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Absence de procès-verbal de contrôle technique : quelles conséquences ? Par Vincent Berlioux, Avocat.
Parution : jeudi 28 février 2019
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En raison de sa réglementation toujours plus stricte, le contrôle technique constitue aujourd’hui un point névralgique chez les automobilistes. Certains d’entre eux ont même décidé de passer outre ce contrôle pour conduire ou vendre leur véhicule. Retour sur les conséquences juridiques du non-respect de cette obligation.

A l’heure actuelle, la grande majorité des automobilistes savent qu’il est nécessaire de détenir un « procès-verbal de contrôle technique » à jour pour pouvoir conduire ou vendre son véhicule.

D’un point de vue pratique, cela se comprend facilement car le contrôle technique doit satisfaire deux objectifs majeurs : la sécurité (anticiper une panne ou un accident) et la protection de l’environnement (empêcher qu’un véhicule pollue anormalement).

D’un point de vue juridique, la raison est encore plus évidente car le contrôle technique est devenu obligatoire au 1er janvier 1992 après adoption de l’arrêté du 19 juin 1991 relatif à « la mise en place et à l’organisation du contrôle technique des véhicules dont le poids n’excède pas 3,5 tonnes ».

Cependant, il apparaît que depuis l’entrée en vigueur de cet arrêté, la réglementation a systématiquement été renforcée.

Pour bien cerner les contours de l’obligation de contrôle technique, il conviendra donc de faire un point sur la réglementation actuelle (I) avant d’envisager l’hypothèse d’un non-respect de cette obligation en cas de contrôle routier (II) ou en cas de vente du véhicule (III).

I. La réglementation actuelle du contrôle technique.

Le contrôle technique est prévu aux articles L. 323-1 et suivants et R. 323-1 et suivants du Code de la route.

Son principe et son obligation sont rappelés dès l’article R.323-1 : « Tout propriétaire d’un véhicule mentionné au présent chapitre n’est autorisé à le mettre ou le maintenir en circulation qu’après un contrôle technique ayant vérifié qu’il est en bon état de marche et en état satisfaisant d’entretien ».

Cependant, avant d’entreprendre un contrôle technique, il conviendra de s’assurer que son véhicule est bien assujetti à une telle obligation.

En effet, sans donner de liste exhaustive, de nombreuses catégories de véhicules bénéficient d’une dispense.

Tel sera le cas notamment, au visa de l’article R. 323-3 du Code de la route, des véhicules et matériels spéciaux des armées, des véhicules diplomatiques ou encore des véhicules de collection dont la mise en circulation est antérieure à 1960.

De plus, il est à noter que le contrôle technique ne sera obligatoire que pour les véhicules d’une certaine ancienneté.

En ce sens, l’article R. 323-22 du Code de la route précise que les véhicules particuliers dont le poids total en charge autorisé ne dépasse pas 3,5 tonnes n’auront à subir un contrôle technique que : «  Dans les six mois précédant l’expiration d’un délai de quatre ans à compter de la date de leur première mise en circulation  » et postérieurement à ce contrôle, d’un contrôle technique périodique, renouvelé tous les deux ans  ».

A titre d’exemple, cela signifie que si la première mise en circulation d’un véhicule remonte au 1er janvier 2015, un premier contrôle technique ne sera obligatoire qu’entre le 1er juillet 2018 et le 1er janvier 2019.

Si malheureusement le véhicule doit subir un contrôle technique, l’automobiliste devra faire attention à vérifier un troisième point : la qualité du professionnel qu’il contactera.

En effet, d’après l’article L. 323-1 du Code de la route, seuls des contrôleurs agréés par l’État pourront opérer un contrôle technique sur le véhicule de l’intéressé.

Si le professionnel est bien agrémenté, celui-ci procédera à un examen sans démontage des organes et pièces essentiels du véhicule.

Depuis le 20 mai 2018, date d’entrée en vigueur de l’arrêté du 02 mars 2017 qui transpose la directive 2014/45/UE du 03 avril 2014, le contrôle technique prendra concrètement la forme de :
- 133 points de contrôle
- 606 défaillances
- 9 fonctions contrôlées (Identification du véhicule ; Équipements de freinage ; Direction, Visibilité, feux, dispositifs réfléchissants et équipements électriques ; Essieux, roues, pneus, suspension, châssis et accessoires du châssis ; Autre matériel ; Nuisances.)
- 3 niveaux de défaillances (défaillances mineures, majeures et critiques).

Deux situations se présenteront alors :
- Soit une défaillance majeure ou critique est révélée, auquel cas le véhicule sera soumis à contre visite pour faire constater la réalisation des réparations ;
- Soit le contrôle technique s’avère favorable, auquel cas l’automobiliste pourra jouir paisiblement de son véhicule dans les durées fixées par l’article R. 323-22 du Code de la route cité plus haut.

