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Nouveautés majeures de la réglementation sur le droit du travail en Espagne. Par Luis San José Gras, Avocat.
Parution : jeudi 16 mai 2019
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Décret législatif royal 6/2019, du 1er mars 2019, relatif aux mesures urgentes visant à garantir l’égalité de traitement et l’égalité des chances entre les femmes et les hommes en matière de travail et d’emploi.

L’année 2019 a débuté avec de grands changements en matière de droit du travail portant sur des questions aussi urgentes que le droit à l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes en tant que droit fondamental, et concernant notamment la nouvelle réglementation du congé de paternité ainsi que les droits des travailleurs, des mères et des pères, que nous allons préciser dans le cadre de cet article.

Ainsi, toutes les modifications que nous expliquerons ont été introduites par le décret législatif royal 6/2019, du 1er mars 2019, relatif aux mesures urgentes visant à garantir l’égalité de traitement et l’égalité des chances entre les femmes et les hommes en matière de travail et d’emploi.

1. La loi organique 3/2007, du 22 mars 2007, pour l’égalité effective entre les hommes et les femmes, est modifiée.

• Programmes d’Égalité au sein des entreprises. Les entreprises ont l’obligation de respecter l’égalité de traitement et l’égalité des chances dans le cadre du travail et, à cet effet, elles devront adopter les mesures nécessaires visant à éviter toute sorte de discrimination au travail entre les femmes et les hommes, mesures qu’elles devront négocier et, le cas échéant, accorder avec les représentants légaux des travailleurs dans la forme prévue par la législation sur le droit du travail.

Dans ce cadre, des nouveautés ont été introduites concernant l’obligation d’élaborer et d’appliquer les programmes d’égalité.

• Dans les entreprises de 50 à 100 travailleurs, le programme d’égalité doit être mis en place à compter du 7.3.2022.
• Dans les entreprises de 100 à 150 travailleurs, le programme d’égalité doit être mis en place à compter du 7.3.2021.
• Dans les entreprises de 150 à 250 travailleurs, le programme d’égalité doit être mis en place à compter du 7.3.2020.
• Et comme nous le savons, les entreprises de plus de 250 travailleurs devraient déjà disposer des programmes d’égalité correspondants étant donné qu’elles y sont contraintes depuis la publication de la loi organique 3/2007, du 22 mars 2007.

En outre, un registre des programmes d’égalité des entreprises est créé, obligeant toutes les entreprises à inscrire leurs programmes d’égalité dans ce registre. D’un point de vue réglementaire, aussi bien le diagnostic que les contenus, les matières, les contrôles des salaires, les systèmes de suivi et d’évaluation des programmes d’égalité ainsi que les particularités de leur enregistrement devront être mis en place.

2. Plusieurs articles du Statut des travailleurs sont modifiés de la manière suivante.

• Un paragraphe est ajouté à l’article 9 du Statut des travailleurs, lequel stipule qu’en cas de nullité d’un contrat de travail pour cause de discrimination salariale en raison du sexe, le travailleur percevra la rémunération correspondant à un travail similaire ou d’une valeur égale.

• Les paragraphes 2 et 3 de l’article 14 du ST sont modifiés dans la mesure où une nouveauté est introduite, stipulant que la résiliation contractuelle effectuée à la demande de l’entreprise sera nulle concernant les femmes employées et pour une cause de grossesse, à compter de la date du début de la grossesse jusqu’au début de la période de suspension, dans ce cas jusqu’à l’accouchement, hormis s’il existe des raisons suffisantes qui ne sont pas liées à la grossesse ou à la maternité.

L’article 28 du ST introduit le concept de travail d’une valeur égale. Une même rémunération devra être perçue, payée directement ou indirectement, et quelle qu’en soit la nature, salariale ou extra-salariale, sans que ne puisse se produire aucune discrimination quelconque basée sur le sexe, concernant les éléments ou les conditions de cette rémunération. Il est important d’analyser cet article ayant été modifié étant donné qu’il comporte plusieurs références en termes de sanctions.

Le paragraphe 8 de l’article 34 du ST est modifié, lequel stipule désormais que les employés ont le droit de demander des adaptations de la durée et de la répartition de la journée de travail, dans l’organisation du temps de travail et le mode de réalisation du travail, y compris l’accomplissement de leur travail à distance en vue de rendre effectif leur droit à une conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle.

