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Histoire du bagne de Poulo Condore de sa création à la Première Guerre Mondiale. Par Vincent Ricouleau, Professeur de droit.
Parution : dimanche 23 février 2020
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Dans la première partie de cette étude sur l’histoire du bagne de Poulo Condore, je retraçais la prise de possession de l’archipel de Poulo Condore et son contexte juridique. Les traités de 1787, 1862, 1874 ont scellé le destin de l’archipel de Poulo Condore, choisi par l’amiral Bonard pour construire en 1862 le bagne du même nom.
Ce deuxième article traite de l’histoire du bagne de son ouverture à la première guerre mondiale. Comment le bagne fonctionne-t-il ? Qui sont ses directeurs et ses surveillants ? Quels détenus sont-ils incarcérés ? Evasions, mutineries, violences. Justice coloniale inique et répression sans pitié. Le bagne est un enfer et une prison politique bien avant l’émergence du communisme.

« Moi, Abraham Lincoln, président des Etats-Unis d’Amérique, commandant en chef de l’armée et de la marine, déclare que le premier jour de janvier de l’année de notre Seigneur 1863, toutes les personnes tenues en esclavage, dans un Etat ou dans une partie d’un Etat dont la population sera en rebellion contre les Etats-Unis seront libres pour toujours ».

Cette déclaration historique marque l’évolution du monde. Mais qui sait en vérité que Lincoln souhaite que les esclaves noirs quittent les Etats-Unis et émigrent au Panama pour le coloniser ?

Le concept de colonisation varie étrangement selon les contextes politico-historiques. Mais le résultat est le même partout. Notre déclaration des droits de l’Homme, prônant l’égalité, est vaine. Si l’empire de Napoléon III succombe à la guerre franco prussienne de 1870 et au désastre de Sedan pour faire place à la troisième république, rien n’entrave une colonisation brutale et assumée.

L’Eglise catholique n’est pas en reste, les missions étrangères allant à la conquête des âmes au besoin soutenue par les fusils.

L’année 1863 est celle qui suit la création du bagne par décret du 1 février 1862 de l’amiral Bonard.

L’année 1863 est l’année aussi où Gustave Viaud rédige sa topographie sur l’archipel de Poulo Condore.

Le témoignage direct et écrit de Gustave Viaud, chirurgien de marine de deuxième classe, frère de Julien Viaud, alias Pierre Loti, dans sa « Topographie médicale et rapport sur la situation présente sur l’archipel de Poulo Condore », publié aux archives de médecine navale le 14 août 1863, nous éclaire sur les conditions de vie sur l’archipel.

A l’arrivée de l’aviso du nom de l’Echo, en mai 1863, les 311 habitants, dont 139 enfants "étaient plongés dans la plus affreuse misère".

Viaud évoque la flore, les cochons, les chèvres, l’arbre à pain, le jacquier, le maïs, les marais, la dysenterie.

Le jeune chirurgien parle du sulfate de quinine pour soigner la fièvre.

Il affirme qu’il n’y a « pas de choléra, pas de variole, pas de syphilis ! »

Viaud a même repéré un endroit pour construire un hôpital de 300 malades. Il est aussi passionné par la physiothérapie.

Mais quelle naïvité et quelle ignorance chez ce jeune médecin pourtant si ouvert et si motivé quand on verra dans l’article sur la santé des détenus, le carnage fait par le choléra, le paludisme et autres maladies comme le béri-béri.

Gustave Viaud succombe lui-même du choléra contracté au bagne en 1865, où il œuvre comme médecin.

Parmi d’autres documents de l’époque, les « Notes sur les ïles de Poulo Condor, dépendance de la Cochinchine française par Mr Chevillet, ancien commandant des ïles et du pénitencier du 1 juillet 1872 au 4 novembre 1873 ».
Je cite :

Lors de l’arrivée des Français, les prisonniers étaient environ 300 répartis sur trois hameaux. Les habitants sont paresseux, joueurs, sales et menteurs. Ils excellent surtout dans ce dernier défaut".

Le directeur Chevillet n’épargne pas les habitants. Mais il rapporte des faits à l’arrivée des Français, dont il n’est pas témoin direct, contrairement à Gustave Viaud.

