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Elections municipales 2020 : les modifications apportées par le décret n° 2019-1494 du 27 décembre 2019. Par Valérie Farrugia, Avocat.
Parution : jeudi 2 janvier 2020
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A moins de trois mois du prochain scrutin municipal de mars 2020, le décret n° 2019-1494 du 27 décembre 2019 est venu modifier certaines stipulations du code électoral qui concernent notamment les règles applicables aux élections municipales.

Le décret n° 2019-1494 du 27 décembre 2019 [1] entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2020 [2] contrairement aux dispositions des lois n° 2019-1268 et 2019-1269 du 2 décembre 2019 qui, pour l’essentiel d’entre-elles, ne s’appliqueront qu’à partir du 30 juin 2020 [3].

Ainsi que cela sera exposé, ci-dessous, il n’y a pas de bouleversement du régime jusque-là applicable.

Il est, toutefois, important d’identifier les modifications apportées par ce décret qui a été signé postérieurement à la mise en ligne par le gouvernement des guides des élections municipales et communautaires des 15 et 22 mars 2020 pour les communes de moins de 1.000 habitants et de 1.000 habitants ou plus.

1. La qualité d’électeur : gérant ou d’associé majoritaire ou unique d’une société figurant au rôle des contributions directes communales pour la deuxième fois sans interruption sans interruption l’année de la demande d’inscription (art. 11-2°bis du code électoral).

La loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales a introduit une nouvelle possibilité pour être inscrit sur les listes électorales d’une commune.
A savoir, les personnes :

« qui, sans figurer au rôle d’une des contributions directes communales, ont, pour la deuxième fois sans interruption l’année de la demande d’inscription, la qualité de gérant ou d’associé majoritaire ou unique d’une société figurant au rôle » (art. 11-2°bis du code électoral).

Le décret n° 2018-350 du 14 mai 2018 portant application de la loi précitée a créé, au sein du code électoral, un article R. 6 selon lequel « pour l’application du 2° bis du I de l’article L. 11, la qualité de gérant ou d’associé majoritaire ou unique d’une société figurant au rôle est établie par les pièces prévues par arrêté du ministre de l’intérieur ».

A cet effet, l’article 7 de l’arrêté du 16 novembre 2018 est venu préciser que :

« Les personnes qui déposent une demande d’inscription au titre de l’article R. 6 du code électoral fournissent les pièces suivantes pour justifier de leur attache avec la commune :
1° Pour la qualité de gérant : un extrait ou la décision de nomination, une copie de la décision de nomination retranscrite sur le registre des décisions d’assemblée générale de la société ou même les statuts de la société ;
2° Pour la qualité d’associé majoritaire ou unique d’une société à responsabilité limitée, d’une société en nom collectif, d’une société en commandite simple, d’une société civile : une copie des statuts constitutifs de la société ou des statuts mis à jour ou une copie de l’acte de cession de parts ;
3° Pour la qualité d’associé majoritaire ou unique d’une société anonyme, d’une société en commandite par actions, d’une société par action simplifié : une attestation délivrée par la société dont il détient des parts ou actions ou qu’il dirige.
Ces pièces sont accompagnées d’une attestation sur l’honneur de la continuité de cette qualité sur deux ans au moins et de tout document justifiant de l’inscription de la société concernée au rôle de la commune
 ».

Le décret du 27 décembre 2019 vient ajouter une nouvelle phrase à l’article R. 6 qui précise que les pièces exigées par l’arrêté du 16 novembre 2018 ont pour objet d’établir :
- d’une part, que la société figure au rôle d’une des contributions directes communales pour la deuxième fois sans interruption l’année de la demande d’inscription ;
- d’autre part, que l’électeur a pour la deuxième fois sans interruption l’année de la demande d’inscription, la qualité de gérant ou d’associé majoritaire ou unique de cette société.

Cet article précise donc clairement qu’il s’agit de deux conditions cumulatives induites par la formulation retenue par l’article L. 11-2°bis du Code électoral.

Gageons que ces dispositions introduites par loi du 1er août 2016 vont être soumises à l’appréciation du juge électoral dans le cadre des protestations électorales qui seront formées après les prochaines élections municipales.

2. Contestation d’une décision d’inscription ou de radiation d’une liste électorale.

L’électeur intéressé forme son recours auprès du greffe du tribunal d’instance compétent, devenu le tribunal judiciaire depuis le 1er janvier 2020.
Le préfet est également tenu informé de cette procédure.

