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Et si on en parlait : la technique managériale du décentrage.
Parution : lundi 4 mars 2019
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Difficulté à saisir les ressorts de motivation de vos collaborateurs ? Incompréhension récurrente entre vous ? Mais pourquoi n’êtes vous pas toujours sur la même « longueur d’ondes » que votre équipe ?
Essayez le décentrage ! Une approche managériale concrète qui va vous faire envisager les choses d’un autre point de vue.

N’avez-vous jamais été déconcerté par la réaction d’un collaborateur ? N’avez-vous jamais eu des moments de solitude au moment de confier un dossier important à l’un d’entre eux et de voir sa mine, non pas réjouie, mais déconfite ? Vous interrogez vous régulièrement sur le rapport aux horaires qu’entretiennent certains d’entre eux et qui, parfois, vous horripilent car « ils ne vous semblent pas assez engagés pour le cabinet ? » Et pourtant, de votre point de vue, le dossier confié est valorisant et dépasser les horaires fait « partie du jeu ».

Quoi qu’il en soit, attirer les talents et surtout les fidéliser reste un enjeu souvent prioritaire des cabinets. En conséquence, poser les bases d’une communication fluide et sereine est un levier essentiel pour y parvenir.

Être manager n’exclut pas d’être cinéphile ! Rappelez-vous cette séquence, chargée de sens en management, du film « Le cercle des poètes disparus ». Le professeur, interprété par le regretté Robin Williams, enjoint ses élèves à monter sur les tables pour voir le monde sous un autre angle et changer leur point de vue sur la situation.

Le parallèle avec le management est aisé à réaliser : changer sa position initiale, son point de vue, pour tenter de se mettre « à la place » de son collaborateur.

Cette approche s’appelle le décentrage.

Son objectif ? Faire l’effort de voir la situation non plus simplement de votre point de vue mais de celui de votre interlocuteur.

Comment ? En partant d’une image simple à saisir : imaginez-vous un iceberg, la phase émergée représentant les « faits », les « comportements » observables de tous : « Votre collaborateur a refusé un dossier pourtant valorisant à vos yeux ». Cette partie représente environ 10% du total de l’iceberg.

Mais ce qui va nous intéresser maintenant, c’est la face immergée, les 90% restants. Ce sont eux qui expliquent nos comportements (les 10% observables).

Ces 90% peuvent se découper en 3 parties : 1) les besoins 2) Les émotions 3) Les valeurs :

- Les besoins correspondent à ce que votre interlocuteur recherchent, ce qui va le nourrir : A titre d’exemples, cela peut-être un besoin de reconnaissance, de challenge (Ha ! notre fameux dossier qu’on lui a proposé) ou au contraire de sécurité (Tiens, considère t’il que ce dossier pourrait le mettre en difficulté ?).

- Les émotions sont de plusieurs ordres : la peur, la joie, la colère… Elles sont souvent affichées mais parfois dissimulées. Dans des contextes professionnels difficiles, je constate souvent dans le secret des séances de travail au sein de mon cabinet, que la peur de mal faire, d’être rejeté du corps social revient souvent. Or la peur de mal faire (de décevoir, d’être sanctionné) est un frein puissant au passage à l’action.

- Les valeurs, ce sont les os de votre « squelette psychique », vous ne pourrez pas transiger durablement avec elles, sous peine d’entraîner un risque de « conflit de valeurs ». Elles peuvent s’appeler « travail », « famille », « bienveillance », « performance »… A chacun les siennes, mais elles en disent long sur nous et conduisent nos actions.

Je vous propose alors simplement, lorsque vous êtes confronté à une difficulté récurrente de management, de dessiner 2 icebergs sur une feuille. Le vôtre d’abord, et vous allez « qualifier » la phase immergée : « Je confie le dossier du client X à mon collaborateur. » puis qualifier les 3 parties de votre phase immergée. C’est ce qui vous pousse,vous, à prendre cette décision.

Ensuite, n’hésitez pas même à passer physiquement de l’autre côté de la table (pour incarner physiquement le décentrage !) et remplissez celle de votre collaborateur.

Faites l’effort de tenter de vous mettre à sa place. Son « référentiel, ses filtres et croyances » ne sont pas les vôtres. Donc il est logique que, parfois, il ne réagisse pas comme vous vous y attendriez. Et remplissez les différentes parties, envisagez les choses d’une manière qui ne soit pas la vôtre, envisagez d’autres possibles !

Peut-être que le goût pour les responsabilités importantes n’est pas le moteur de votre collaborateur, peut-être que la valeur « famille » ou « accomplissement personnel » est fondamental pour lui et qu’il n’envisage pas de ne pas y consacrer du temps. Son rapport aux horaires s’éclairera d’une autre façon. Peut-être que ses besoins, notamment financiers, ne sont pas satisfaits. Quelles émotions peuvent l’habiter ?

Une fois ce décentrage réalisé, dans une grande majorité des cas, la perspective aura changé et le manager commence à accepter de ne pas « tout voir » uniquement de son point de vue.

La comparaison objective de ces 2 icebergs vous donnera autant de clefs de compréhension et d’angles nouveaux pour aborder les sujets délicats avec vos collaborateurs et de trouver une issue constructive.

Bien sûr, présenter cet outil managérial de manière abrupte à votre collaborateur peut-être malaisé et généré de l’incompréhension. Je vous suggère plutôt d’en retenir l’esprit et, lors d’un entretien, avec lui d’aller l’interroger sur les ressorts de sa motivation. Mais par expérience, quand mes clients se sont préparés à cet exercice, ils abordent alors l’entretien en étant prêt à envisager les choses sous un autre angle et ils s’y sont mentalement préparés.

Les préalables de communication sont alors réunis pour mieux se comprendre et pour envisager de trouver une issue positive à la difficulté de management qui était alors la vôtre.

Lancez-vous, expérimentez la démarche, et brisez la glace…

Franck Simon Coach en accompagnement managérial [Cabinet Happy-Up Performance->https://www.happy-up-performance.fr/]