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Effacement de la dette locative et résiliation du bail. Par Méryl Portal, Avocat.
Parution : lundi 13 mai 2019
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L’effacement de la dette locative du locataire défaillant n’équivaut pas à son paiement, de sorte que le bailleur peut solliciter du juge la résiliation du bail litigieux.

De manière récurrente, le droit du surendettement fait obstacle au régime général des obligations en accordant un statut protecteur au débiteur.

Toutefois, ces dernières années, le législateur est venu tempérer certains avantages qu’octroyait ce régime au locataire défaillant faisant l’objet d’une procédure de surendettement au profit du bailleur.

Désormais, la procédure de surendettement dont fait l’objet un locataire défaillant ne peut pas tout, de sorte que son manquement contractuel n’est pas effacé par le jeu de l’effacement de la dette locative.

C’est ce qu’est venu rappeler la Cour de cassation lors de son arrêt du 10 janvier 2019 [1].

La question est de savoir quels sont les effets de l’ouverture d’une procédure de surendettement du débiteur quant au paiement de la dette locative et au contrat de bail en cours ?

En effet, en principe lorsqu’un locataire fait l’objet d’une procédure de surendettement, les créances antérieures au jugement d’ouverture sont effacées, de sorte que le bailleur n’est plus fondé à solliciter le paiement des dettes locatives concernées.

A ce titre, lors de l’arrêt précité, le débiteur pensait que l’effacement de la dette locative équivalait à son paiement ne permettant pas au bailleur de solliciter la résiliation judiciaire du bail litigieux.

Or, la Cour de cassation est venue rappeler que l’effacement de la dette locative, qui n’équivaut pas à son paiement, ne fait pas disparaître le manquement contractuel du locataire qui n’a pas réglé le loyer.

Dès lors, le bailleur n’est pas privé de son droit de solliciter la résiliation judiciaire du bail en cours, malgré l’ouverture de la procédure de surendettement au profit du locataire défaillant.

De cette façon, la Cour de cassation reconnaît parfaitement la protection qui est accordée au locataire faisant l’objet d’une procédure de surendettement, mais permet tout de même au bailleur de ne pas rester dans une situation de blocage juridique et d’obtenir ainsi la résiliation judiciaire du bail litigieux.

Toutefois, cela reste de l’appréciation souveraine du juge, qui recherchera alors si le défaut de paiement justifie de prononcer la résiliation du bail compte tenu de la bonne ou mauvaise volonté du locataire.

A ce titre, l’article 118 de loi ELAN n°2018-1021 du 23 novembre 2018, améliore la coordination entre la procédure judiciaire de résiliation du bail et la procédure de rétablissement personnel de manière à permettre au locataire de bonne foi de conserver son logement.

Ainsi, aux termes de la législation en vigueur, les procédures de résiliation et d’expulsion peuvent être suspendues tant que le locataire s’acquitte du paiement des loyers et apure sa dette locative.

Méryl PORTAL Avocat au Barreau de Paris

[1Civ. 3e, 10 janv. 2019, F-P+B, n° 17-21.774.