De telles adaptations devront être raisonnables et proportionnelles eu égard aux besoins de l’employé et aux besoins d’organisation et de production de l’entreprise. Cette demande peut être effectuée jusqu’à l’âge de 12 ans des enfants. Le tout sera accordé dans le cadre de la négociation collective ; à défaut, en cas de demande d’adaptation de la journée de travail, l’entreprise engagera une procédure de négociation avec l’employé durant une période maximum de 30 jours. À l’échéance de ce délai, l’entreprise informera par écrit l’acceptation ou non de la demande, proposera une solution alternative permettant de couvrir les besoins de conciliation de l’employé ou y opposera son refus. Dans ce dernier cas, l’entreprise devra expliquer les raisons objectives sur lesquelles est fondée sa décision.

En cas d’acceptation, l’employé aura le droit de demander de reprendre son ancienne journée de travail ou le contrat antérieur au terme de la période accordée ou lorsqu’un changement des circonstances le justifie, y compris si la période fixée à cet effet n’est pas arrivée à échéance. Le tout indépendamment des dispositions légales concernant les autorisations de réduction de la journée de travail pour cause de garde parentale prévue à l’article 37 du ST.

Tous les différends concernant cette adaptation et répartition de la journée de travail seront tranchés par la juridiction prud’homale, par le biais de la procédure prévue à l’article 139 de la loi régissant la juridiction prud’homale.

Le paragraphe 4 de l’article 37 est modifié, autorisant les deux parents, parents adoptants, parents d’accueil ou parents ayant la garde des enfants, à exercer le droit de s’occuper simultanément de l’enfant allaité durant une période allant jusqu’à ce que l’enfant atteigne les 12 mois, avec une réduction proportionnelle du salaire à compter du moment où l’enfant atteint les 9 mois.

La référence visée à l’article 37.3, paragraphe b), du ST, qui concernait le congé payé de 2 jours et dont bénéficiait le père est supprimée. À compter de la date de grossesse, le parent autre que la mère biologique pourra bénéficier de l‘allocation de paternité.

Ainsi, le congé de naissance et de soins de l’enfant accordé au parent autre que la mère biologique s’appliquera progressivement de 2019 à 2021. Par conséquent, cette autorisation sera de huit semaines en 2019, de douze semaines en 2020 et de seize semaines en 2021.

En tout état de cause, suite à la naissance de l’enfant, il devra obligatoirement profiter de 2 semaines en 2019, de 4 semaines en 2020 et de 6 semaines à compter de 2021.
La suspension du contrat de travail à l’issue des 6 premières semaines postérieures à l’accouchement pourra être exercée selon un régime de journée de travail à temps complet ou partiel, sur accord préalable des parties.

• Le paragraphe 4 de l’article 53, ainsi que le paragraphe c) de l’article 55.5 du ST sont modifiés, concernant la forme et les effets du licenciement pour causes objectives ou licenciement disciplinaire. Le délai commençant à courir à compter de la date de naissance est élargi, pour que le licenciement prononcé soit considéré comme nul, à moins que soit appréciée la cause du licenciement. Dans ce cas sont élargis les mois prévus pour que soient déclarés nuls les licenciements des femmes survenus après avoir réintégré leur poste de travail au terme des périodes de suspension du contrat pour cause de naissance, d’adoption, de garde parentale à des fins d’adoption ou d’accueil, conformément à l’article 45.1 d), à la condition que ne se soient pas écoulés plus de 12 mois (auparavant, 9 mois) à compter de la date de naissance, d’adoption ou de garde à fins d’adoption ou d’accueil.

3. Plusieurs articles de la loi générale sur la Sécurité Sociale sont modifiés de la manière suivante.

• La dénomination de l’allocation de maternité est modifiée, s’agissant désormais d’allocation pour cause de naissance et de soins de l’enfant.
• Le concept de paternité par corresponsabilité dans les soins de l’enfant allaitant est également modifié. L’allocation de paternité est désormais incluse dans la naissance et les soins de l’enfant en tant que situation protégée par le système de la Sécurité Sociale.
• La nouvelle situation protégée concerne la réduction de la journée de travail d’une demi-heure pour les soins de l’enfant allaitant à compter du moment où il atteint les 9 mois et jusqu’à ses 12 mois. Les mêmes conditions que celles fixées pour l’allocation de naissance et des soins de l’enfant seront requises (ancienne maternité).

Cette réglementation est entrée en vigueur le vendredi 8 mars 2019, à l’exception de la régulation des congés de la mère biologique et pour le parent autre que la mère biologique, et des dispositions régissant les bonifications des travailleurs indépendants qui entreront en vigueur le 1er avril 2019.

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