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Entreprises de 50 salariés sans délégué syndical : comment conclure un accord d’entreprise ? Par Xavier Berjot, Avocat.
Parution : jeudi 7 février 2019
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La négociation des accords collectifs relève « historiquement » du monopole des organisations syndicales. Le Code du travail permet cependant aux entreprises dépourvues de délégué syndical (ci-après « DS ») de négocier des accords internes. Cette solution, trop méconnue, offre à l’entreprise la possibilité d’adapter le droit à son environnement économique et social.

1. La négociation d’un accord collectif avec des élus du CSE mandatés.

Dans les entreprises dont l’effectif habituel est au moins égal à 50 salariés, en l’absence de délégués syndicaux (ci-après « DS ») dans l’entreprise, les membres titulaires de la délégation du personnel du comité social et économique (ci-après « CSE ») peuvent négocier, conclure, réviser ou dénoncer des accords collectifs s’ils sont expressément mandatés à cet effet par une ou plusieurs organisations syndicales (C. trav. art. L. 2232-24).

1.1. Conditions et procédure.

- Seuls les membres titulaires du CSE peuvent conclure des accords collectifs ;
- Ils doivent être mandatés par une organisation représentative dans la branche dont relève l’entreprise ou, à défaut, au niveau national et interprofessionnel ;
- Une même organisation ne peut mandater qu’un seul salarié ;
- Les organisations syndicales doivent être informées par l’employeur de sa décision d’engager des négociations ;
- La validité des accords conclus par les élus mandatés est subordonnée à leur approbation par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, « dans des conditions déterminées par décret et dans le respect des principes généraux du droit électoral. »

NB : L’article L. 2232-25-1 du Code du travail impose également à l’employeur de faire connaître son intention de négocier aux membres de la délégation du personnel du CSE par tout moyen permettant de lui conférer une date certaine.

En pratique, l’employeur doit donc envoyer une lettre recommandée à la fois aux organisations syndicales et aux membres du CSE. S’agissant de ces derniers, il est vivement conseillé d’écrire aux membres titulaires mais également aux membres suppléants.

Lorsque ces démarches ont été accomplies, les élus qui souhaitent négocier le font savoir à l’employeur dans un délai d’un mois et indiquent, le cas échéant, s’ils sont mandatés par une organisation syndicale.

Si tel est le cas, la négociation peut s’engager avec le ou les élus qui ont été mandatés par la ou les organisations syndicales.

1.2. Approbation par les salariés.

Une fois l’accord signé, celui-ci doit être soumis à l’approbation des salariés selon la procédure suivante (C. trav. art. D. 2232-8) :
- La consultation doit être organisée dans un délai de 2 mois à compter de la conclusion de l’accord ;
- L’employeur doit consulter au préalable le ou les élus mandatés sur ses modalités ;
- Il doit informer les salariés de ces modalités par tout moyen, au plus tard 15 jours avant la consultation.

En pratique, l’employeur doit prévoir :
- Les modalités d’information des salariés sur le texte de l’accord ;
- Le lieu, la date et l’heure du scrutin ;
- Les modalités d’organisation et de déroulement du vote ;
- Le texte de la question soumise au vote des salariés.

Si aucun élu titulaire du CSE n’a été mandaté par une organisation syndicale, l’accord collectif peut être conclu avec un élu titulaire non mandaté, mais dans des conditions différentes.

2. La négociation d’un accord collectif avec des élus du CSE non mandatés.

Dans les entreprises dont l’effectif habituel est au moins égal à 50 salariés, en l’absence de membre élu du CSE mandaté en application de l’article L. 2232-24 (cf. § 1 ci-dessus), les membres titulaires du CSE qui n’ont pas été expressément mandatés par une organisation syndicale peuvent négocier, conclure, réviser ou dénoncer des accords collectifs (C. trav. art. L. 2232-25).

2.1. Conditions et procédure.

- La négociation ne porte que sur les accords collectifs relatifs à des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif, à l’exception des accords portant sur le licenciement économique ;
- La validité des accords est subordonnée à leur signature par des élus titulaires représentant la majorité des suffrages exprimés en faveur des membres du CSE lors des dernières élections professionnelles.

Afin d’engager la négociation, l’employeur doit, faire connaître son intention de négocier aux membres de la délégation du personnel du CSE par tout moyen permettant de lui conférer une date certaine (LRAR, en pratique).

Par ailleurs, l’employeur doit écrire aux organisations syndicales représentatives (ici encore, par LRAR).

NB : En effet, bien que le texte ne le précise pas clairement, la priorité est donnée à la négociation avec un élu mandaté. Ce n’est donc que si aucun élu n’a été mandaté que la négociation peut s’engager avec un ou des élus non mandatés.

En pratique, l’employeur doit laisser s’écouler un délai d’un mois après avoir écrit aux élus du CSE et aux organisations syndicales.

A l’issue de ce délai, la négociation s’engage avec les élus qui ont indiqué être mandatés par une organisation représentative (cf. § 1) ou, à défaut, avec des élus non mandatés (cf. § 2).

2.2. Conditions de validité de l’accord.

Contrairement à la négociation avec des élus mandatés, l’accord n’a pas à être approuvé par une majorité de salariés.

En revanche, la validité de l’accord est subordonnée à sa signature par des membres de la délégation du personnel du CSE représentant la majorité des suffrages exprimés en faveur des membres du CSE lors des dernières élections professionnelles.

L’employeur doit donc vérifier les procès-verbaux des élections, afin de savoir si la condition est remplie ou non.

3. La négociation d’un accord collectif avec des salariés non élus mandatés.

Dans les entreprises dont l’effectif habituel est au moins égal à 50 salariés dépourvues de DS lorsque, à l’issue de la procédure définie à l’article L. 2232-25-1 (cf. § 1 et 2), aucun membre élu du CSE n’a manifesté son souhait de négocier, les accords d’entreprise peuvent être négociés, conclus, révisés ou dénoncés par un ou plusieurs salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives (C. trav. L. 2232-26).

NB. Le présent article s’applique de droit dans les entreprises dépourvues de délégué syndical dans lesquelles un procès-verbal de carence a établi l’absence de représentants élus du personnel.

3.1. Conditions et procédure.

- La ou les organisations syndicales doivent être représentatives dans la branche ou, à défaut, au niveau national et interprofessionnel ;
- Une même organisation syndicale ne peut mandater qu’un seul salarié ;
- Les organisations syndicales doivent être informées par l’employeur de sa décision d’engager des négociations.

3.2. Approbation par les salariés.

L’accord signé par un salarié mandaté doit avoir été approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans des conditions déterminées par décret et dans le respect des principes généraux du droit électoral.

Ainsi, après avoir recueilli l’avis du ou des salariés mandatés sur les modalités de la consultation, l’employeur doit organiser le scrutin (C. trav. art. D. 2232-8). Les modalités et le résultat de la consultation sont similaires aux règles prévues pour la négociation avec les élus mandatés (cf. § 1.2).

Xavier Berjot Avocat Associé SANCY Avocats [->xberjot@sancy-avocats.com] [->https://bit.ly/sancy-avocats] Twitter : https://twitter.com/XBerjot Facebook : https://www.facebook.com/SancyAvocats LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b
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