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Comptes non déclarés à l’étranger, comment régulariser sa situation auprès de l’administration fiscale ? Par Stéphane Draï, Avocat.
Parution : mardi 25 juin 2019
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Il existe une obligation pour toute personne résidant fiscalement en France de déclarer ses comptes bancaires à l’étranger. Par ailleurs, il existe une présomption d’imposabilité des sommes, titres ou valeurs transitant par un compte non déclaré détenu à l’étranger.
Cette présomption peut toutefois être renversée. Il vous est en effet possible d’y faire échec en apportant la preuve que les sommes transférées sur le ou les comptes non déclarés ne rentraient pas dans le champ d’application de l’impôt, en étaient exonérés ou enfin qu’il s’agit de revenus qui ont déjà étaient imposés.

Si vous ne pouvez prouver que ces sommes ont déjà été imposées ou n’avaient pas à être imposées, celles-ci seront imposées dans la catégorie des revenus d’origine indéterminée.

En outre, il existe une exception à l’obligation de déclaration des comptes détenus à l’étranger. Il faut pour cela que le compte soit destiné à l’achat en ligne ou à des encaissements afférents à des ventes de biens en ligne, dans la limite d’encaissements de 10.000 euros par an, et que le compte est adossé à un autre compte ouvert en France.

Dès lors que ces trois conditions sont réunies, l’obligation de déclaration est écartée.

La nécessité de lien entre le contribuable et le compte.

L’obligation de déclaration des comptes détenus à l’étranger ne concerne pas les comptes détenus au titre de sociétés étrangères sans lien avec un résident fiscal français. Ce sont les « sociétés offshore ».

En revanche, dès lors qu’un résident fiscal français détient un compte à l’étranger, il est dans l’obligation de le déclarer, et ce même s’il le détient dans un but purement professionnel.

Ainsi, le résident fiscal français qui détient un compte à l’étranger au titre d’une société étrangère est tenu de le déclarer.

La question de la conformité de cette obligation avec le droit de l’Union européenne, et notamment avec le principe de libre circulation des capitaux s’est posée. Cependant, le Conseil d’Etat – la plus haute juridiction administrative française – a estimé que les deux notions étaient compatibles.

L’obligation de déclaration va au-delà des comptes détenus et concerne tout compte ayant un lien avec le contribuable. En effet, elle concerne non seulement les comptes ouverts ou clos à l’étranger par un contribuable, mais également les comptes utilisés par celui-ci.

Pour être considéré comme utilisé, il suffit que le contribuable ait effectué une seule opération de crédit ou de débit pendant la période visée par la déclaration.

Par ailleurs, même si les sommes présentes sur les comptes non déclarés détenus à l’étranger ne sont imposables que dans un autre pays, en vertu d’une convention fiscale bilatérale par exemple, la déclaration reste obligatoire auprès de l’administration fiscale française.

A défaut de déclaration, plusieurs risques sont encourus.

Les risques en cas d’absence de déclaration des comptes détenus à l’étranger
En cas de régularisation de compte à l’étranger, le contribuable devra s’acquitter des impôts et intérêts de retard dus ainsi que d’une majoration pour manquement délibéré et d’une amende pour non-déclaration

Le paiement de l’impôt et des intérêts de retard.

Le paiement de l’impôt et des intérêts, qui s’élèvent à 0,40% par mois de retard, est dû de plein droit sans appréciation du comportement du contribuable. Les intérêts de retard ne constituent pas une sanction mais une réparation du préjudice subi par l’Etat du fait du non-respect par le contribuable de son obligation de déclaration et de paiement de l’impôt.

Du fait de l’absence totale d’appréciation de la bonne foi du contribuable, aucune remise n’est possible.

La majoration pour manquement délibéré.

La majoration pour manquement délibéré d’une déclaration fiscale dépend en revanche de la mauvaise foi du contribuable. Si celle-ci est caractérisée, elle entraîne une majoration de 40% des droits dus.

En revanche, dans le cadre d’une démarche spontanée de régularisation fiscale, cette majoration est réduite. Il faut alors distinguer entre les contribuables dits « passifs » des contribuables dits « actifs ».

Les contribuables passifs sont ceux qui ont obtenus les sommes dans le cadre d’une succession ou d’une donation, ou lorsqu’ils ne résidaient pas en France. Dans ces cas, le taux de majoration pour manquement délibéré est réduit à 15% des droits dus.

Les contribuables actifs sont ceux qui se trouvent dans toutes les autres situations. Le taux de majoration est alors ramené à 30%. Cela comprend notamment les résidents français qui apportent des fonds dans des comptes détenus à l’étranger.

L’amende pour non déclaration.

L’amende pour non-déclaration s’applique à chaque compte bancaire sur la période concernée par la régularisation, dans la limite de quatre ans suivant l’infraction.

Le montant de l’amende diffère selon le lieu du compte concerné. Lorsqu’il est situé dans un pays avec lequel la France a passé une convention visant à éviter l’évasion fiscale, l’amende s’élève à 1.500 euros par compte non déclaré.

A défaut de convention fiscale, l’amende est de 10.000 euros par compte non déclaré.

Par ailleurs, lorsque le total des soldes créditeurs des comptes non déclarés est supérieur ou égal à 50.000 euros au 31 décembre de l’année concernée, l’amende s’élève à 5% du solde créditeur du compte.

La répression pénale.

La régularisation de comptes est essentielle afin d’éviter des poursuites pénales. En effet, la dissimulation de comptes est considérée comme une fraude fiscale. Si l’administration fiscale découvre un comportement frauduleux, elle peut engager des poursuites pénales qui peut déboucher sur 500.000 euros d’amende et une peine de 5 ans d’emprisonnement pour l’auteur.

Ces peines peuvent être majorées à 3.000.000 d’euros et à 7 ans d’emprisonnement dans certains cas définis par l’article 1741 du Code Général des Impôts, dont l’infraction commise en bande organisée. Ainsi, les résidents fiscaux français sont tenus de déclarer leurs revenus et comptes à l’échelle mondiale, même si ces derniers ne sont pas imposables en France.

Dans l’éventualité où la déclaration des revenus et comptes détenus à l’étranger n’a pas été faite à temps. Il est tout de même nécessaire de procéder à une régularisation de comptes afin de se prémunir contre des poursuites pénales, et de pouvoir bénéficier des taux réduits de majoration pour manquement délibéré.

Maître Stéphane Draï