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La prime "Gilets Jaunes" entre en vigueur. Par Xavier Berjot, Avocat.
Parution : jeudi 27 décembre 2018
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Le lundi 10 décembre 2018, le Président Emmanuel Macron a annoncé - notamment - la possibilité, aux entreprises, de verser à leurs salariés une prime de 1.000 € exonérée de cotisations et d’impôt sur le revenu. La loi "portant mesures d’urgence économiques et sociales" (ci-après "la Loi") vient d’être publiée au JO du 26 décembre 2018. [1]

1/ Contenu.

La Loi prévoit donc la possibilité, pour les entreprises, de verser une prime défiscalisée et exonérée de charges sociales, pouvant aller jusqu’à 1.000 € maximum.

Article 1 de la Loi : « I. - Bénéficie de l’exonération prévue au IV la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat respectant les conditions prévues aux II et III qui est attribuée à leurs salariés par les employeurs soumis à l’obligation prévue à l’article L. 5422-13 du code du travail ou relevant des 3° à 6° de l’article L. 5424-1 du même code.
Cette prime peut être attribuée par l’employeur à l’ensemble des salariés ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond.
II. - Pour les salariés ayant perçu en 2018 une rémunération inférieure à trois fois la valeur annuelle du salaire minimum de croissance calculée pour un an sur la base de la durée légale du travail, la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat bénéficie de l’exonération prévue au IV, dans la limite de 1 000 € par bénéficiaire, lorsqu’elle satisfait les conditions suivantes :
1° Elle bénéficie aux salariés liés par un contrat de travail au 31 décembre 2018 ou à la date de versement, si celle-ci est antérieure ;
2° Son montant peut être modulé selon les bénéficiaires en fonction de critères tels que la rémunération, le niveau de classifications ou la durée de présence effective pendant l’année 2018 ou la durée de travail prévue au contrat de travail mentionnées à la dernière phrase du deuxième alinéa du III de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Les congés prévus au chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail sont assimilés à des périodes de présence effective ;
3° Son versement est réalisé entre le 11 décembre 2018 et le 31 mars 2019 ;
4° Elle ne peut se substituer à des augmentations de rémunération ni à des primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur dans l’entreprise. Elle ne peut non plus se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, versés par l’employeur ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales, contractuelles ou d’usage.
III. - Le montant de la prime ainsi que, le cas échéant, le plafond mentionné au second alinéa du I et la modulation de son niveau entre les bénéficiaires dans les conditions prévues au 2° du II font l’objet d’un accord d’entreprise ou de groupe conclu selon les modalités énumérées à l’article L. 3312-5 du code du travail. Toutefois, ces modalités peuvent être arrêtées au plus tard le 31 janvier 2019 par décision unilatérale du chef d’entreprise. En cas de décision unilatérale, l’employeur en informe, au plus tard le 31 mars 2019, le comité social et économique, le comité d’entreprise, les délégués du personnel ou la délégation unique du personnel, s’ils existent.
IV. - La prime attribuée dans les conditions prévues aux I à III est exonérée d’impôt sur le revenu, de toutes les cotisations et contributions sociales d’origine légale ou conventionnelle ainsi que des participations, taxes et contributions prévues aux articles 235 bis, 1599 ter A et 1609 quinvicies du code général des impôts ainsi qu’aux articles L. 6131-1, L. 6331-2, L. 6331-9 et L. 6322-37 du code du travail dans leur rédaction en vigueur à la date de son versement. Elle est exclue des ressources prises en compte pour le calcul de la prime d’activité mentionnée à l’article L. 841-1 du code de la sécurité sociale.
V. - Pour l’application du présent article à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, les références au code de la sécurité sociale sont remplacées par les références aux dispositions applicables localement ayant le même objet. »

La Loi prévoit que la prime peut être attribuée « à l’ensemble des salariés ou à ceux dont la rémunération est inférieure à un plafond. »

Ceci étant, pour bénéficier du régime d’exonération, la prime doit être versée, dans la limite de 1.000 € par bénéficiaire, aux salariés ayant perçu en 2018, une rémunération inférieure à 3 fois la valeur du SMIC annuel déterminé sur la base de la durée légale (soit 3*1.820 h *9,88 €= 53.944,80 € bruts / an, soit 4.495,40 € bruts par mois.)

