Village de la Justice www.village-justice.com

La durée de travail : un douloureux casse-tête. Par Camille Vanneau, Avocate.
Parution : mardi 11 juin 2019
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/duree-travail-douloureux-casse-tete,31743.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

La durée de travail fait l’objet d’une règlementation complexe au sein de laquelle se confrontent une pluralité de notion pas toujours très claire pour le salarié, comme pour l’employeur : temps de travail effectif, période d’équivalence, astreinte, durée légale du temps de travail, durée maximale de temps de travail… il convient donc de faire un point sur ces notions afin de vous permettre d’y voir plus clair.

Tout d’abord, qu’est-ce que le temps de travail ?

La journée de travail d’un salarié, ne consiste pas exclusivement, et heureusement, en l’exercice de missions professionnelles, mais est également composé de temps de repos, d’un temps de restauration et parfois même de temps de trajet, de douche, de ou de formation.

Il convient donc de préciser ce qui constitue, ou non du temps de travail effectif afin de comprendre quelles sont les périodes exclues de la rémunération du salarié et de l’assiette de calcul de la durée légale puis maximale du temps de travail.

Le temps de travail effectif constitue, selon le code du travail « le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l’employeur et se conforme à ses directives, sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ».

Chaque période passée par le salarié à l’exercice de son activité professionnelle constitue donc, évidemment, du temps de travail effectif.

Les périodes d’inaction, inhérentes à certains emplois, peuvent également, selon les modalités prévues par la convention collective, être assimilées à du temps de travail effectif et ainsi ouvrir droit à une rémunération et entrer dans le calcul de la durée de travail du salarié.

Il en va également ainsi des périodes d’astreintes, qui peuvent être définies comme les périodes au cours desquelles le salarié, sans se trouver sur son lieu de travail ni être tenu exclusivement à la disposition de son employeur doit, à tout moment, pouvoir intervenir sur une mission professionnelle. Et, la durée de la période d’astreinte, au cours de laquelle le salarié peut être amené à intervenir professionnellement fait l’objet d’une contrepartie en temps de repos ou financière.

Les temps de pause ou de restauration sont également constitutifs d’un temps de travail effectif si le salarié se trouve, pendant ces périodes, à la disposition de son employeur sans pouvoir vaquer librement à ses occupations personnelles.

De la même manière, lorsque le salarié doit endosser une tenue de travail et que celle-ci doit être endossée et retirée sur son lieu de travail, ces temps d’habillage et de déshabillage sont constitutifs de temps de travail effectif.
En outre, les temps de formation du salarié dans le cadre d’un plan de formation seront assimilés à du temps de travail effectif. Il en ira encore comme telles des contreparties obligatoires en repos qui bénéficient aux salariés ayant accomplie plus de 220 heures supplémentaires dans l’année.

Qu’est-ce que la durée légale du temps de travail ?

La durée légale du temps de travail qui est fixée à 35 heures par semaine, ne constitue pas la durée de travail obligatoire, mais constitue le seuil au-delà duquel les heures supplémentaires sont déclenchées.

Le salarié peut donc être contraint de travailler moins ou plus de 35 heures par semaine, mais toutes les heures effectuées au-delà de ce seuil seront qualifiées d’heures supplémentaires.

Quel est le taux de majoration des heures supplémentaires ?

Toute heure de travail accomplie par le salarié au-delà de la 35e heure hebdomadaire sera qualifiée d’heures supplémentaires et fera l’objet d’une rémunération majorée. Et, le taux de majoration de ces heures supplémentaires, qui ne peut être fixé en dessous de 10% est déterminé par convention ou accord collectif.

À défaut, le taux légal devra être appliqué au salarié c’est-à-dire :
- 25% de la 36e heure à la 43e heure,
- 50% pour toutes les heures effectuées au-delà de la 43e heure.

Exemple : si le salarié accomplit 45 heures de travail et que son taux horaire est fixé à 9 euros de l’heure, ses 10 heures supplémentaires (de la 36e à la 45e heure de travail réalisée) feront l’objet d’une rémunération majorée calculée comme suit :

Pour les 8 premières heures supplémentaires (de la 36e à la 43e ) : 9 euros (taux horaire) + 25% (taux de majoration légal) = 11,25 (taux horaire majoré) x 8 (nombre d’heures supplémentaires) = 90 euros.

Pour les deux heures supplémentaires restantes (la 44 et 45e) : 9 (taux horaire de base) + 50% (taux de majoration) + 13.5 euros (taux horaire majoré) x 2 (nombre d’heures concernées) = 27 euros.

Les heures supplémentaires peuvent également, en lieu et place d’une rémunération majorée, faire l’objet d’un repos compensateur.

Elles ouvrent également droit, lorsqu’elle dépasse un certain seuil, à ne contrepartie obligatoire en temps de repos (en sus de leur rémunération majorée ou de leur repos compensateur).

Quelles sont les durées maximales du temps de travail ?

Les durées maximales du temps de travail sont les seuils au-delà desquels le salarié ne peut être contraint de travailler.

Tout d’abord, la durée de travail quotidienne maximale est fixée à 10 heures (8 heures pour les salariés de moins de 18 ans). Elle pourra toutefois être portée à 12 heures par accord d’entreprise ou d’établissement en cas d’activité temporairement accrue ou pour des motifs liés à l’organisation de l’entreprise. Elle pourra également être augmentée par l’employeur sous réserve de l’autorisation de l’inspecteur du travail ou en cas d’urgence liée à un surcroit temporaire d’activité.

Ensuite, la durée de travail maximale sur une même semaine est fixée à 48 heures (60 h avec autorisation de l’inspection du travail et après infirmation des représentants du personnel) et 44 heures par semaine en moyenne sur une période de 12 semaines consécutives (46 h avec l’accord de l’inspection du travail).

Une entreprise peut donc travailler selon un horaire hebdomadaire de 46 heures pendant 6 semaines et de 42 heures pendant 6 semaines sans avoir à solliciter de dérogation à la durée moyenne de 44 heures de travail effectif.

Le temps de travail peut-il être aménagé ?

Afin de permettre à l’entreprise de répondre aux particularités de son activité ou aux exigences du marché, le temps de travail des salariés peut faire l’objet d’aménagements et ainsi être réparti différemment selon les périodes de l’année.

La modulation du temps de travail permet ainsi, dans certaines circonstances, d’augmenter ou de diminuer le temps de travail du salarié, d’une semaine, d’un mois ou d’un trimestre, à l’autre.

L’horaire collectif de travail peut également faire l’objet d’aménagement à la demande du salarié (temps de travail à temps partiel, horaires individualisés…).

Des outils sont également mis en place afin de permettre de déroger à la durée légale du temps de travail et à la majoration des heures supplémentaires, tels que les conventions de forfait, en heures ou en jour.

Camille Vanneau Avocate au barreau de Paris [->https://www.cabinet-vanneau.fr/]