Toutefois, sa description des fruits donne quelques indications sur les richesses apparentes de l’ile.

Le directeur Chevillet note la présence du banian, du lit-chi, de l’ébénier, du bananier, du tamarinier, du pin à longues feuilles, du mangoustier, du grenadier, du flamboyant, du chêne de Cochinchine, de l’arbre à pommes d’Acajou, du pommier-cannelier, de l’arbre à huile, du vomiquier, de bambous, de rotins, du cajeputtier, du jacquier, du cotonnier, de l’oranger, du citronnier, du mûrier, du cocotier, du caféier, et d’autres.

Sur l’état sanitaire, Mr Chevillet précise que « si les ressources médicales étaient plus complètes, il serait possible de faire de ces iles un lieu de convalescence pour la Cochinchine ».

Avec de tels témoignages, nous pourrions penser que l’archipel de Poulo Condore n’est pas si hostile que cela.

Tous les événements postérieurs nous démontreront tragiquement le contraire.

Le choix de l’archipel de Poulo Condore, pour en faire une colonie pénitentiaire agricole, s’avère en réalité une terrible erreur médicale comme nous l’étudierons dans l’article consacré à la santé des détenus.

Mais rappelons immédiatement le statut juridique de l’archipel.

Le statut de l’archipel.

Le bagne est créé par décret du 1 février 1862 de l’amiral Bonard. Le réglement du pénitencier, révisé à plusieurs reprises, organise le fonctionnement du bagne.

D’abord qui peut s’installer, vivre et travailler dans l’archipel ?

L’article 97 du réglement, révisé à plusieurs reprises, dont le 8 avril 1903, déclare le territoire des ïles "inaliénable".

Aucune industrie privée ne peut y être autorisée. Tous les produits du sol appartiennent au pénitentier. Une exception : les jardins cultivés par les habitants du village dit “Petit Cambodge” et nous dit-on, “jusqu’à leur complète extinction ».

Cette formulation signifie qu’aucune émigration ou apport de population d’aucune sorte n’est autorisée.

Aux produits du sol, il faut ajouter les produits de la mer, poissons, coquillages.

L’article 98 précise qu’aucun européen ou asiatique ne peut résider sur le territoire des ïles qui est exclusivement affecté à un établissement pénitentiaire agricole.

Mais l’inaliénabilité ne signifie pas une interdiction d’occupation temporaire.

Un établissement pénitentiaire agricole n’est pas astreint à vivre en autarcie.

En effet, l’article 98 s’empresse de déroger à l’article 97.

Les marchands asiatiques dont la présence est tolérée dans l’enceinte du pénitencier construisent leur habitation à leurs risques et périls, ne peuvent aliéner le sol et bâtiments édifiés et peuvent être déplacés selon les besoins de l’établissement, sans avoir droit à aucune indemnité.

Ces marchands asiatiques, en réalité la plupart du temps des Chinois, joueront un rôle important. Epicerie, pharmacopée, opium, amours tarifés, sont proposés discrètement avec la complicité de certains gardiens, moyennant finance.

Quels sont les détenus incarcérés à Poulo Condore ?

Peter Zinoman dans « The Colonial Bastille, a history of imprisonment in Vietnam 1862-1940 » publié en 2001 aux éditions University of California Press, est un des meilleurs spécialistes de l’histoire carcérale en Indochine française.

Nous nous reporterons à mon premier article sur l’histoire de Poulo Condore concernant le sort des femmes. Elles ne seront plus incarcérées au bagne à partir de 1907.

Que nous dit Peter Zinomam pages 29 et 30 sur les détenus ?

“According to Bonard’s Decree : there will be set up on Poulo Condore an Annamite penitential establishment where dangerous men, prisoners and malefactors, will be deported. The men will be divided into two categories : (1) prisoners incarcerated for rebellion or common crimes, (2) prisoners of war”.
La première catégorie accueille les prisonniers coupables de rebellion et de droit commun. La deuxième catégorie accueille les prisonniers de guerre.
“The two categories will, as much as possible, be separated. The prisoners of war will be granted land concessions. The prisoners for rebellion and common crimes will be used for work of public utility”.

