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[Lille] 1er Legaltech Tour : Soft skills, juriste augmenté et découvertes de legaltech.
Parution : mercredi 5 février 2020
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La première édition du LegalTech Tour a eu lieu 10 décembre 2019 sur le campus lillois de l’EDHEC Business School.
Cet événément co-organisé par un groupe de Legaltech (BlockchainyourIP, Call A Lawyer, Case Law Analytics, easyQuorum, Gino LegalTech et Paprwork) et le centre de recherche LegalEDHEC, avec le soutien de l’AFJE, Day One et des médias Lextenso et Village de la Justice, a réuni un large panel de professionnels du droit : étudiants, professeurs, consultants, avocats, notaires, juristes, directeurs juridiques et représentants de legaltech.

Voici le compte-rendu de la conférence rédigé par Paul Leconte et Pierre Aussant, étudiants en Master 1 Business Law & Management de l’EDHEC Business School et de la Faculté de droit de l’Université Catholique de Lille, et les articles des ateliers rédigés par chaque groupe d’étudiants.

Dans la première partie de l’après-midi, de 14H00 à 17H00, la cinquantaine d’étudiants M1 de la Filière Business Law & Management - alliance entre l’EDHEC et la Faculté Libre de Droit de l’Université Catholique de Lille - se sont répartis en 6 groupes. Chaque legaltech animait un atelier avec l’objectif de familiariser les étudiants à leur solution digitale ou de les faire travailler sur un cas pratique. Les retours d’expérience de chaque atelier rédigés par les étudiants eux-mêmes sont publiés ci-après.

A la fin de ces ateliers, Christophe Roquilly, professeur à l’EDHEC et directeur de LegalEDHEC, a introduit vers 18h00 la conférence « LegalTech : Quel ROI pour les clients ? » en présentant les résultats d’une enquête menée par LegalEDHEC en partenariat avec l’AFJE dans le cadre du projet ALLL : Advanced Law, Lawyering and Legal Transformation.

Cette initiative a pour objectif d’apporter des solutions aux problématiques auxquelles sont actuellement confrontés les différents acteurs du marché du droit. On retiendra que dans un monde dit « VUCA » (Volatile, Uncertain, Complex, Ambiguous) et bouleversé par la transformation digitale, le juriste doit savoir faire preuve d’une combinaison de talents, de compétences et d’intelligences.

Cette étude est basée sur 150 compétences-clés du Juriste Augmenté, identifiée par LegalEDHEC, qui peuvent aider ce juriste à favoriser son employabilité ou encore son évolution de carrière. Les 100 « leaders du droit » interrogés ont ainsi déclaré qu’ils attendaient de leurs futurs collaborateurs non seulement une intelligence individuelle, une expertise juridique, mais aussi une intelligence collective. Celle-ci devrait reposer sur des compétences comportementales – des « softs skills » – mais aussi sur des compétences business et digitales. En somme, le Juriste Augmenté serait celui qui serait capable d’utiliser le droit comme un instrument créateur de solutions alignées avec les besoins stratégiques de ses clients, avec lesquels il saurait entretenir de bonnes interactions, et qui ferait preuve d’une ouverture suffisante aux nouveaux outils technologiques pour être un acteur-clé de cette transformation digitale.

Christophe Roquilly a fait également part de sa volonté de partager cette étude et d’impliquer d’autres acteurs de l’écosystème afin de créer un référentiel de compétences dynamiques, assorti d’une plateforme d’auto-évaluation. Il souhaite que les directions juridiques d’entreprises et cabinets d’avocats se basent sur ce référentiel, l’enrichissent et l’adaptent. Enfin, les résultats présentés viendront alimenter un dispositif de certification délivrée par l’EDHEC Business School, ainsi qu’un service de talent management.

