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Quels recours envisageables pour l’acheteur d’un véhicule ? Par Charlyves Salagnon, Avocat.
Parution : lundi 9 septembre 2019
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L’article à suivre précise ce que doit savoir l’acheteur d’une voiture qui veut engager la responsabilité du vendeur.

L’achat d’une voiture sur internet, que ce soit sur un site permettant l’achat de véhicules d’occasion, ou l’achat de véhicules neufs, donne lieu à de nombreux litiges, avec cette question pour l’acheteur mécontent, qu’il se pose en ces termes : Comment doit-il faire pour obtenir l’annulation de la vente et le remboursement du prix de la voiture achetée sur « le bon coin », ou tout autre site marchand ?
Pour répondre à cette question, il est nécessaire de déterminer la situation dans laquelle il se trouve, au regard, notamment des derniers enseignements apportés par la Cour de cassation à ce sujet dans ses arrêts du 9 mai 2019 et du 10 avril 2019.

(Cass. 1ère Civ., 9 mai 2019 n°18-15.706) / (Cass. 1e civ. 10 avril 2019 n° 18-13.747)

1. L’acheteur d’une voiture en ligne peut disposer d’un délai de rétractation.

Comme tout achat de bien en ligne, l’achat d’une voiture ouvre droit pour le consommateur à un délai de rétractation.

Le Code de la consommation autorise le particulier qui achète un véhicule auprès d’un professionnel à se rétracter si la vente est conclue en ligne.

De la même façon, le Code de la consommation autorise l’acheteur d’un véhicule, qui agit en qualité de consommateur, à annuler sa commande lorsqu’il finance son achat par un crédit affecté et qu’il renonce à son crédit dans un délai de 14 jours.

Attention, toutefois, ce délai de rétractation ne joue qu’aux deux conditions suivantes :
- L’acheteur est un consommateur,
- Le vendeur est un professionnel.

Ainsi, par exemple, l’achat d’un véhicule à un particulier sur un site internet proposant l’achat de voitures d’occasions ne permettra pas à l’acheteur de se prévaloir du délai de rétractation de 14 jours.

2. L’acheteur d’une voiture, même s’il ne dispose pas de délai de rétractation, dispose de garanties.

L’acheteur d’un véhicule (ce peut être une voiture, mais aussi une moto, ou tout autre engin, quelle qu’en soit la marque et le modèle) dispose de plusieurs types de garanties.

A. La Garantie commerciale.

La garantie commerciale est la garantie contractuelle qui a pu être convenue entre le vendeur du véhicule et l’acheteur du véhicule.

Cette garantie est très souvent proposée par les concessions automobiles et les vendeurs professionnels de véhicules, et est généralement payante.

Plus la garantie est longue, plus le prix d’achat sera augmenté.

Cette garantie peut comporter des restrictions et des limitations.

Il incombe dans ce cas, à l’acheteur d’actionner la garantie en invoquant le contrat et les conditions qui y sont attachées.

B. Garanties légales.

Outre les vices du consentement (Dol, erreur ou violence), peu usités en pratique, deux garanties, qui résultent de la loi, peuvent être principalement invoquées par l’acheteur d’une voiture qui souhaite que la vente soit annulée ou résolue.

Garantie des vices cachés :

L’article 1641 du Code civil dispose que :

« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. »

Cette garantie a vocation à s’appliquer autant lors de l’achat d’un véhicule entre un particulier et un professionnel, que lors de l’achat d’un véhicule d’un particulier à un particulier.

Son domaine est donc très vaste.

Il revient cependant à l’acheteur de prouver l’existence d’un vice caché sur le véhicule.

Le plus souvent, l’acheteur a, pour cela, recours à une expertise qui permettra de déterminer l’origine de la panne ou du dysfonctionnement.

Garantie de conformité :

L’article L211-7 du Code de la consommation dispose :

« Les défauts de conformité qui apparaissent dans un délai de vingt-quatre mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire.
Pour les biens vendus d’occasion, la durée mentionnée au premier alinéa du présent article est ramenée à six mois
Le vendeur peut combattre cette présomption si celle-ci n’est pas compatible avec la nature du bien ou le défaut de conformité invoqué. »

La garantie de conformité, qui ne sera applicable qu’entre un particulier et un professionnel sera, en pratique, plus simple à actionner que la garantie des vices cachés.