Les prisonniers de guerre auront des concessions de terre. Les prisonniers pour rebellion, autrement dit, des prisonniers s’opposant soit en combattant, soit passivement à la colonisation, et les prisonniers de droit commun, seront astreints aux travaux d’intérêt général.

Les deux catégories seront séparées si possible.

Peter Zinoman cite des évènements précis, réprimés et qui ont entraîné l’incarcération de prisonniers qui se sont battus contre la présence française. Ces prisonniers sont à la fois des prisonniers de guerre et des prisonniers pour rebellion, qu’on peut qualifier de politiques.

Les statuts des prisonniers se chevauchent dans de nombreux cas.

“Indeed, Poulo Condore played a key role in the repression of anticolonial resistance throughout the early decades of its existence. Il was the final destination for captured troops involved in Truong Dinh’s Southern Uprising (Khoi Nghia Nam Ky) in the 1870s and the defense of Hanoi against French attacks in 1873 and 1882. The repression of the Save-The-King Movement (Phong Trao Can Vuong) in the 1880s drew more anti-colonial rebels into the prison population, including such eminent resistance figures as Nguyen Van Tuong, Pham Thuan Duat and Ton That Dinh”.

Le bagne de Poulo Condore, dès le début, joue donc un rôle clé dans la répression de la résistance anti-coloniale, bien avant la création des organisations communistes et l’incarcération d’Indochinois s’en revendiquant.

Les prérogatives du directeur.

Selon Pierre Zinoman, 39 directeurs se sont succédé de l’ouverture à la fermeture du bagne.

Sur quels critères sont-ils choisis ? Quelles qualités doivent-ils avoir ? Quel profil présentent-t-ils ?

D’abord, leur formation.

Elle est hétérogène.

Licencié en droit, administrateur colonial, lieutenant de gendarmerie, commissaire de police, lieutenant d’infanterie métropolitaine, capitaine de la légion étrangère, haut fonctionnaire civil, lieutenant ou capitaine de l’infanterie coloniale, les 39 directeurs ont des formations initiales diverses.

Militaires et civils ont bien souvent des méthodes d’administration différentes.

Tous les directeurs sont des hommes, français de souche, choisis par le gouverneur avec pour mission prioritaire de protéger et sauvegarder l’Etat colonial.

Aucun indochinois ou autre ressortissant de colonies françaises ne se voit nommé directeur du bagne et des iles. Alors qu’en Guyane, Herménégilde Tell, guyanais, noir, sera directeur de l’administration pénitentiaire coloniale de Guyane de 1919 à 1925.

Aucun directeur ne semble avoir été spécifiquement formé à diriger un établissement pénitentiaire et son personnel.

Le directeur administre, gère, punit, sanctionne, condamne à mort, construit, aménage, purifie, fait soigner, aide à déporter au bagne d’Obock, du Gabon, de Nouvelle-Calédonie ou, bien de Guyane sur le territoire de l’Inini dans les années 1930.

Le directeur ne doit être ni humaniste, ni tyran. Sa mission s’avère d’une complexité extrême à cause de la corruption, la violence entre les détenus et les gardiens, entre les détenus eux-mêmes.

L’administration de la colonie pénitentiaire agricole dépend du contexte militaire, politique, des épidémies de choléra, de paludisme, du béri-béri, de la tuberculose des grèves de la faim, des révoltes collectives, des tentatives d’évasions.

La colonie pénitentiaire agricole de l’archipel de Poulo Condore est une poudrière, où criminels, pirates, escrocs en tout genre, violeurs, trafiquants de drogue, assassins, proxénètes et les détenus semi-politiques et politiques doivent cohabiter.

Une poudrière composée d’hommes très différents les uns des autres qui tentent le tout pour s’évader.

Car l’évasion est le seul projet qui donne de l’espoir et qui tient en vie.

Une mutinerie réussie signifie au mieux une évasion, au pire des prises d’otages et le massacre du directeur, du personnel ainsi que la destruction des installations.

Le règlement du 8 avril 1903 précise les prérogatives du directeur.

La compétence géographique :

L’article 2 dit que son action s’étend sur tout le territoire des iles de Poulo Condore et à toutes les parties du service intérieur et extérieur du pénitencier dont il est responsable.