Si la décision ne n’est pas satisfaisante pour le demandeur, il peut saisir, dans les dix jours, la Cour de cassation.

Ce recours était également « ouvert dans tous les cas au préfet » (art. 19-1 du Code électoral). Le décret du 27 novembre 2019 supprime cette faculté offerte au préfet sans réserve.

3. Carte d’électeur et cérémonie de citoyenneté.

Le lieu de naissance n’a plus à être mentionné sur la carte d’électeur (art. R. 23) et cette dernière n’a plus à être distribuée au plus tard le 30 avril les années sans scrutin (art. R. 25).

La cérémonie de citoyenneté au cours de laquelle les nouveaux majeurs se voit remettre leur carte d’électeur n’a plus à être organisée dans un délai de 3 mois à compter du 1er janvier de chaque année. Le décret ajoute une nouvelle interdiction, à savoir que cette cérémonie ne peut pas être organisée pendant la campagne électorale d’un scrutin (art. R. 24).

Pour les prochaines municipales, la campagne électorale du premier tour débutera le lundi 2 mars prochain à zéro heure et s’achèvera le samedi 14 mars à minuit. Pour le second tour, elle commencera le lundi 16 mars à zéro heure et s’achèvera le samedi 21 mars à minuit.

4. Métropole de Lyon.

L’article R. 25-3 prévoyait que pour l’application de la partie réglementaire du Code électoral relative aux élections législatives, départementales, municipales, communautaires, régionales et de la Métropole de Lyon, cette dernière devait être assimilée à un département.

Cet article est abrogé.

5. Contenu des affiches et circulaires.

Le nouvel article R. 27 est venu préciser que la combinaison des trois couleurs bleu, blanc, rouge est interdite uniquement lorsqu’elle est de nature à entretenir la confusion avec l’emblème national.

Il s’agit de la reprise des principes énoncés par la juge électoral lorsqu’il était saisi d’une telle critique (CE, 3 décembre 2014, Elec. Muni. Brié-et-Angonnes, req. n° 382696).

Certaines commissions de propagande avaient d’ailleurs parfois tendance à émettre des avis assez surprenants sur les affiches et circulaires qu’elles avaient à examiner en combinant notamment les couleurs présentes sur les tenues vestimentaires des candidats

6. Rôle de la commission de propagande dans la distribution des bulletins de vote.

L’article R. 34 prévoyait que lorsqu’un candidat ou une liste remettait à la commission moins de circulaires ou de bulletins de vote que les quantités réglementaires prévues sans préciser les conditions de répartition entre les électeurs ou lorsque la commission le décidait, les bulletins de vote étaient distribués dans les bureaux de vote en proportion du nombre d’électeurs inscrits.

Le décret du 27 décembre 2019 prévoit désormais que la distribution dans les bureaux de vote se fait à l’appréciation de la commission en tenant compte du nombre d’électeurs inscrits.

7. Délégué habilité à contrôler les opérations électorales.

Le nouvel article R. 47 du Code électoral vient préciser que chaque, candidat, binôme ou liste ne peut désigner qu’un seul délégué par bureau de vote.

Le mémento à l’usage des candidats pour les élections municipales de 2014 précisait déjà que « chaque liste peut désigner un délégué par bureau de vote ou pour plusieurs bureaux de vote ».

Le mémento pour les élections de 2020 est silencieux sur cette question. Désormais l’article R. 47 du code électoral l’impose clairement.

8. Affichage obligatoire à l’entrée des mairies pendant la période électorale et le jour du scrutin à l’entrée des bureaux de vote.

L’article R. 56 est revu. Il distingue le contenu des textes devant être affichés à l’entrée des mairies pendant la période électorale et à l’entrée des bureaux de vote le jour du scrutin et il ajoute de nouveaux articles qui doivent figurer sur cet affichage.

Désormais sont affichés, à l’entrée de chaque mairie, pendant la période électorale les textes suivants : articles L. 9 à L. 11, L. 20, L. 30, L. 86 à L. 88, L. 93 du code électoral.

A l’entrée de chaque bureau de vote, le jour du scrutin, sont affichés les textes suivants : articles L. 57-1, L. 59 à L. 66, L. 98, L. 113, L. 116, L. 117 al. 1er, R. 63 à R. 65, R. 66-1 et R. 67 du même code.

