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Le changement d’usage du logement pour de la location type "Airbnb". Par Pauline Darmigny, Avocat.
Parution : vendredi 15 mars 2019
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La location touristique de courte durée est encadrée dans une limite temporelle légale qui est de 120 jours par an. Utiliser votre logement pour y faire de la location touristique de courte durée à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, est considéré au sens du Code de la construction et de l’habitation comme étant un changement d’usage du logement (article L631-7 du Code de la construction et de l’habitation).

Pourtant, en principe, si vous faîtes de la location touristique occasionnelle de votre résidence principale, dans la limite de 120 jours par an, vous n’avez pas à faire une demande en mairie de changement d’usage.

En revanche, si vous désirez mettre votre résidence secondaire, en location touristique de courte durée à une clientèle de passage, toujours dans la limite légale de 120 jours par an, vous êtes tenu de solliciter un changement d’usage, auprès du maire du lieu de situation du bien immobilier loué.

A cette distinction entre la résidence principale et la résidence secondaire, s’ajoute une autre distinction relative à la population de la commune.

En effet, l’autorisation de changement d’usage est obligatoire si le projet concerne un local d’habitation situé dans une commune dont la population excède les 200.000 habitants, mais également si le bien est situé dans les départements suivants : Hauts de Seine (92), Seine-Saint-Denis (93) et Val de Marne (94).

En conclusion : si le bien que vous envisagez de louer pour de la location touristique de courte durée est votre résidence secondaire, vous devez obligatoirement obtenir au préalable l’autorisation de la commune de procéder au changement d’usage du bien.

Si le bien que vous envisagez de louer pour de la location touristique de courte durée est votre résidence principale et que le bien est situé dans une ville dont la population excède les 200.000 habitants ou dans les 3 départements cités limitrophes de Paris, vous êtes aussi dans l’obligation de faire ce changement d’usage.

Si le bien que vous envisagez de louer pour de la location touristique de courte durée est votre résidence principale située dans une ville dont la population n’excède pas les 200.000 habitants, vous n’avez aucune demande de changement d’usage à effectuer.

Qu’est-ce-que le changement d’usage : définition et applications concrètes.

Il y a changement d’usage lorsqu’il est question de transformer un logement à usage d’habitation en un local professionnel ou commercial. Le changement d’usage est fait pour protéger le logement et concerne exclusivement des locaux d’habitation transformés pour un autre usage tel que notamment la location touristique de courte durée.

Si la transformation concerne des locaux commerciaux ou professionnels en logement, dans ce cas, aucune autorisation n’est nécessaire.

Pour obtenir cette autorisation de changement d’usage nécessaire des locaux, vous devez remplir un formulaire sur le site internet de la mairie du lieu où est situé le bien immobilier exploité pour de la location touristique de courte durée.

L’autorisation préalable de changement d’usage nécessaire est délivrée par le maire de la ville où est situé l’immeuble.

C’est le maire qui décide d’accorder ou non ce changement d’usage afin de transformer un local d’habitation, en un local destiné à de la location saisonnière de courte durée, qui sera assimilée à une activité commerciale.

Respecter les droits des tiers.

Une fois que vous avez obtenu du maire l’autorisation de procéder au changement d’usage de votre logement, vous n’êtes pas pour autant libre de faire ce que vous voulez de votre bien.

En effet, vous devez respecter les droits des tiers. D’autres démarches administratives peuvent s’avérer nécessaires et notamment :
- Des autorisations d’urbanisme
- L’accord de la copropriété
- Le respect de certaines normes

Concernant les règles de vie en copropriété par exemple, vous devez faire très attention aux dispositions du règlement de copropriété et vérifier que le règlement de copropriété vous autorise à exercer cette activité de location qui pourrait s’apparenter, du fait du changement d’usage du bien, à une activité commerciale.

Or, dans certains immeubles, hormis l’usage d’habitation des lots de copropriété, tout autre usage est interdit.

Cela se matérialise par l’insertion, au sein du règlement de copropriété, d’une clause dite d’habitation bourgeoise « stricte » qui va obliger, chaque occupant, copropriétaire ou locataire, à respecter un usage strictement d’habitation des lots de copropriété de l’immeuble.

Dans ce cas, aucune activité ne sera autorisée, qu’elle soit professionnelle ou commerciale.
Dans des immeubles où cette clause d’habitation bourgeoise est dite « clause d’habitation bourgeoise stricte », un avocat ne peut même pas exercer son activité, les lots étant uniquement destinés à de l’habitation pure.

Si la clause d’habitation bourgeoise n’est que relative, les activités professionnelles pourront être exercées, mais pas les activités commerciales telles que la location touristique de type Airbnb.

Ainsi, il faut impérativement prendre connaissance des clauses du règlement de copropriété de l’immeuble dans lequel vous projetez d’effectuer de la location touristique de courte durée car cette activité peut être assimilée à une activité commerciale, laquelle peut être interdite dans certains immeubles en copropriété.

En conclusion : si le règlement de copropriété comporte une clause d’habitation bourgeoise stricte, vous n’avez pas le droit d’utiliser votre bien immobilier pour y pratiquer une activité de location touristique de courte durée, type « Airbnb ».

