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Les nouveautés en matière de droit de la famille apportées par la loi du 23 mars 2019. Par Géraldine Azoulay, Avocat.
Parution : jeudi 6 juin 2019
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La loi de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice vise à offrir une justice plus accessible, plus rapide et plus efficace au service des justiciables.
Elle comprend un important volet civil modifiant notamment un certain nombre de dispositions en droit de la famille et des personnes. Elle permet notamment de faciliter l’exécution des décisions rendues par le Juge aux Affaires Familiales en offrant un panel de mesures (astreinte, amende, recours à la force publique..) et palie entre autre à une difficulté relative aux couples non mariés quant à l’attribution du domicile familial en présence d’enfant mineur.

I / La médiation.

L’article 3 de la loi du 23 mars 2019 développe le recours à la médiation.
Il prévoit notamment la possibilité pour le juge d’enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur qu’il désigne, à n’importe quel stade de la procédure, y compris en référé.
Il est également prévu que dans la décision statuant définitivement sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, une médiation pourra être ordonnée d’office par le juge avec l’accord des parties ou sur demande des parties.

II/ Le changement de régime matrimonial.

L’article 8 de la loi du 23 mars 2019 modifie l’article 1397 du Code civil.
Il supprime le délai minimum des deux ans après le mariage pour tout changement de régime matrimonial.
Il crée également un devoir d’information au profit du représentant du majeur protégé ou du mineur sous tutelle afin que celui-ci puisse exercer le droit d’opposition directement et sans autorisation du juge des tutelles ou du juge des tutelles des mineurs.
Enfin, le recours au juge pour l’homologation du changement de régime matrimonial en présence d’enfants mineurs est supprimé.

L’article 8 prévoit, dans les situations où le notaire identifie un risque pour les intérêts patrimoniaux d’un mineur, la possibilité pour ce dernier de saisir le juge des tutelles des mineurs sur le fondement de l’article 387-3 du code civil afin que celui-ci décide, le cas échéant, d’instaurer un contrôle renforcé er de soumettre le changement de régime matrimonial à son autorisation.

III/ Les majeurs protégés.

Les mesures relatives aux majeurs protégés sont modifiées.

L’article 9 de la loi du 23 mars 2019 supprime les autorisations préalables pour certains actes de nature patrimoniale notamment l’ouverture ou la clôture d’un compte bancaire ouvert au nom du majeur protégé dans sa banque habituelle, les autorisations aux fins de placements de fonds, la clôture d’un contrat pour la gestion de valeurs immobilières, la souscription de conventions aux fins d’organisation des obsèques du majeur, l’acceptation pure et simple d’une succession bénéficiaire…

L’article 9 modifie également l’article 459 du Code civil afin de préciser qu’en cas de tutelle à la personne et d’habilitation familiale, c’est la personne en charge de la protection ou la personne habilitée qui représente le majeur protégé y compris pour les actes portant gravement atteinte à l’intégrité corporelle. Sauf urgence, le juge ne sera plus saisi qu’en cas de désaccord entre le majeur et la personne en charge de sa protection.

Ces dispositions sont d’application immédiate y compris aux requêtes dont le juge a été saisies mais pour lesquelles il n’a pas encore statué.

L’article 10 de la loi de programmation 2019-2022 renforce l’autonomie de la volonté des majeurs protégés pour les actes personnels que sont le mariage, le PACS et le divorce.
A l’autorisation préalable du juge sera substitué un droit d’opposition élargi de la personne chargée de la mesure de protection si elle estime que l’acte est contraire aux intérêts du majeur.

Ces dispositions entrent directement en vigueur y compris lorsque le juge a déjà été saisi mais n’a pas encore statué sur la requête. Ces requêtes pourraient faire l’objet d’un non-lieu à statuer.

Les articles 11 et 109-IV de la loi du 23 mars 2019 interdisent de priver les majeurs sous tutelle de leur droit de vote et permet aux majeurs qui en ont été privés préalablement, d’être de nouveau titulaires de ce droit, et ce dès l’entrée en vigueur de la loi.