L’article 3 dit que tous les employés lui sont subordonnés et doivent lui obéir. Le directeur est chargé de l’exécution des règlements relatifs au régime intérieur économique et du maintien de la police et de la discipline dans le pénitencier.

Les subordonnés sont les gardiens, les matas, les caplans, le médecin et le commandant d’armes, ce dernier conservant une certaine autonomie tactique lorsque le directeur n’est pas lui-même un militaire.

Officier de l’Etat civil et officier de police judiciaire :

L’article 4 dit que le directeur est investi dans toute l’étendue des iles des attributions d’officier de l’état-civil et de la police judiciaire.

Responsable des peines disciplinaires au personnel :

L’article 5 dit que le directeur, seul, est autorisé à infliger des peines disciplinaires aux agents directement placés sous ses ordres et signale au gouverneur de la Cochinchine ceux qui auraient encouru des peines sévères.

Responsable des peines disciplinaires aux détenus :

L’article 6 dit que le directeur inflige seul les peines disciplinaires encourues par les détenus.

L’article 7 dit que les peines pouvant être infligées à chaque détenu sont les suivantes : la chaîne simple, la chaine double, la chaîne simple sans boulet, la privation de salaire, la mise au riz et à l’eau, la détention en cellule penant un mois au plus, les fers.

La délégation des pouvoirs :

Le directeur peut déléguer ses pouvoirs au gardien en chef et aux chefs de postes éloignés pour les punitions de chaîne simple, double. Ces agents rendent immédiatement compte au directeur des peines infligées.

Le travail des prisonniers :

L’article 8 dit que le directeur est spécialement chargé de tout ce qui concerne les travaux des prisonniers et de l’application des tarifs pour la cession des objets fabriqués.

Le rôle du directeur en cas d’évasion :

L’article 9 dit qu’en cas d’évasion, de complot ou d’émeute et d’incendie, le directeur adresse à l’autorité militaire en se conformant aux règlements en vigueur, telles réquisitions et prend sous sa responsabilité telles mesures qu’il juge nécessaires pour maintenir les détenus dans le devoir et assurer la sûreté de l’établissement. Le directeur envoie chaque année un état nominatif des propositions pour remises ou réduction de peines établi en faveur des détenus méritants. Toutes les mesures d’ordre, de police, de discipline, de salubrité peuvent être appliquées sauf à en rendre compte dans les plus brefs délais au gouverneur.

Signalons l’article 73 du décret du 16 février 1921 sur l’organisation judiciaire de l’Indochine précisant que le directeur du pénitencier et des iles a les attributions d’un juge de paix à compétences étendues.

Le personnel du bagne.

Qui sont les caplans ?

Le caplan est à la fois un détenu et un gardien sans en avoir le statut. Le mot « caplan » serait une déformation de « caporal ». Auxiliaire, il répartit les travaux, les corvées, assigne à une tâche, punit, dénonce, fait chanter, extorque, escroque, facilite, complique, les soins, les médicaments, augmente la nourriture, exempte ou astreint aux postes de travail les plus pénibles, loue sa concubine, trafique l’opium. Certains finissent assassins. Tous sont des informateurs. La plupart sont corrompus.

Pour rester en vie, le caplan doit avoir une valeur.

Selon Jean-Claude Demariaux, les caplans sont choisis parmi les plus robustes, avec un niveau en français correct. Mais aussi parfois parmi les pires meurtriers. Un chef caplan s’appelle un memento.

Qui sont les matas ?

Les matas sont des gardiens d’origine indochinoise. Nous verrons l’origine du mot « mata » plus loin.

Qui sont les gardiens ?

Les gardiens sont souvent des Corses, des Indiens de Pondichéry, des Réunionnais parfois, ou des continentaux. Il y a le personnel préposé à la garde mais aussi à l’administration du pénitencier. Les gardiens-chefs doivent avoir la poigne. Un gardien fait office de greffier, un autre de comptable.

Le commandant d’armes :

Le commandant d’armes commande le détachement d’infanterie coloniale chargé spécialement de la garde extérieure du pénitencier. Dans l’ordre des préséances, il prend rang immédiatement après le directeur. Beaucoup de soldats sont d’origine africaine. Dans la pratique, l’infanterie coloniale n’a jamais à défendre l’archipel. Mais à réprimer sur ordre du directeur, et quasiment toujours dans le sang, les révoltes.