Le cas particulier de la ville de Paris.

A Paris, la mairie cherche à encadrer le changement d’usage des locaux d’habitation vers une transformation en locaux commerciaux ou professionnels.

Si le bien est la résidence principale du loueur et qu’il est situé dans une commune dont la population dépasse les 200.000 habitants ou dans les départements cités plus haut, limitrophes de la ville de Paris : il faut qu’il obtienne l’autorisation n°1 dite « à usage mixte ». Il doit alors adresser sa demande par voie postale à la mairie (section Direction du Logement et de l’Habitat).

Si le bien est la résidence secondaire du loueur : il faut qu’il obtienne l’autorisation n°3 dite « à caractère réel avec compensation ». C’est ce que l’on appelle le changement de destination.

Le changement de destination : à ne pas confondre avec le changement d’usage.

Le changement de destination est définitif car il concerne la nature du bien, à la différence du changement d’usage qui est personnel puisqu’il n’est pas attaché au bien mais à la personne du loueur.

Vous l’aurez compris, le changement de destination ne peut concerner que la résidence secondaire du loueur, exploitée pour de la location touristique de type « Airbnb ».

Ainsi, lorsque vous souhaitez mettre en location de courte durée votre résidence secondaire, vous devez solliciter une autorisation de changement de destination qui s’accompagne d’une compensation.

A quoi correspond cette compensation ? cette compensation est due, en raison de la transformation définitive d’un local à usage d’habitation en un local non destiné à de l’habitation.

Quel est l’objectif de cette compensation ? l’objectif est de reconstituer la perte d’un logement par la création d’un autre logement afin de ne pas aggraver l’insuffisance de logements.

Comment se passe matériellement ce changement de destination ?

Le demandeur à ce changement de destination doit en contrepartie :
- Soit proposer des locaux commerciaux/professionnels et les transformer en logements ;
- Soit acheter des locaux professionnels et les transformer en logements.

En clair : les communes estiment que le changement de destination d’un bien immobilier jusqu’à présent à usage d’habitation, transformé dès à présent en local à usage commercial, pour y faire de la location touristique de courte durée, peut être préjudiciable aux administrés dans la mesure où cela prive la commune d’un logement.

Si vous affectez votre résidence secondaire à de la location touristique de courte durée, dont on a vu que cela s’apparentait à une activité commerciale, et que vous en demandez le changement définitif de destination, vous privez ainsi votre commune et ses habitants de la possibilité d’habiter ce bien qui sera définitivement rayé de la catégorie « bien à usage d’habitation ».

C’est la raison pour laquelle, la législation actuelle exige que, pour toute personne qui obtient un changement de destination de son bien de type résidence secondaire, ce changement s’accompagne d’une « juste » compensation.

Ainsi et si vous obtenez l’autorisation de changer définitivement la destination de votre résidence secondaire afin d’en faire de la location touristique, vous devez, en compensation, proposer à votre commune, soit d’acheter avec vos propres deniers, des locaux professionnels ou commerciaux et les transformer en logements, soit de proposer directement à la mairie des biens immobiliers dont vous êtes déjà propriétaire, qui sont à usage professionnel ou commercial, à charge pour vous de les transformer en logements.

On imagine bien que le coût que cette compensation représente, est fait essentiellement pour dissuader les loueurs de faire de leur résidence secondaire, un meublé de tourisme.

Pour que la demande de compensation soit recevable, il faut que :
- Les locaux proposés en compensation soient à un usage autre que l’habitation ;
- Les locaux ne soient pas déjà revenus à un usage d’habitation au moment de la demande ;
- Les locaux correspondent à des unités de logement.

Pour faire de la location meublée de courte durée, la compensation doit être proposée dans le même quartier que votre local, avant tout dépôt de dossier.
Ce qui signifie que vous devez, au préalable, trouver un local servant de compensation, avec les coûts et démarches que cela comporte et notamment les travaux destinés à changer la destination du local…

Comment échapper au changement d’usage tout en restant dans la légalité ?

La création du bail-mobilité, nouveauté de la loi ELAN entrée en vigueur le 23 novembre 2018, permet à tout loueur de proposer son bien à la location, pour des périodes de courte durée :

Qu’est-ce-que le bail-mobilité ?

Le bail-mobilité est un contrat de location de courte durée d’un logement meublé, à destination de locataires en mutation professionnelle.

Ce bail s’adapte ainsi à un locataire qui serait en études supérieures, en formation professionnelle, en stage, ou encore en contrat d’apprentissage par exemple.

Le bail-mobilité est un contrat très souple puisque la durée est assez courte, entre 1 et 10 mois maximum, non renouvelable.

Dans ce cas-là, si vous optez pour la conclusion d’un bail-mobilité avec une clientèle de passage, pour des périodes de courte durée, vous n’avez pas besoin de faire le changement d’usage.

Ce type de contrat vous permettra de sortir du cadre strict de la location touristique de type Airbnb, pour proposer votre logement à la location pour des périodes de courte durée et vous permettre ainsi de rentabiliser un investissement foncier ou obtenir des revenus complémentaires du fait de cette activité de location de courte durée.

Maître Pauline DARMIGNY Avocat
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