont ainsi venus poser le cadre légal des compétitions de e-sport.

Elles bénéficient désormais d’un statut spécifique d’autorisation. Par exemple, les frais de participation des joueurs doivent rester d’une importance limitée par rapport aux coûts d’organisation.

Les mineurs sont également mieux protégés dans la mesure où une autorisation parentale est dorénavant requise pour les mineurs participant aux rencontres. De plus, les gains qu’ils réalisent doivent être déposés jusqu’à leur majorité sur des comptes bloqués, gérés par la Caisse des dépôts et des consignations.

Les joueurs professionnels doivent enfin conclure un contrat à durée déterminée spécifique qui leur permet notamment de bénéficier d’une protection sociale.

Cette évolution législative était très attendue par le milieu du e-sport qui attire de plus en plus l’attention des sponsors et des chaînes de télévision qui y voient le moyen d’attirer un jeune public qui leur échappe [9].

L’engouement pour le e-sport ne semble pas prêt de s’arrêter. En témoigne le forum sur le e-sport s’étant tenu le 21 juillet dernier par le Comité International Olympique (CIO) et l’association mondiale des fédérations internationales de sports (GAISF) sur l’éventuelle intégration de cette discipline aux Jeux Olympiques à l’approche des Jeux de Paris pour 2024.

Charlotte Caron, Titulaire du CAPA.

[1Syndicat des éditeurs de loisirs (SELL), L’essentiel du jeu vidéo, Marché, consommation, usages, février 2016, p. 31.

[2Article 101 de la loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique.

[5Hasna Louze, La retransmission télévisée de compétitions de e-sport, 2016.

[6Charte européenne du sport adoptée le 24 septembre 1992 par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe.

[8Ministère de la santé, de la jeunesse et des ports, Direction des Sports, Décision de refus d’agrément, 24 août 2007.

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