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Le délit de captation d’héritage. Par Avi Bitton, Avocat.
Parution : mardi 26 février 2019
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Quelle est la définition de la captation frauduleuse d’héritage ? Quelles sont les sanctions pénales de ce délit ?

1. Définition de la captation d’héritage.

La captation d’héritage est la manipulation de la part d’une personne malveillante, qui dispose de la confiance de la personne abusée, dans le but de se faire attribuer des biens dans la succession de la personne abusée, voire même la totalité de sa succession.

La captation peut prendre plusieurs formes : détournement de liquidités, de comptes bancaires en procédant à des retraits de grosses sommes de manière intempestive, ou par l’émission de chèques à l’ordre de la personne manipulatrice sans motif légitime, pouvant même aller jusqu’à la mise en place d’une procuration par la victime au bénéfice de cette dernière.

La captation peut aussi être réalisée par la souscription d’un contrat d’assurance-vie au profit de la personne malhonnête.

Des présomptions irréfragables de captation d’héritage ont été instaurées par le législateur concernant certaines professions :
- Article 909 du code civil : interdiction faites aux membres des professions médicales et de la pharmacie (médecins, …), ainsi qu’aux auxiliaires médicaux (infirmière, aide soignante, …) ayant prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt, de profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires. De même, les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et les personnes morales au nom desquelles ils exercent leurs fonctions ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires de la part des personnes dont ils assurent la protection. Cette règle est également applicable aux ministres du culte.
- Article 907 du code civil : interdiction faite au mineur de disposer au profit de son tuteur.

2. Recours en justice des victimes.

En cas de captation d’héritage, il existe pour la victime et sa famille une action civile et une action pénale.

D’une part, l’action civile consiste en l’introduction devant le tribunal d’un recours en annulation pour captation d’héritage. Le but est d’annuler les effets du détournement ou d’annuler l’acte qui a prodigué des biens aux tiers.

Dans le cas de ruses ou de manœuvres frauduleuses en vue d’obtenir une libéralité, le demandeur doit nécessairement rapporter la preuve d’un vice du consentement. De plus, l’insanité de la personne trompée doit être prouvée : il faut démontrer que cette personne, au moment où elle a consenti la libéralité, souffrait d’une altération de ses facultés mentales. En effet, l’article 901 du code civil dispose que « Pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit. La libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l’erreur, le dol ou la violence ». La preuve de l’altération peut être rapportée par tous moyens.

D’autre part, l’action pénale porte sur le délit d’abus de faiblesse et de vulnérabilité envisagé par l’article 223-15-2 du Code pénal qui prévoit qu’ "Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende l’abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse soit d’un mineur, soit d’une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de son auteur, soit d’une personne en état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement, pour conduire ce mineur ou cette personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables".

Dans le cas d’une poursuite pénale, il faudra bien entendu caractériser l’état d’ignorance ou la situation de faiblesse du défunt, mais aussi l’abus qui en a été fait.

Avocat, Ancien Membre du Conseil de l’Ordre Tél. : 01.46.47.68.42 Courriel : avocat@avibitton.com Site : www.avibitton.com