9. Bulletins nuls.

Le nouvel article R. 66-2 du Code électoral reprend, bien évidemment, la nullité des bulletins ne répondant pas aux prescriptions légales ou réglementaires.

Toutefois, il introduit une dérogation en ce qui concerne la prescription relative au grammage. Le bulletin ne sera pas nul si le grammage est compris entre 60 à 80 grammes.

10. Poursuites à l’encontre de l’imprimeur.

Le décret du 27 décembre 2019 supprime l’article R. 95 du Code électoral et donc l’infraction de 4ème classe qui était prévue pour un imprimeur éditant des affiches et circulaires méconnaissant les stipulations de l’article R. 27.

11. Conseils municipaux des communes de moins de 1.000 habitants.

Il est inséré une section 1 « mode de scrutin » rédigé comme suit « néant ». Cette devient la section 1bis « déclaration de candidature » et reprend l’article R. 124 existant du code électoral.

Sont insérées deux sections : section 2 « propagande » et section 3 « opérations préparatoires » qui sont toutes les deux rédigées comme suit : « néant ».

La section 2 actuelle « opérations de vote » devient donc la section 4 et comprend les articles R. 126 à R. 127 dans leur rédaction actuelle.

Une section 5 « remplacement des conseiller municipaux est introduites » et est rédigée comme suit : « néant ».

12. Attestation d’inscription sur la liste électorale.

Les articles R. 128 et R. 128-1 du Code électoral concernent les pièces devant être jointes à la déclaration de candidature. Y figure l’attestation d’inscription sur la liste électorale qui devait, jusqu’au présent décret, comporter les mentions prévues aux articles L. 18 et 19 du code électoral.

Désormais, à partir du 1er janvier 2020, la référence à ces deux articles est supprimée et il est prévu que l’attestation électorale devra comprendre « les nom, prénoms, date de naissance, sexe et lieu de vote de l’intéressé » que le candidat soit électeur dans la commune où il se présente ou dans une autre.

Par ailleurs, ces nouveaux articles prévoient expressément que l’attestation pourra également être délivrée par téléprocédure ainsi que cela est prévu par le décret n° 2018-343 du 9 mai 2018 portant création du traitement automatisé de données à caractère personnel permettant la gestion du répertoire électoral unique pris en application des dispositions du I de l’article 2 et de l’article 7 de la loi n° 2016-1048 du 1er août 2016 rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales.

13. Attestation électorale pour l’élection des conseillers municipaux en Nouvelle Calédonie.

Un article 266 est réintroduit selon lequel :

« Pour l’application des articles R. 128 et R. 128-1 à l’élection des conseillers municipaux en Nouvelle-Calédonie, les mots : “ou générée par la télé-procédure mentionnée à l’article 5 du décret n° 2018-343 du 9 mai 2018” sont remplacés par les mots : “ou, le cas échéant, générée par une télé-procédure permettant l’accès, par le candidat ou le remplaçant, aux données et informations relatives à sa situation électorale”. »

Le décret modifie également des articles du Code électoral qui concernent notamment les élections législatives, sénatoriales ou européennes mais qui ne sont pas recensés dans la présente note puisque le prochain scrutin est municipal et communautaire.

Les élections municipales approchant, pour plus de sécurité juridique, espérons que les modifications du Code électoral en restent là jusqu’à fin mars 2020.

Valérie FARRUGIA - Avocat à la Cour vf@valeriefarrugia-avocats.com https://valeriefarrugia-avocats.com/

[1Décret n° 2019-1494 du 27 décembre 2019 portant diverses modifications du code électoral et du décret n° 79-160 du 28 février 1979 portant application de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen.

[2A l’exception de certaines dispositions de l’article 4 du décret qui concernent les élections sénatoriales.

[3Entrée en vigueur immédiate de l’art. 6 de loi n° 2019-1269 qui modifie notamment l’article L. 231 en faisant passer d’un an à deux ans le délai d’inéligibilité des sous-préfets, des secrétaires généraux de préfecture et des directeurs de cabinet de préfet lorsqu’ils veulent se présenter dans une circonscription électorale relevant du ressort où ils ont exercé. De même, ces délais leur sont opposables même s’ils ont admis à faire valoir leurs droits à la retraite au jour de l’élection.

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