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Compétence territoriale du Tribunal Judiciaire de Nantes : exequatur et transcriptions d’adoption. Par Florence Lejeune-Brachet, Avocat.
Parution : mercredi 12 février 2020
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Dans les procédures visant à transcrire un jugement d’adoption (simple ou plénière) prononcé à l’étranger dans le registre spécial détenu par le Service Central de l’Etat Civil de Nantes, le Tribunal Judiciaire de Nantes est territorialement compétent. La Cour d’appel de Rennes (Cour d’Appel de Rennes décision en date du 10 février 2020) précise également qu’il n’est pas nécessaire d’avoir préalablement sollicité le Parquet de Nantes dans le cadre des adoptions plénières pour demander l’exequatur de la décision.

Article actualisé par l’auteur en décembre 2020.

Dans toutes les procédures visant a transcrire un jugement étranger d’adoption (simple ou plénière) seul le tribunal judiciaire de Nantes est territorialement compétent.

La Cour d’appel avait eu a statuer le 10 Février 2020 sur la compétence territoriale du Tribunal de Nantes saisi d’une demande d’exequatur d’un jugement d’adoption simple prononcé à l’étranger.

Dans cette première espèce, Monsieur A M, demeurant dans la région parisienne, sollicitait l’exequatur d’un jugement d’adoption simple prononcé à Brazzaville (République du Congo).

La convention franco-congolaise prévoit une compétence exclusive du :
« Président du Tribunal de Grande Instance ou du Tribunal de Grande Instance du lieu où l’exécution doit être poursuivie ».

L’exequatur ayant pour but l’enregistrement de la décision dans le registre spécial détenu par le Service Central de l’Etat Civil sis à Nantes, Monsieur A M a saisi le Tribunal de Grande Instance de Nantes (en l’espèce en la forme des référés conformément à la convention franco-congolaise devenue aujourd’hui la procédure accélérée au fond).

La Cour indiquait :
« Le registre sur lequel les jugements d’adoption simple sont enregistrés concernant les personnes nées à l’étranger, lorsque leurs actes de naissance ne sont pas conservés sur des registres français, est tenu au service central d’état civil situé à Nantes, de sorte qu’il y a lieu de considérer que l’exécution d’un tel jugement relève de la compétence des juridictions nantaises ».

Par une deuxième décision en date du 28 Septembre 2020, la Cour d’appel a confirmé la compétence territoriale du Tribunal de Nantes, cette fois-ci pour un jugement d’adoption plénière également prononcé en République du Congo au profit d’un couple demeurant en République du Congo.

La Cour d’Appel reprendra quasiment le même motif :
« Le registre sur lequel les jugements d’adoption sont enregistrés concernant les personnes nées à l’étranger, lorsque leurs actes de naissance ne sont pas conservés sur des registres français, est tenu au Service Central d’Etat Civil situé à Nantes, de sorte qu’il y a lieu de considérer que l’exécution d’un tel jugement relève de la compétence des juridictions nantaises ».

Le Tribunal du lieu du domicile du demandeur n’a donc pas vocation à statuer sur les demandes d’exequatur des jugements étrangers prononçant une adoption, que les effets soient ceux d’une adoption simple ou d’une adoption plénière.

En dehors de toute convention bilatérale, on retrouve la compétence énoncée à l’article 42 du code de procédure civile qui précise :
« La juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur. S’il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l’un d’eux. Si le défendeur n’a ni domicile ni résidence connus, le demandeur peut saisir la juridiction du lieu où il demeure ou celle de son choix s’il demeure à l’étranger ».

En l’espèce le défendeur est bien évidement le Procureur de la République.

Bien qu’il n’y ai aucune précision dans les textes il y a tout lieu de penser que le Parquet compétent est celui du ressort du Tribunal où se situe le Service Central d’Etat Civil.

En effet le Parquet de Nantes a compétence pour transmettre les réquisitions de transcription des jugements d’adoption simple sur les registres détenus par le Service Central d’Etat Civil.

C’est d’ailleurs au Parquet de Nantes que le législateur a confié, de façon exclusive, la compétence territoriale des procédures liées à la transcription des actes de mariage étranger en raison de leur rattachement au Service Central d’Etat Civil [1].

Article 1056-2 Code de Procédure Civile :Retour ligne automatique
Le procureur de la République territorialement compétent pour s’opposer à la célébration d’un mariage d’un Français à l’étranger est celui du lieu où est établi le service central d’état civil du ministère des affaires étrangères.

Il est également seul compétent pour se prononcer sur la transcription de l’acte de mariage étranger sur les registres de l’état civil français et pour poursuivre l’annulation de ce mariage.

Il est également seul compétent, lorsque l’acte de mariage étranger a été transcrit sur les registres consulaires français, pour poursuivre l’annulation du mariage, même s’il n’a pas été saisi préalablement à la transcription.

Le tribunal peut être saisi d’une demande de transcription sans saisine préalable du parquet.

La Cour d’Appel précisera également que :
« s’il est constant qu’en matière d’adoption plénière, une voie administrative est ouverte aux requérants afin d’obtenir la transcription du jugement étranger, il n’en demeure pas moins qu’il leur est toujours possible de demander judiciairement l’exequatur de la décision étrangère ».

Il n’est donc pas obligatoire de solliciter la transcription d’une adoption plénière auprès du Parquet de Nantes avant de saisir les juridictions.

Cela a son importance compte tenu des délais de réponse du Parquet de Nantes ; alors même que certaines conventions (donc la convention franco-congolaise) prévoient une procédure rapide (ancienne en la forme des référés devenue procédure accélérée au fond).

Florence LEJEUNE-BRACHET Avocat au Barreau de Nantes

[1Article 1056-2 du code de procédure civile.