Et ce, en raison des présomptions édictés par le Code de la consommation, en vertu desquels les défauts de conformités qui apparaîtraient sur un véhicule dans un délai de 24 mois à partir de la délivrance du bien sont présumés exister au moment de la délivrance, sauf preuve contraire.

Pour les biens vendus d’occasion, la durée mentionnée au premier alinéa du présent article est ramenée à six mois.

Est-ce à dire que la garantie de conformité est la solution idéale pour l’acheteur d’un véhicule qui tombe en panne ?

Pas nécessairement, comme le rappelle la Cour de cassation dans deux récentes décision de Justice.

3. Quelles sont les garanties les plus efficaces pour l’acheteur d’une voiture ?

Bien choisir le fondement de sa demande :

(Cass. 1e civ. 10 avril 2019 n° 18-13.747)

Tout dépend du résultat souhaité par l’acheteur, qui peut aussi bien souhaiter la réparation du véhicule ou son remplacement, que l’anéantissement de la vente.

Or, la garantie de conformité permet au professionnel de choisir entre la réparation, le remplacement du bien. C’est seulement si ces remèdes sont impossibles à mettre en œuvre que l’annulation du contrat pourra intervenir.

Au contraire, la garantie des vices cachés n’ouvre pas cette possibilité au vendeur, et l’acheteur qui souhaite voir la vente résolue pourra obtenir, sans qu’il y lieu à retenir ou non une faute contre le vendeur, le remboursement du prix et la restitution du véhicule vicié.

A ce sujet, la Cour de cassation rappelle que le fondement de l’action doit être choisi et préparé avec soin.

En l’occurrence, un particulier achète une voiture d’occasion bénéficiant d’une garantie.
A la suite de dysfonctionnements de la voiture, il agit en résolution de la vente.

Cette demande est rejetée : l’acheteur avait refusé que le vendeur répare le véhicule à ses frais et se bornait à demander la résolution de la vente.

Il ne pouvait donc fonder donc sa demande que sur la garantie des vices cachés du Code civil, et non pas sur la garantie de conformité du Code de la consommation, de sorte qu’il ne pouvait pas prétendre à la présomption d’antériorité du défaut invoqué et qu’il devait prouver que le vice existait à la date de la vente.

(Cass. 1e civ. 10 avril 2019 n° 18-13.747)

Efficacité de la garantie invoquée :

Une fois le fondement choisi, la garantie pourra permettre à l’acheteur d’obtenir utilement le remboursement du prix, que l’action ait été invoquée dans le cadre de la garantie de conformité ou dans le cadre de la garantie des vices cachés.

Un exemple concret est donné par un récent arrêt de la Cour de cassation.

La garantie de conformité, imposée par la loi lors d’une vente à un consommateur, oblige le professionnel à livrer un bien conforme à ce qui était prévu ou conforme à ce qui doit être légitimement attendu, rappelle la Cour de cassation.

Et ce, peu important l’ancienneté du véhicule objet de la vente.

Elle applique ce principe pour un particulier qui avait acheté une voiture d’occasion ancienne, ayant déjà parcouru plus de 200.000 kilomètres depuis 10 ans.

La voiture étant tombée en panne un mois après l’achat, le garagiste faisait valoir qu’il ne fallait pas s’attendre à un parfait fonctionnement compte tenu de l’âge de la voiture, du chemin qu’elle avait parcouru et de l’usure normale qui en résultait.

Les premiers juges de l’affaire avaient approuvé ce raisonnement.

La Cour de cassation, en revanche, leur a donné tort, et a cassé la décision.

Lorsqu’un bien est vendu à un consommateur, les défauts de conformité qui surviennent dans les six mois sont présumés avoir existé au moment de la vente et le vendeur professionnel doit en répondre.

Le fait que la voiture a déjà parcouru une telle distance est sans influence sur l’engagement du vendeur

Il s’est en effet engagé à vendre une voiture en état d’être normalement utilisée, selon la Cour.

Charlyves SALAGNON, Avocat Associé, Cabinet BRG (Nantes-Paris)
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