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Le Casseur, l’assurance et l’assuré… Par Michel Benezra, Avocat.
Parution : vendredi 7 décembre 2018
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Beaucoup d’articles de journaux circulent sur internet indiquant de ne pas s’inquiéter des dégâts causés aux biens par les casseurs et dans notre cas, pour les voitures incendiées… Vrai ou Faux ?
Est-ce que votre assurance de véhicule va prendre en charge les dégâts occasionnés ? Est-ce qu’au moins, l’Etat, en cas de carence de mon assurance, pourra intervenir pour m’indemniser ?

La Mairie de Paris chiffre les dégâts en millions d’euros et les particuliers qui avaient alors, par obligation ou par inadvertance, garé leurs véhicules dans la rue, commencent à recevoir des refus d’indemnisation de leurs assurances.
Comment ? Les assureurs n’assureraient alors pas ce type de dommages ?
En réalité, la situation ne relevant pas d’une catastrophe « naturelle » il n’y a aucun automatisme et c’est votre contrat d’assurance qui va s’appliquer ou, à défaut, il faudra introduire des voie de recours dont l’issue restera incertaine.

1°) Le contrat d’assurance.

Assurance au tiers « classique »
Voilà alors encore les plus démunis qui vont souffrir encore plus : le contrat d’assurance au tiers ne comprend pas l’indemnisation de ce sinistre particulier, sans tiers identifié.

Assurance au tiers « plus »
Ce contrat prévoit parfois l’indemnisation des incendies de véhicules. Néanmoins, comme tous les contrats d’assurance, il faut lire entre les petites lignes et vérifier si la prise en charge comprends aussi les incendies volontaires (non accidentels).

Assurance « tous risques »
C’est le nec plus ultra, la Rolls des contrats… pas si sûr ! En effet, ici encore, il va falloir vérifier si l’incendie volontaire est pris en charge mais également vérifier si une clause particulière n’a pas été insérée par votre assureur consistant à exclure de la garantie les incendies apparus alors que le véhicule n’était pas en mouvement. Oui vous avez bien lu, si votre véhicule était à l’arrêt et qu’il a pris feu, en présence d’une telle clause, vous n’obtiendrez rien sauf à démontrer que le casseur a décidé d’aller faire un tour avec votre véhicule tout en y mettant le feu.
En revanche, votre assurance de véhicules « tous risques » devrait prendre en charge l’intégralité des dommages (bosses, vitres cassées…) occasionnés à votre véhicule.

2°) Les tribunaux.

Une possibilité comme une autre, si les casseurs ont été interpellés ils devraient être jugés devant le tribunal correctionnel.
A ce titre, vous pourrez alors vous constituer partie civile à ce procès c’est à dire solliciter des dommages et intérêts (même une expertise) liés à la perte financière due aux dommages sur votre véhicule, surtout si ce dernier était déclaré en procédure VGE / VI.
Il faudra alors déposer plainte au commissariat, et vous présenter le jour de l’audience avec tous les justificatifs utiles pour rapporter la preuve de votre préjudice (photos des dommages ; témoignages …).

3°) L’Etat.

Une possibilité d’agir aussi directement contre l’Etat pour obtenir l’indemnisation des dégradations de votre véhicule pendant les violences urbaines. Vous pourrez fonder votre action sur le fondement de l’article L. 211-10 du Code de la Sécurité intérieure (anciennement L. 2216-3 du Code général des collectivités territoriales) qui institue une responsabilité sans faute de l’Etat pour les dommages causés par des attroupements ou rassemblements (violences urbaines).
Le tribunal administratif est compétent et c’est ce dernier qu’il faudra saisir dans ce cas particulier. C’est le juge administratif qui devra se prononcer sur l’application du texte et vérifier si les conditions d’application sont bien réunies (violences urbaines caractérisées ?).

4°) La CIVI.

La CIVI (Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions) est compétente pour examiner les demandes d’indemnisation de victimes de dommages corporels ou matériels résultant d’une infraction.

La procédure devant la CIVI est autonome vis à vis des procédures devant les juridictions pénales et peut être alors saisie même en l’absence de jugement ou d’arrêt émanant d’une juridiction pénale, par exemple si l’auteur des faits n’a jamais pu être identifié.
Vous disposez de trois ans pour saisir la CIVI à compter de la date de commission des faits, ou d’un an à compter de la décision pénale définitive.

En cas de dégradation importante de votre véhicule (article 706-14 du code de procédure pénale : vol, escroquerie, abus de confiance, extorsion de fonds, destructions-dégradations-détériorations d’un bien…) votre indemnisation est soumise à des conditions de ressources strictes :
- Vos ressources doivent être inférieures à 2.117 euros (+ 169 euros par personne supplémentaire à charge) ;
- Vous ne devez pas être indemnisées par d’autres organismes (assurances de véhicules) ;
- Votre véhicule qui a été incendié devait être en règle au regard du code de la route et des assurances (certificat d’immatriculation en vigueur, contrôle technique et assurance…) ;

A préciser que l’’indemnisation ne pourra excéder la somme de 4.234,50 euros

Michel Benezra, BENEZRA AVOCATS Droit Pénal Routier & infractions routières Droit des victimes de la route & réparation des préjudices corporels Droit des Assurances de véhicules & litiges liés à l\'indemnisation https://www.benezra.fr