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Grève du 5 décembre 2019 : salariés, cadres, cadres dirigeants, quels sont vos droits ? Par Frédéric Chhum, Avocat et Claire Chardès.
Parution : jeudi 5 décembre 2019
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Le mouvement du 5 décembre 2019, ayant possiblement vocation à s’étendre sur les jours suivants, va nécessairement avoir des conséquences sur les salariés. Que ces derniers soient grévistes ou non, ils ont des droits.

1) Pour les salariés qui feront grève.

Le droit de grève est un droit constitutionnellement prévu par le Préambule de la Constitution de 1946 [1]. Les salariés qui l’exercent bénéficient d’une protection. La notion de grève est toutefois précisément encadrée par les juges.

1.1.) Quelle protection est conférée par le droit de grève ?

Si le Code du travail est plutôt taiseux en matière de grève, il prévoit tout de même en son article L. 2511-1 [2] que le salarié gréviste est protégé contre :
- La rupture de de travail (sauf en cas de faute lourde de sa part) ;
- Les mesures discriminatoires (en matière d’avantages sociaux et de rémunération, notamment).

Cependant, pour bénéficier de ces protections, il faut remplir les conditions qui caractérisent l’exercice du droit de grève.

1.2) A quelles conditions un gréviste est protégé ?

1.2.1) La cessation du travail doit être collective au sein de l’entreprise.

La première exception à cette règle concerne le cas des entreprises qui n’emploient qu’un seul et unique salarié. Ce dernier sera autorisé à faire grève. [3] L’autre cas de dérogation concerne le salarié qui, même s’il est seul à faire grève au sein de son entreprise, participe à un mouvement de grève national qui soutient des revendications professionnelles. [4]

1.2.2) Les revendications défendues sont d’ordre professionnel.

Les grèves purement politiques, protestant contre les politiques gouvernementales, sont fermement interdites.

En revanche, le ralliement à un mouvement national est possible à condition que les revendications qui y sont portées concernent directement les travailleurs salariés.
Par exemple, lorsque la cessation du travail a « pour but d’obtenir la renégociation du projet gouvernemental de réforme de retraites », elle est considérée comme entrant dans le champ d’application du droit de grève. [5]

2) Pour les salariés qui vont travailler.

En principe, le contrat de travail se poursuit normalement : le salarié est à la disposition de son employeur et l’employeur fournit du travail à son salarié et le rémunère.
En pratique, plusieurs obstacles peuvent venir perturber l’exécution normale des relations de travail.
Que ce soit à l’initiative du salarié ou de son employeur, plusieurs solutions sont généralement envisagées.

2.1) Comment avoir recours au télétravail ?

Le télétravail doit être mis en place au sein de l’entreprise par accord collectif ou bien par une charte.

A défaut, l’employeur et le salarié peuvent se mettre d’accord sur le recours à ce mode d’organisation du travail [6]

Lorsque, dans le premier cas, le télétravail est prévu par accord collectif ou par une charte, l’employeur peut refuser mais il doit motiver sa décision.

En définitive, télétravail peut être une solution qu’il est possible de suggérer à l’entreprise.

Depuis les ordonnances de septembre 2017, le télétravail est quasiment un droit lorsqu’il est occasionnel.

S’il veut le refuser, l’employeur doit en effet le justifier, en démontrant que le travail à distance perturbe la bonne marche de l’entreprise.

2.2) L’employeur peut-il demander au salarié d’effectuer des heures supplémentaires pour faire face aux absences d’autres salariés ?

L’employeur peut exiger de ses salariés non-grévistes qu’ils effectuent des heures supplémentaires pour faire face à l’absence d’autres salariés.

En effet, les heures supplémentaires sont effectuées à la demande de l’employeur uniquement.

N’étant pas considéré comme une modification du contrat de travail, le salarié ne peut s’opposer à cette demande de l’employeur, sous réserve toutefois que cette demande respecte le contingent d’heures supplémentaires autorisée. [7]

2.3) Comment gérer les absences et les retards ?

Le salarié non-gréviste qui ne peut pas se rendre sur son lieu de travail ou qui sera en retard à cause d’un mouvement de grève doit avertir par tout moyen (SMS, e-mail, LRAR) son employeur, conformément aux dispositions classiques du règlement intérieur en vigueur dans l’entreprise par exemple.

En fournissant un justificatif, ou pour le moins, en informant son employeur, le salarié peut s’éviter le risque de sanction disciplinaire à son encontre.

Frédéric Chhum avocat et ancien membre du Conseil de l\'ordre des avocats de Paris (mandat 2019 -2021) CHHUM AVOCATS (Paris, Nantes, Lille) [->chhum@chhum-avocats.com] www.chhum-avocats.fr http://twitter.com/#!/fchhum