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Conférence des Bâtonniers, nouvelle manifestation de l’unité des avocats contre le Gouvernement.
Parution : lundi 3 février 2020
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Le vendredi 31 janvier 2020, à l’hôtel Westin à Paris, se tenait l’Assemblée générale annuelle des bâtonniers. En pleine contestation de la réforme des retraites, lancée en septembre 2019, les bâtonniers de toute la France se sont rassemblés pour réaffirmer leur opposition à ce projet de loi, adopté en conseil des ministres le vendredi 24 janvier et qui entre le 3 février 2020 dans sa phase de discussion parlementaire.
Le Village de la Justice a assisté au discours de la présidente Hélène Fontaine.

« Vous avez devant vous une profession unie. » C’est précisément l’union qu’ont souhaité montrer les avocats lors de cette AG. Une photo de famille pour répliquer aux déclarations de l’exécutif et de la ministre de la Justice qui font mine de ne pas comprendre le pourquoi de cette réponse négative au projet « retraites ».

"Vous avez devant vous une profession unie."

La présidente avait au début de son discours précisé avoir envoyé le texte à la Garde des Sceaux, qui n’avait pas été conviée à l’événement. Une manière de rendre ces mots encore plus percutants, preuve que le contexte revêt une urgence particulière.

Et effectivement, les mots prononcés par Hélène Fontaine ont décrit la grande vulnérabilité dans laquelle se trouve une importante partie de la profession, qui se trouve tiraillée entre un impératif économique et sa profonde nature d’avocat : « notre idéal de justice n’a jamais été aussi grand et nos préoccupations aussi grandes. » Un symptôme selon elle d’une « justice qui se délite », victime des réformes mises en place depuis deux ans, et que la présidente a énuméré : « réforme et programmation de la justice, modification de la procédure civile et du divorce, réforme de l’ordonnance de 1945, réforme du régime des peines, mise en cause du secret professionnel, réforme des retraites. »

"Nous sommes viscéralement avocats."

Et pourtant, « nous sommes viscéralement avocats » a-t-elle appuyé, et « c’est dans l’adversité que le monde judiciaire trouve sa force ». Une opposition telle qu’elle a obligé les avocats « à surmonter leurs divisions » pour incarner « une profession unie. » Preuve ultime, Hélène Fontaine a invité à la rejoindre sur l’estrade Nathalie Roret, Olivier Cousi et Christiane Féral-Schuhl.

Conférence des bâtonniers oblige, elle a axé son discours sur « les 163 ordres qui organisent l’accès au droit pour tous sur l’ensemble du territoire ». Car « la Conférence des bâtonniers, avec les deux autres institutions de la profession, constitue un des piliers de la démocratie en tant que gardien de la déontologie et de la discipline, assurant l’indépendance des Ordres. » Cette organisation des avocats est, sur le territoire, un agent de la démocratie, « au service du justiciable et des confrères. » Une position d’autant plus importante qu’elle est aujourd’hui menacée par la politique du gouvernement, critiquée car « elle exige toujours plus des avocats, sans réciprocité. » Or une disparition des avocats rendrait caduque l’idéal d’accès de tous à la justice, « et alors là il y a danger. »

Et c’est justement la principale critique faite à l’encontre de la garde des Sceaux : « nous savons parfaitement compter, il faut des juges, des greffiers, des moyens, de la considération pour ceux qui œuvrent en silence, dans des conditions de travail dégradées. Les avocats sont devenus des variables d’ajustement. » Une situation plus que tendue qui fait s’interroger Hélène Fontaine : « Nous respectez-vous Madame la ministre ? Respectez-vous les justiciables ? Protégez-vous les avocats dans une attitude bienveillante ? Nous n’en avons pas le sentiment. »

"Protégez-vous les avocats ? Nous n’en avons pas le sentiment."

Après quatre semaines de grève, une mobilisation de la totalité des barreaux, la présidente de la conférence a lancé : « Vous ne pouvez pas ignorer une mobilisation aussi importante, historique. Vous n’imaginez pas à quel point les avocats sont inquiets et craignent pour la survie de leur cabinet, et ces 55.000 emplois qui en dépendent. » Et pourtant, « les avocats sont solidaires des citoyens, en travaillant à perte, car ils respectent leur serment. »

Cette mobilisation ne semble ainsi pas prête de s’arrêter : « notre ambition, nous bâtonniers de France, est de rendre à chaque avocat le respect et la considération qu’il mérite. »

Simon Brenot Rédaction du Village de la Justice