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L’articulation entre l’ordonnance de protection et le jugement concernant les enfants. Par Flora Labrousse, Avocat.
Parution : vendredi 14 février 2020
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Lorsqu’une ordonnance de protection et un jugement relatif aux modalités d’exercice de l’autorité parentale sont rendus "concomittament" par le juge aux affaires familiales, la question de leur applicabilité peut se poser.

L’ordonnance de protection est délivrée « dans l’urgence » par le juge aux affaires familiales et permet d’assurer la protection de la personne qui la demande, lorsqu’il existe des violences vraisemblables et un danger imminent.

Lorsque cette procédure concerne des personnes ayant eu des enfants ensemble, le juge aux affaires familiales qui délivre l’ordonnance de protection statue sur deux points :
- d’une part, il ordonne un certain nombre de mesures destinées à protéger la victime des violences et le cas échéant les enfants ;
- d’autre part, il statue de manière provisoire sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale sur les enfants mineurs.

L’objectif de l’ordonnance de protection est d’assurer, à bref délai, la « sécurité » de l’un des parents en cas de violences conjugales dans l’attente qu’une décision définitive, au fond, soit rendu par le juge aux affaires familiales au sujet des enfants.

L’ordonnance de protection est donc, par définition, rendue à titre provisoire et pour une durée déterminée. Les mesures prises dans l’ordonnance de protection durent 6 mois à compter de sa signification.

Elles peuvent toutefois durer plus ou moins longtemps dans le cas où, pendant ce délai de 6 mois, une requête en divorce, une requête en séparation de corps ou une requête relative à l’exercice de l’autorité parentale sur les enfants mineurs est déposée devant le juge aux affaires familiales.

Cela signifie que la personne bénéficiaire de l’ordonnance de protection devra ressaisir le juge aux affaires familiales aux fins d’obtenir une décision définitive concernant les modalités d’exercice de l’autorité parentale sur les enfants mineurs.

Dès lors, la question de l’articulation entre l’ordonnance de protection des victimes de violences et les requêtes relatives à l’exercice de l’autorité parentale sur les enfants mineurs peut se poser. Et ce notamment en ce qui concerne la date d’applicabilité de l’ordonnance de protection et/ou celle du jugement statuant au fond sur les mesures applicables aux enfants.

Lorsqu’une requête est déposée devant le juge aux affaires familiales pendant les 6 mois d’applicabilité de l’ordonnance de protection, les dispositions de l’article 1136-14 du code de procédure civile prévoient que :
- D’une part, les mesures de l’ordonnance de protection continuent de produire leurs effets jusqu’à ce qu’une décision statuant sur la demande relative à l’exercice de l’autorité parentale soit passée en force de chose jugée, à moins que le juge saisi de cette demande n’en décide autrement.
Cela signifie concrètement que les mesures relatives aux enfants contenues dans l’ordonnance de protection continueront de s’appliquer, même si le délai de 6 mois est écoulé, tant que le jugement au fond n’aura pas été rendu par le juge aux affaires familiales.
- D’autre part, afin de prendre en compte le caractère exécutoire des mesures relatives à l’exercice de l’autorité parentale et afin d’éviter tout risque de contrariété entre mesures de même nature, il est prévu que la décision statuant sur la demande relative à l’exercice de l’autorité parentale met fin, dès sa notification, aux mesures prononcées initialement dans le cadre de l’ordonnance de protection concernant les enfants.
Cela signifie concrètement que si le jugement au fond relatif aux enfants est rendu avant que le délai de 6 mois d’applicabilité de l’ordonnance de protection ne soit arrivé à expiration, les mesures relatives à l’exercice de l’autorité parentale contenues dans le jugement au fond se substitueront, dès sa notification, à celles contenues dans l’ordonnance de protection.

Dans ce dernier cas de figure, seules les mesures de « protection » stricto sensu contenues dans l’ordonnance de protection continueront de produire leurs effets, sans interruption, pendant le délai de 6 mois.

Il n’y a donc pas lieu, sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale, d’attendre que les mesures de l’ordonnance de protection prennent fin pour appliquer le jugement au fond quand bien même ce dernier aurait été rendu avant l’expiration du délai de 6 mois.

Flora LABROUSSE, Avocat au Barreau de Paris Consultation : https://consultation.avocat.fr/cabinets/cabinet-flora-labrousse-75009-41967a87ce.html Site internet : https://9trevise-avocat.com/