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Je suis convoqué(e) à un entretien préalable à un licenciement, que dois-je faire ? Par Aurélie Arnaud, Avocat.
Parution : jeudi 20 juin 2019
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L’employeur qui envisage de licencier un salarié doit le convoquer, avant toute décision, à un entretien au cours duquel il lui expose les motifs de cette mesure et recueille ses explications (article L 1232-2 du Code du travail).

Cet entretien est censé permettre au salarié de se justifier des reproches qui lui sont faits et ainsi d’éviter le licenciement envisagé à son encontre.

Cet entretien est obligatoire, même en période de suspension du contrat de travail (en cas d’arrêt maladie par exemple), et quels que soient l’effectif de l’entreprise, l’ancienneté du salarié, le motif du licenciement et la gravité de la faute reprochée au salarié.

1) Précisions préliminaires.

Cet entretien est nécessairement individuel (vous ne pouvez pas être convoqué à plusieurs) et préalable à toute décision [1].

Le non-respect de cette formalité constitue une irrégularité de procédure mais n’a pas pour effet de priver la rupture de cause réelle et sérieuse [2].

Ne peuvent pas remplacer l’entretien préalable la tenue de plusieurs entretiens informels entre l’employeur et le salarié [3], ou un entretien téléphonique [4].

Si le salarié n’est pas disponible le jour de l’entretien, il peut en demander le report. Néanmoins, l’employeur n’est pas tenu d’accepter [5].

2) L’assistance du salarié.

Il est vivement conseillé au salarié de se faire assister lors de l’entretien préalable.

La convocation doit toujours indiquer la faculté pour le salarié de se faire assister par une personne de son choix appartenant à l’entreprise ou par un représentant du personnel.

En l’absence d’institutions représentatives du personnel, le salarié peut se faire assister par un conseiller de son choix inscrit sur la liste départementale qu’il pourra consulter à la Mairie et à l’inspection du travail dont les adresses doivent être précisées sur la convocation.

Le salarié ne peut donc pas se faire assister par une personne autre et notamment par un avocat.

Il convient de se rapprocher au plus tôt de la personne qui vous assistera afin de s’assurer de sa disponibilité, lui décrire le contexte dans lequel intervient cette convocation et lui demander de prendre des notes pendant l’entretien pour qu’elle soit à même de rédiger un compte rendu écrit de l’entretien.

Bien que non prévue par la loi, l’assistance de l’employeur par un salarié de l’entreprise, un cadre par exemple [6], est permise [7]. Mais elle ne doit pas transformer l’entretien préalable en une enquête [8].

3) L’entretien en tant que tel.

Lors de l’entretien préalable, l’employeur indique au salarié les motifs de la décision envisagée et recueille ses explications. Il n’est pas tenu de lui communiquer les pièces susceptibles de justifier la sanction [9].

Lors de l’entretien, il convient tout d’abord d’écouter ce que l’employeur vous reproche et de solliciter éventuellement des précisions. Ensuite, il convient d’apporter ses explications et/ou contestations en étant très factuel en répondant point par point à ce qu’il vous est reproché.

4) Le compte-rendu écrit de l’entretien préalable.

S’il n’y a aucune obligation d’établir un compte-rendu écrit de l’entretien, le salarié a tout intérêt à disposer d’un tel compte-rendu notamment surtout s’il est licencié et qu’il souhaite contester son licenciement.

En effet, seul ce compte-rendu permettra d’avoir une trace des échanges entre l’employeur et le salarié et de figer les reproches formulés.

Les parties en présence sont libres d’accepter de rédiger et de signer un compte rendu de l’entretien permettant de constater le déroulement de celui-ci, les faits évoqués et les explications de chacun. Ce compte rendu peut, le cas échéant, être produit devant le juge prud’homal et constituer un élément de preuve s’il est signé par les deux parties (Circ. DRT 16 du 5-9-1991). Si l’une des parties ne l’a pas signé, les tribunaux peuvent refuser de lui reconnaître une force probante [10].

Mais, dans les faits il est très compliqué de pouvoir disposer d’un compte rendu écrit signé par tous.

Néanmoins, qu’il soit salarié de l’entreprise ou inscrit sur une liste, l’attestation établie par l’assistant du salarié à la suite de l’entretien est un élément de preuve recevable dont le juge doit apprécier la valeur et la portée [11].

Il convient donc de demander systématiquement à la personne qui vous a assisté(e) lors de l’entretien préalable un compte rendu écrit.

Aurélie ARNAUD Avocat à la Cour www.2a-avocat.com

[1Cass. soc. 26-11-1996 n° 95-41.081 ; 29-10-2003 n° 01-44.354.

[2Cass. soc. 29-10-2003 n° 01-44.354 F-D : RJS 1/04 n° 19 ; 11-9-2012 n° 11-20.371.

[3Cass. soc. 21-5-1992 n° 91-40.989.

[4Cass. soc. 14-11-1991 n° 90-44.195 D.

[5Cass. soc. 7-10-1997 n° 94-44.306 D ; 26-5-2004 n° 02-40.681.

[6Cass. soc. 26-2-1992 n° 88-44.441 P.

[7Cass. soc. 27-5-1998 n° 96-40.741.

[8Cass Soc 1-4-1997 n°95-42246.

[9Cass. soc. 18-2-2014 n° 12-17.557.

[10Cass. soc. 1-3-2000 n° 97-45.731 D.

[11Cass. soc. 27-3-2001 n° 98-44.666 FS-PBI : RJS 6/01 n° 732 ; 12-2-2002 n° 99-45.634 F-D : RJS 5/02 n° 549.