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La succession de Johnny Hallyday : ce qui devrait être décidé en mars 2019 par le tribunal de Nanterre. Par Noémie Houchet-Tran, Avocat.
Parution : mardi 27 novembre 2018
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Le 22 novembre 2018, le tribunal de Nanterre devait statuer sur la compétence des juridictions françaises pour régler la succession de Johnny Hallyday.

Deux audiences concernant la succession de Johnny Hallyday seront encore présentes au rôle du tribunal de Nanterre.

L’une concerne la compétence des juridictions françaises, l’autre le gel des royalties.

Le 22 novembre 2018, le tribunal de Nanterre devait statuer sur la compétence des juridictions françaises pour régler la succession de Johnny Hallyday.

L’audience aurait été repoussée en mars 2019 afin de permettre aux enfants du chanteur d’assigner le trustee en charge de gérer le patrimoine.

Cette mise en cause du gestionnaire du trust est un préalable indispensable pour que la future décision lui soit opposable.

Le juge devra appliquer les nouvelles règles édictées dans le Règlement européen n° 650/2012 applicable à toutes les successions ouvertes à partir 17 août 2015. Ce règlement européen a une vocation universelle, ce qui signifie qu’il est applicable même si litige intéresse un pays tiers, ici les États-Unis et plus précisément la Californie.

L’article 4 du règlement nous indique que la juridiction compétente est celle de la résidence habituelle du défunt, ce qui mènerait le tribunal à faire une analyse de fond pour déterminer le lieu où Johnny Hallyday avait sa résidence habituelle au moment de son décès, avec bien entendu à la clé des conséquences fiscales.

Bien heureusement, l’article 10 de même règlement permet également de saisir la juridiction du pays dont le défunt a la nationalité.

La France pourrait donc bien retenir sa compétence sur cet article.

Toutefois, il est fort probable pour Laetitia ou le trustee invoquent avec succès l’article 12 du règlement permettant de limiter la compétence du juge français aux seuls biens présents sur le territoire français : "lorsque la masse successorale comprend des biens situés dans un État tiers, la juridiction saisie pour statuer sur la succession peut, à la demande d’une des parties, décider de ne pas statuer sur l’un ou plusieurs de ces biens si l’on peut s’attendre à ce que la décision qu’elle rendrait sur les biens en question ne soit pas reconnue ou, le cas échéant, ne soit pas déclarée exécutoire dans ledit État tiers".

Pour convaincre le tribunal de Nanterre d’épargner tous les biens américains de leur analyse, Laetitia ou le trustee devront donc persuader les magistrats que leur future décision ne sera pas appliquée par la Californie. Ils devront donc pour cela faire une démonstration fondée sur le droit international privé californien et plus précisément sur leurs règles de reconnaissance des décisions étrangères. Pour l’essentiel, il s’agira d’étendre les règles de reconnaissances de décisions inter-états, les États-Unis comptant en effet 50 États et 50 législations différentes.

Le plus prudent pour Laura et David sera donc d’épargner le plus possible de biens ou d’avoirs du joug du trust car une fois transférés, ils ne sont pas certains d’en voir la couleur et ce même si leur action s’avérait victorieuse.

Tandis qu’une audience est prévue en janvier 2019 à Los Angeles pour transférer bon nombre de biens subsistants dans le trust, le tribunal de Nanterre devra donc également statuer dès le 27 novembre 2018 pour geler les royalties versées par les trois maisons de disques Sony, Universal et Warner. Sans présager de la décision au fond, les juges du référé de Nanterre vont donc certainement faire droit à cette demande.

Voilà donc le programme à venir de cette succession passionnante.

Noémie HOUCHET-TRAN Avocat au Barreau de Paris nhtavocat.com Spécialiste en Droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine Droit international de la famille