Cependant, au regard du coût du contrôle technique et des frais de remises en état pouvant être imposés sur le véhicule, certains automobiles pourraient être tentés de n’effectuer aucun contrôle technique.

II. Le défaut de contrôle technique en cas de contrôle routier.

Le défaut de contrôle technique peut se présenter dans deux hypothèses :
- Le véhicule n’a jamais fait l’objet de contrôle technique ;
- Le véhicule a bien fait l’objet d’un contrôle technique mais celui-ci est devenu périmé faute d’avoir été renouvelé dans les délais impartis.

Dans un cas comme dans l’autre, en vertu de l’article R. 323-1 précité, le fait pour un propriétaire de mettre ou maintenir en circulation un véhicule sans avoir satisfait aux obligations de contrôle technique est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe.

En l’occurrence, il s’agira de payer une amende forfaitaire de 135€ qui pourra être minorée (90€), majorée (375€), avec un maxima d’un montant de 750€.

En complément, le véhicule pourra être immobilisé dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3 du Code de la route.

Dès lors, il convient d’être vigilent et bien effectuer les contrôles techniques dans les délais impartis pour maintenir son véhicule en circulation.

III. Le défaut de contrôle technique dans le cadre d’une vente de véhicule.

L’article R. 323-22 du Code de la route apporte une précision supplémentaire quant aux délais à respecter dans le cadre d’une vente.

En effet, il est indiqué qu’avant toute mutation intervenant au-delà d’un délai de 4 ans après la première mise en circulation du véhicule, le vendeur doit être en mesure de fournir à son acheteur un procès-verbal de contrôle technique de moins de 6 mois.

En d’autres termes, cela signifie qu’un véhicule pourra parfaitement circuler s’il a obtenu un contrôle technique favorable de moins de 2 ans mais ne pourra pas être vendu si le dernier contrôle remonte à plus de 6 mois.

A toutes fins utiles, conformément à l’article 5 bis du décret n°78-993 du 04 octobre 1978, cette obligation disparaîtra si l’acheteur est un professionnel.

Que se passe-t-il alors si le vendeur ne respecte pas son obligation de contrôle technique vis-à-vis de l’acheteur non professionnel ?

Au plan pénal, la réponse n’est pas évidente.

A la lecture de l’article R. 323-22 du Code de la route, il est manifeste que l’établissement d’un contrôle technique constitue une obligation incombant au vendeur.

Cependant, aucune disposition ne prévoit de peine expresse en cas de violation de cette obligation.

En effet, la seule règle prévoyant une sanction est celle figurant à l’article R323-1 du Code de la route.

Pour autant, celle-ci ne concerne que « le fait pour tout propriétaire de mettre ou maintenir en circulation un véhicule sans avoir satisfait aux obligations de contrôle technique ».

Dès lors, à moins que cette disposition ne soit interprétée largement, aucune sanction ne pourra réprimer le vendeur qui ne fournit pas de rapport de contrôle technique de moins de 6 mois à son acheteur.

Cependant, selon les circonstances, d’autres infractions pénales pourront être retenues ; tel sera notamment le cas lorsque le vendeur ne produira pas de rapport de contrôle technique pour tromper l’acheteur sur l’état du véhicule.

Au plan civil, les conséquences juridiques sont heureusement bien plus claires.

En ce sens, il convient de rappeler le principe fixé par l’article 1615 du Code civil : « L’obligation de délivrer la chose comprend ses accessoires et tout ce qui a été destiné à son usage perpétuel ».

Par « accessoires », la Chambre commerciale de la Cour de Cassation a précisé (décision du 08 novembre 1972, n°71-14334) que leur délivrance constitue une obligation contractuelle essentielle du vendeur : « Mais attendu que la Cour d’appel a décidé que la remise à l’acheteur des documents administratifs relatifs au véhicule vendu constitue une obligation contractuelle essentielle du vendeur. »

En conséquence, si le vendeur ne délivre pas de procès-verbal de contrôle technique à jour, l’acheteur pourra se prévaloir d’un défaut de délivrance et invoquer les articles 1217 et suivants du Code civil pour provoquer la résolution (= annulation) du contrat de vente.

En résumé, deux points doivent être systématiquement vérifiés pour éviter toute difficulté avec l’obligation de contrôle technique :
- Vérifier la catégorie et la date de première circulation du véhicule pour savoir si celui-ci doit subir un contrôle technique ;
- Vérifier si la date d’établissement du dernier procès-verbal de contrôle technique est inférieure à 2 ans (pour conduire) et inférieure à 6 mois (pour vendre).

Telles sont les informations essentielles à connaître en matière d’obligation de contrôle technique.

Vincent BERLIOUX Avocat www.berlioux-avocat.com
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