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Propriété horizontale, propriété verticale et revendication d’une construction. Par Damien Lorcy, Avocat.
Parution : jeudi 4 avril 2019
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Un syndicat de copropriétaires d’une résidence revendique la propriété d’une construction édifiée sur le terrain qu’il occupe, en l’occurrence des locaux utilisés depuis plus de vingt ans par l’association voisine. A première vue, la construction semblait lui appartenir. Mais le syndicat a méconnu (ou a voulu ignorer) l’existence d’une copropriété horizontale partagée avec sa voisine...

Une association, propriétaire de deux parcelles formant un ensemble immobilier, cède la propriété du tout à un promoteur, qui s’engage en contrepartie :
- à rénover une partie des locaux existants,
- à démolir les autres et à édifier une résidence à leur place sur une partie du terrain, avant de rétrocéder à l’association la propriété des locaux rénovés, celle des constructions annexes prévues et du terrain.

Pour mener à bien le projet, le promoteur divise le terrain en deux lots : le premier sur lequel se trouvent les locaux rénovés ; le second sur lequel la résidence et les constructions annexes convenues au profit du premier lot sont édifiées.

Pour permettre à l’association d’accéder à ces constructions annexes situées sur le deuxième lot, un passage est prévu entre les deux lots.

A l’issue des travaux de rénovation et de construction, le promoteur, maître de l’ouvrage, rétrocède comme convenu à l’association ses locaux rénovés situées sur le lot 1, et les constructions annexes situées sur le lot 2.

Parallèlement, la copropriété verticale concernant la résidence construite sur le lot 2 se met en place.

L’association accède et utilise les locaux annexes qui jouxtent ceux de la résidence ; la situation perdure sans difficulté pendant plus de vingt ans, jusqu’à ce que le syndicat des copropriétaires imagine revendiquer la propriété des constructions annexes situées sur son lot, en faire expulser l’association et faire supprimer l’accès entre les deux lots.

A l’appui de cette demande, il soutient principalement que ces constructions sont sa propriété, puisque établies sur "son" terrain, et que l’association les occupe sans droit ni titre.
Il met également en avant le règlement de copropriété, qui décrivait les existants du lot 2, sans faire mention des locaux litigieux ni de quelque droit que ce soit de l’association voisine.

Ce faisant, le syndicat méconnaissait l’existence d’une copropriété horizontale existant entre lui et l’association : en effet, si le promoteur a divisé le terrain en deux lots, celui-ci demeurait néanmoins la copropriété des deux parties ; une vérification auprès du services de la publicité foncière corroborait les différents actes antérieurs faisant état de cette copropriété horizontale !

Le syndicat n’est donc pas propriétaire exclusif du terrain qu’il occupe, et toutes les constructions qui s’y trouvent ne lui appartiennent pas forcément.

En outre, c’est le promoteur, alors propriétaire de l’ensemble immobilier, qui a réalisé les constructions litigieuses et les a ensuite rétrocédées à l’association, conformément à leur accord initial. Or le syndicat, qui vient aux droits du promoteur, n’a pu acquérir plus de droits que ce dernier : si le promoteur maître d’ouvrage a rétrocédé à l’association la propriété des constructions litigieuses, le syndicat qui tient ses droits de lui ne saurait utilement en revendiquer la propriété.
Il est donc logiquement débouté de sa demande.

La référence à la propriété horizontale a ici permis de sortir d’une situation a priori délicate pour l’association, qui ne pouvait opposer l’usucapion et qui ne pouvait nier que les locaux en question n’étaient pas sur son lot.
Il lui a fallu pour cela retracer tout l’historique du projet, de manière à reconstituer précisément les droits récupérés du promoteur, afin de contrecarrer des demandes audacieuses de son voisin.

Damien LORCY Avocat 45, Cours d'Albret 33000 BORDEAUX 05 56 17 77 72 lorcyetcie.fr