Après cette introduction, la conférence animée par Olivier Chaduteau, fondateur et associé-gérant de Day One - cabinet de conseil en management spécialisé sur les métiers du Juridique et de la Compliance - a donné successivement la parole à chaque représentant de legaltech pour une rapide présentation de leur société :
- BlockchainyourIP propose une solution de protection des créations et des innovations par la technologie blockchain-bitcoin qui vise à révolutionner la façon dont les entreprises protègent leurs actifs incorporels non-enregistrés (droit d’auteur, savoir-faire, secret d’affaire...).
- Call A Lawyer a lancé la première plateforme de mise en relation de clients avec les avocats adaptés pour une consultation rapide et sans rendez-vous par téléphone.
- Case Law Analytics propose aux professionnels du droit des solutions de quantification du risque contentieux fondées sur une modélisation du processus de décision judiciaire par des moteurs d’intelligence artificielle et l’analyse d’une large base de jurisprudence.
- easyQuorum propose aux juristes et avocats un logiciel de gestion des assemblées générales et conseils d’administration dans le but de réduire les tâches rébarbatives et sans valeur ajoutée, et d’augmenter la productivité.
- Gino LegalTech a conçu une plateforme de robotisation et de gestion de contrats qui permet aux juristes de créer intuitivement, sans connaissance de code informatique, un robot rédacteur d’acte qui questionne l’utilisateur et produit automatiquement l’acte correspondant.
- Paprwork a développé une solution permettant aux professionnels du droit de bénéficier d’un espace numérique de collecte et d’échange documentaire sécurisé et automatisé.

Chacune de ces legaltech est née du constat que le marché du droit connaissait un changement de paradigme, à savoir que les professionnels du droit étaient en attente de nouveaux outils et services innovants avec de nouveaux business model associés.
La conférence a été conçue autour de 4 thématiques. Les représentants des legaltech ont été invités à répondre aux questions suivantes :

A quels besoins couverts ou non couverts les legaltech répondent-elles ? (BtoB ou BtoC)

Les intervenants s’accordent à dire que les legaltech visent à répondre au désir du juriste de gagner du temps, en particulier sur toutes les tâches chronophages et à faible valeur ajoutée. En se libérant de ces tâches rébarbatives ou peu créatives, le juriste peut alors exercer son activité de manière plus performante et entretenir une relation plus “client centric”, comme l’explique Maxime Roussel, co-fondateur de Paprwork. Pour William Fauchoux, cofondateur de BlockchainyourIP, il était également nécessaire d’assurer la protection des droits de propriété intellectuelle non enregistrés, d’une manière qui simplifie la preuve et la procédure de dépôt des dossiers. Call A Lawyer, représenté par son co-fondateur, François Pekly, souhaitait pour sa part favoriser l’accès au conseil juridique et à l’avocat, dans un souci d’éthique et de qualité de recommandations. Selon Galahad Delmas, Juriste Chercheur de Case Law Analytics, il s’agissait de modéliser l’aléa juridique en anticipant et simulant des arrêts afin de soutenir la prise de décision et la stratégie de conseil juridique.

Quelles sont les conditions nécessaires au développement des legaltech ?

Au-delà de la condition essentielle du financement, les legaltech représentées sont unanimes sur la nécessité de prouver aux juristes et/ou opérationnels qu’elles proposent une forte valeur ajoutée : gain de temps, sécurité juridique, capitalisation du savoir-faire, etc. Selon Maxime Roussel, co-fondateur de Paprwork, et Antoine Micaud, fondateur d’easyQuorum, le POC (preuve de concept) ou la Phase Pilote d’une durée limitée (3 à 4 mois) sont un bon moyen pour les clients, avec une prise de risque maîtrisée, de tester ces nouveaux outils ou services innovants et de signer par la suite des partenariats. Sans se confronter rapidement au marché et le soutien de premiers “early adopters” - cabinets d’avocats ou directions juridiques pour constituer de premières références - il est très dur pour les jeunes pousses de se développer et de pérenniser l’activité. Cyril de Villeneuve, directeur général de Gino LegalTech, souligne que les legaltech qui se développent rapidement sont celles qui ont su mettre à disposition du marché des outils intuitifs et faciles à prendre en main, associés à une vraie méthodologie d’accompagnement à court et moyen terme.