2/ Conditions.

Pour bénéficier du régime de faveur, la prime doit répondre aux conditions cumulatives suivantes :
- Les salariés considérés doivent être titulaires d’un contrat de travail en cours au 31 décembre 2018 ou à la date de versement, si celle-ci est antérieure ;
- Le versement de la prime doit être réalisé entre le 11 décembre 2018 et le 31 mars 2019 ;
- Celle-ci ne peut se substituer à des augmentations de rémunération ni à des primes prévues par un accord salarial, le contrat de travail ou les usages en vigueur dans l’entreprise ;
- De même, elle ne peut remplacer aucun des éléments de rémunération, versés par l’employeur ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales, contractuelles ou d’usage.

3/ Précisions.

- Le versement de la prime est facultatif ;
- Le montant de la prime peut varier selon les bénéficiaires selon des critères tels que la rémunération, les classifications, la durée de présence effective pendant l’année 2018 ou la durée de travail prévue au contrat de travail (les congés payés étant assimilés à des périodes de présence effective) ;
- La prime n’ouvre droit à aucun avantage supplémentaire pour le salarié (ex. points de retraite complémentaire).

4/ Modalités de mise en place.

Le montant de la prime ainsi que, le cas échéant, son plafond d’attribution et la modulation de son niveau entre les bénéficiaires doivent en principe faire l’objet d’un accord d’entreprise (ou de groupe).

Toutefois, les modalités susvisées peuvent être arrêtées au plus tard le 31 janvier 2019 par décision unilatérale du chef d’entreprise.

En cas de décision unilatérale, l’employeur doit en informer, au plus tard le 31 mars 2019, le CSE, le comité d’entreprise, les délégués du personnel ou la délégation unique du personnel, s’ils existent.

La loi semble donc exempter l’employeur d’une information / consultation des institutions représentatives du personnel (ci-après "IRP"), même si le bénéfice de la prime revêt un caractère collectif imposant en principe une saisine « complète » des IRP.

5/ Libellé sur le bulletin de paie.

Dans un souci de clarification, la prime doit être nettement identifiée (ex. « prime exceptionnelle de pouvoir d’achat », « PE pouvoir d’achat », « PE mesures d’urgence », « prime loi 2018-1213 », etc.).

Elle peut figurer en haut ou en bas du bulletin de paie, selon les logiciels de paie de chaque entité/structure. En général, les éléments non soumis à cotisations et à impôt sur le revenu (frais, indemnité de licenciement, etc.) figurent en bas du bulletin de paie.

6/ Cas d’exclusion.

Les employeurs suivants sont concernés par la prime de 1.000 € :

- Ceux soumis à l’obligation prévue à l’article L. 5422-13 du Code du travail (assurer les salariés contre le risque de privation d’emploi) : sociétés, associations, entreprises individuelles, professions libérales, EPIC, etc. ;
- Les entreprises dont le contrôle est majoritairement effectué par l’État (RATP, La Poste, etc.) ;
- Les entreprises de la branche professionnelle des industries électriques et gazières soumises au statut national du personnel des industries électriques et gazières.

Sont en revanche exclus du dispositif l’État, les collectivités locales ainsi que les établissements publics administratifs.

En conclusion, retenons également deux autres mesures significatives de la Loi :
- une exonération d’impôt et de cotisations sociales dès le 1er janvier 2019 pour les heures supplémentaires et complémentaires ;
- la création d’un taux intermédiaire de CSG pour les pensions de retraite et d’invalidité.

Xavier Berjot Avocat Associé SANCY Avocats [->xberjot@sancy-avocats.com] [->https://bit.ly/sancy-avocats] Twitter : https://twitter.com/XBerjot Facebook : https://www.facebook.com/SancyAvocats LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

[1LOI n° 2018-1213 du 24 décembre 2018 portant mesures d’urgence économiques et sociales.

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