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Licenciement : obtenir plus d’indemnités en écartant le barème Macron. Par Amandine Valetout, Avocate.
Parution : vendredi 19 avril 2019
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Alors que les ordonnances Macron avaient pour but de sécuriser les ruptures de contrats entre employeurs et salariés, la jurisprudence est finalement plus qu’instable en la matière… Il faudra attendre, l’avis de la Chambre sociale de la Cour de Cassation pour connaître sa position…

Le licenciement d’un salarié ne peut se faire à tort et à travers. Il doit respecter pour être valable une cause réelle et sérieuse.
La cause doit être réelle, c’est-à-dire objective existante et exacte et la cause doit être sérieuse en présentant un caractère de gravité.

Alors qu’il existait un barème indicatif suggérant des montants aux conseillers prud’homaux lors des licenciements abusifs, dorénavant un barème (appelé Barème Macron) instauré par les ordonnances du 23 septembre 2017 s’impose aux juges.

Ainsi, lorsqu’un salarié remet en cause le caractère réel et sérieux de son licenciement, et si le Conseil des Prud’hommes considère le licenciement comme abusif, les indemnités auxquelles peut prétendre le salarié sont désormais très encadrées. En effet, les ordonnances mettent en place un plafond et un plancher selon l’ancienneté du salarié [1].

A titre d’exemple, un salarié qui a 3 ans d’ancienneté percevra en cas de licenciement abusif au maximum 4 mois de salaire brut. Pour un salarié de 12 ans d’ancienneté ce sera 11 mois de salaire brut maximum.
Malgré le caractère impératif de ces dispositions certaines décisions du Conseil des Prud’hommes s’affranchissent de ce barème pour condamner l’employeur au-delà des plafonds.

Quelle est alors l’argumentation des Avocats, validée par le Conseil des Prud’hommes ?

Les décisions invoquent :
- L’article 10 de la convention 158 de l’OIT (Organisation Internationale du Travail, selon lequel, « si les juges arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationale, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ ou ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée. »
- Par ailleurs l’article 24 de la Charte Sociale Européenne énonce qu’ « en vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les parties s’engagent à reconnaître le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée ».

Si certains Conseil de Prud’hommes appliquent scrupuleusement les nouvelles dispositions d’autres comme le Conseil des Prud’hommes de Troyes a écarté, l’application du Barème Macron. Le Conseil a considéré que ces dispositions étaient contraires à la convention de l’OIT et énonce qu’elles violent les dispositions de la charte sociale européenne.
De surcroît, le Conseil des Prud’hommes d’Amiens (décision du 19 décembre 2018) et de Lyon (décision du 21 décembre 2018) ont également écarté l’application du barème.

A ce jour, il nous faut attendre les appels éventuels qui pourront intervenir dans ces affaires et la position de la Cour de Cassation dans quelques années…
Ces dispositions concernant les licenciements avaient pour but de sécuriser les ruptures du contrat de travail, il convient de s’apercevoir que c’est l’incertitude juridique qui persiste après ces différentes décisions.

Cela promet de belles plaidoiries devant les Conseils des Prud’hommes !

Maître Amandine VALETOUT [->https://avocat-valetout-perigueux.fr/]

[1L-1235-3 code du travail.