Quels sont les indicateurs de performance ou gains dans l’utilisation des legaltech ?

Pour recueillir des feedbacks précieux sur leurs solutions, les legaltech s’intéressent à différents critères objectifs et/ou subjectifs. BlockchainyourIP est particulièrement attentif à l’évolution du nombre d’utilisateurs par mois ; Call A Lawyer se fie à un système d’évaluation des avocats partenaires par les clients de 0 à 5 étoiles. D’autres acteurs tels que Gino LegalTech et easyQuorum attachent beaucoup d’importance à ce que leurs clients s’approprient très rapidement l’outil et évoluent dans leurs habitudes, en sus du suivi périodique d’indicateurs statistiques (exemple : nombre de contrats générés sur une période, temps de production, etc…)

Quelle est la place accordée aux professionnels auxquels sont destinées les legaltech ?

Les représentants des legaltechs présentes ont rappelé l’importance d’associer les juristes en amont du processus de développement. La communication de Gino LegalTech met justement en avant le fait que sa technologie a été pensée par un avocat, Philippe Ginestié, en capitalisant sur sa propre expérience personnelle. Tous sont unanimes sur le fait que les professionnels du droit (avocat, juriste, chercheur, professeur, clients…) doivent être impliqués dans la conception, mais aussi dans l’évolution et la diffusion de ces solutions. Les partenariats liés avec les Barreaux, les cabinets d’avocats renommés et les directions juridiques sont au cœur de la stratégie des legaltech, qui y trouvent un moyen de faire leurs preuves, de bénéficier de recommandations pointues, mais aussi de s’assurer une certaine visibilité.

Les articles de présentation des legaltech Call A Lawyer, Case Law Analytics, easyQuorum, BlockchainYourIP, Gino LegalTech et Paprwork :

Atelier BlockchainYourIP : Protéger créations et innovations
Par Dimitri Colin, Hugo Duport, Clément Duriez, Martin Machu, Paul Sauvage, Antoine Sebe, Grégoire Verprat, Antonin Yvon, étudiants en Master 1 au sein de la Filière Business Law and Management (EDHEC Business School et Faculté de droit de l’Université Catholique de Lille)
Atelier Call A Lawyer : Consommer le droit différemment
Par Guillaume Bazaille, Marie Gosset, Louis Lafon, Elsa Tritz, étudiants en Master 1 au sein de la Filière Business Law and Management (EDHEC Business School et Faculté de droit de l’Université Catholique de Lille)
Atelier Case Law Analytics : Quantifier le risque contentieux
Par Ernest Arminjon, Chloé Bruyere, Florine Decq, Laura Finger, Romane Galoin, Marine Houdre, Souhadd K’haboré, Erik Stenqvist, étudiants en Master 1 au sein de la Filière Business Law and Management (EDHEC Business School et Faculté de droit de l’Université Catholique de Lille)
Atelier easyQuorum : Automatiser la production de documents corporate
Par Inès Chopin, Béatrice Croise, Marie-Victoire de Negri, Cassandre Garcia, Léopoldine Hua, étudiantes en Master 1 au sein de la Filière Business Law and Management (EDHEC Business School et Faculté de droit de l’Université Catholique de Lille)
Atelier Gino LegalTech : Robotiser un accord de confidentialité
Par Pierre Aussant, Elie Blanc, Camille Brudenne, Louise Cayrel, Séréna Lavignolle, Paul Leconte, Sophie Serdet, Adèle Simonnot, étudiants en Master 1 au sein de la Filière Business Law and Management (EDHEC Business School et Faculté de droit de l’Université Catholique de Lille)
Atelier Paprwork : Ma start-up se fait racheter par Google !
Par Juliane Cat, Marie Cousin, Hugues-Antoine Ferlet, Eva Lee, Perrine Maillet, Lisa Moral, Maïa Rideau, Garance Saint Pol, Julien Simonnet, étudiante en Master 1 au sein de la Filière Business Law and Management (EDHEC Business School et Faculté de droit de l’Université Catholique de Lille)
Rédaction du village