Le médecin :

Le médecin du bagne a le troisième rang. Il est à la tête de l’infirmerie, assisté par des détenus infirmiers. Accompagné par les gardiens et les caplans, il a accès à tous les lieux du bagne. Il ne possède aucun pouvoir disciplinaire sur les surveillants ou les détenus. Nous reviendrons longuement sur son rôle dans l’article sur la santé des détenus.

L’origine du mot mata.

Revenons aux sources historiques.

Que signifie le terme de mata ?

Jean-Bernardin Jauréguiberry (1815-1887), ministre de la marine et des colonies, de 1879 à 1880, dans le gouvernement de Waddington et de 1882 à 1883 dans les gouvernements Freycinet et Duclerc, adresse un rapport au président de la République le 8 décembre 1879 où il plaide pour un corps d’infanterie indigène.
Voici ce qu’il écrit :

Il existe en Cochinchine une milice indigène d’un caractère tout spécial : milice qui tient à la fois de la police et de la force militaire et qui est recrutée suivant la coutume annamite dans chacune des circonscriptions administratives du pays. Elle fut à l’origine levée par l’administration coloniale pour la surveillance des marchés et des villages et pour assurer divers services importants, tels que ceux de la poste, des voies, de la garde des prisonniers etc…
Cette milice qui est placée sous les ordres des administrateurs des affaires indigènes, constitue une force d’environ 4500 hommes connus sous le nom de matas.

Ces matas sont armés de fusils et ont reçu une certaine instruction militaire. Ainsi, les a-t-on utilisés à diverses reprises mais par petites fractions pour la répression d’insurrections ou de troubles partiels à une époque où les administrateurs des affaires indigènes, choisis presque exclusivement parmi les officiers des différents corps de la marine, pouvaient à la rigueur, diriger une opération militaire restreinte ».

En réalité, le mata a une fonction polyvalente. Par contre, le mata ne semble pas recevoir une formation pénitentiaire. Il apprend sur le tas, formé par ses collègues gardiens. Beaucoup de matas ont des comportements analogues aux caplans.
La tension dans le bagne de Poulo Condore trouve notamment son origine dans une répression organisée par un Code pénal très répressif et des décisions de justice, qui révoltent même … un ancien gouverneur.

Les textes applicables.

Le décret du 25 juillet 1864 est le premier texte établissant l’autorité judiciaire française en Cochinchine. Il prévoit que les tribunaux indigènes institués par le code annamite sont maintenus en dehors des ressorts où est installé un tribunal français. La loi et les coutumes indigènes sont officiellement toujours en vigueur. Les décrets des 17 mai 1895 et du 8 août 1898 réorganisent les services judiciaires. Le décret du 20 octobre 1911 définit les pouvoirs du gouverneur général et l’organisation financière et administrative de l’Indochine.

Un nouveau Code pénal.

Le décret du 31 décembre 1912 promulgué par arrêté du gouverneur général du 25 février 1913, fixe les dispositions du Code pénal applicables par les juridictions françaises de l’Indochine aux indigènes et asiatiques assimilés.
Les peines prévues ne laissent aucun doute. La répression coloniale se veut sans faiblesse.

L’application de la peine de mort.

L’article 75 du Code pénal dit que “tout sujet ou protégé français qui aura porté les armes contre la France sera puni de mort”.

L’article 92 dit “seront punis de mort ceux qui auront fait lever des troupes armées, engagé ou enrôlé, fait engager ou enrôler des soldats ou leur auront fourni ou procuré des armes ou munitions sans ordre ou autorisation du pouvoir légitime”.

L’article 93 dit “tout individu qui aura incendíé ou détruit, par l’explosion d’une mine, des édifices, magasins, arsenaux, vaisseaux ou autres propriétés, appartenant à l’Etat, sera puni de mort”.

L’article 96 dit “quiconque, soit pour envahir des domaines, propriétés, ou deniers publics, places, villes, forteresses, postes, magasins, arsenaux, ports, vaisseaux ou bâtiments appartenant à l’Etat, soit pour piller, ou partager des propriétés publiques ou nationales, ou celles d’une généralité de citoyens, soit enfin pour faire attaque ou résistance envers la force publique agissant contre les auteurs des crimes, se sera mis à la tête de bandes armées ou y aura exercé une fonction ou commandant quelconque sera puni de mort. “

L’application de la déportation.