L’article 29 de la loi du 23 mars 2019 instaure une requête unique qui permettra au juge saisi d’une demande de protection de choisir la mesure la moins contraignante et la mieux adaptée à la situation personnelle du majeur.
La primauté est donnée au mandat de protection future.
L’habilitation familiale est élargie à l’assistance du majeur, lorsque les conditions sont réunies.

L’article 30 de la loi du 23 mars 2019 modifie et renforce l’organisation du contrôle des comptes de gestion des majeurs protégés.

L’article 503 du Code civil est modifié en ce que l’obligation d’inventaire qui pèse sur la personne chargée de la protection devra être remis dans les trois mois de l’ouverture de la mesure pour les biens corporels et dans les six mois pour les autres biens, accompagné du budget provisionnel.

IV/ Exécution des décisions en matière familiale.

L’article 31 de la loi du 23 mars 2019 offre un éventail de mesures destinées à favoriser l’exécution des décisions en matière familiale.
Ainsi l’article 31 de la loi précitée intègre aux articles 373-2, 373-2-6 et 373-2-10 du code civil, de nouvelles mesures telle que la médiation post -sentencielle, l’astreinte, l’amende civil et le recours à la force publique.

Ces mesures pourront également être appliquées aux conventions de divorce par consentement mutuel et aux conventions homologuées fixant les modalités d’exercice de l’autorité parentale.
- La médiation post sentencielle qui a pour objet de favoriser l’exécution amiable de la décision statuant sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale.
- L’astreinte est prévue dans l’article 373-2-6 du code civil. L’astreinte peut assortir tant la décision du juge aux affaires familiales qui l’ordonne qu’une décision antérieure (à la condition qu’elle soit nécessaire pour en favoriser l’exécution). L’astreinte peut donc faire l’objet d’une demande principale voir exclusive, après inexécution, ou d’une demande accessoire à une demande relative aux modalités d’exercice de l’autorité parentale et/ ou à la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant. Le régime de l’astreinte demeure soumis aux articles (L 131-2 à L 131-4 du code des procédures civiles d’exécution).
- L’amende civile est également prévue à l’article 373-2-6 du code civil. Il s’agit de sanctionner un parent qui fait délibérément obstacle de façon grave ou renouvelée à l’exécution d’une décision. La condamnation à une amende civile intervient nécessairement après inexécution et par conséquent dans une décision ultérieure.
- Recours à la force publique doit être exceptionnel et doit concerner la fixation de résidence de l’enfant ou le droit de visite et d’hébergement. Il faut qu’une démarche préalable ait échoué afin d’avoir recours à la force publique (médiation, l’un des dispositifs de sanction pécuniaire prévus dans l’article 373-2-6 du code civil, sommation faite par un huissier). Le recours à la force publique doit être prévue dans une décision.
En tout état de cause, le choix de recourir à la force publique relèvera du parquet.

Toutes ces dispositions sont d’application immédiates.

V/ Attribution de la jouissance provisoire du logement de la famille à un parent non marié.

L’article 373-2-9-1 du Code civil permet au juge aux affaires familiales d’attribuer provisoirement la jouissance du logement de la famille à un concubin ou à un partenaire de PACS en présence d’enfants.

La durée de l’attribution est provisoire et ne peut excéder 6 mois renouvelable que dans l’hypothèse ou les parents sont propriétaires indivis et que les conditions suivantes soient remplies :
- La demande doit être formée avant l’expiration du délai de 6 mois,
- Le tribunal compétent, qui doit être le juge aux affaires familiales de la résidence habituelle du défendeur, est saisi des opérations de liquidation partage concernant le bien.

Ces dispositions sont d’application immédiate.

Géraldine AZOULAY Avocat au Barreau de PARIS 24 rue de Penthièvre - 75008 PARIS [->http://www.avocat-azoulay.fr/]