L’article 87 du Code pénal dit que “l’attentat dont le but est soit de détruire ou de changer le gouvernement (ou l’ordre de successibilité au trône), soit d’exciter des citoyens ou habitants à s’armer contre l’autorité impériale” est puni de la peine de la déportation dans une enceinte fortifiée”.

L’article 91 dit “que l’attentat dont le but sera soit d’exciter à la guerre civile en armant ou en portant les citoyens ou habitants à s’armer les uns contre les autres, soit de porter la dévastation, le massacre ou le pillage dans une ou plusieurs communes, sera puni de la déportation. Le complot ayant pour but l’un des crimes prévus au premier article et la proposition de former ce complot, seront punis des peines portées en l’article 89. Les autres manoeuvres de nature à compromettre la sécurité publique ou à occasionner des troubles politiques graves seront déférées aux tribunaux correctionnels et punies d’un emprisonnement d’un an à cinq ans. Les coupables pourront en outre être interdits en tout ou partie des droits mentionnés en l’article 42.

Rappelons que l’article 101 du Code pénal précise que “sont compris dans le mot –armes-, toutes machines, tous instruments ou ustensiles tranchants, perçants ou contendants. Les couteaux et ciseaux de poche, les cannes simples ne seront réputés armes qu’autant qu’il en aura été fait usage pour tuer, blesser ou frapper.
La sûreté nationale est l’acteur principal de la répression.

La création de la sûreté nationale.

Albert Sarraut (1872-1962) joue un rôle important dans l’organisation de la répression coloniale.

Il est gouverneur de l’Indochine de 1911 à 1914 et de 1917 à 1919.

Le décret du 20 octobre 1911 a déjà donné beaucoup de pouvoirs concernant tant l’administration que la répression policière au gouverneur général.

Sarraut crée la même année – 1912 - que l’entrée en vigueur du nouveau Code pénal, la direction des affaires politiques et indigènes. Elle a pour objectif le recueil d’informations politiques, d’infiltrer, de suivre, d’espionner, de dénoncer, de réprimer, d’éliminer.

Sarraut met en place l’état-civil indigène par l’établissement des registres obligatoires par village. Le service central de renseignements et de sûreté générale (SRSG) développe peu à peu un fichage à grande échelle, étudiants, étrangers, condamnés, navigateurs, écrivains, intellectuels, journalistes, avocats, syndiqués, notamment avec le système Bertillon.

Le 28 juin 1917, Albert Sarraut crée officiellement la sûreté générale indochinoise.
Comme beaucoup d’hommes poltiques de la troisième république, Sarraut a une carrière riche.

En tout cas, sa politique répressive en Indochine ne semble pas freiner son évolution.

Sarraut a été le premier ambassadeur français à Ankara. Il a été ministre de la marine, ministre des colonies, de l’éducation nationale, sous-secrétaire d’Etat à la guerre, ministre de l’intérieur sous les gouvernements Daladier en 1938-1940. Il a voté les pleins pouvoirs à Pétain. Il a été déporté au camp de Neuengamme de 1944 à 1945. Puis il a présidé l’Assemblée de l’Union Française de 1951 à 1958.

Pour l’anecdote, dans la thèse d’histoire de Mathieu Guérin, “Des casques blancs sur le plateau des herbes : la pacification des aborigènes des hautes terres du sud indochinois 1859-1940”, il est dit que Omer Sarraut, le fils du gouverneur Sarraut, a realisé une grande partie des photographies qui illustrent le livre de Henri Maître “Les jungles Moï”.

La dénonciation d’une justice inéquitable par Le Myre de Vilers.

Charles-Marie Le Myre de Vilers (1833-1918) n’hésite pas dans son ouvrage “les institutions civiles de la Cochinchine 1879-1881” publié en 1908 à dénoncer le système judiciaire que met en place la France.

Pourtant, Le Myre de Vilers n’est ni avocat, ni journaliste, ni écrivain mais un ancien gouverneur. Il est étonnant de trouver sous sa plume des critiques aussi acerbes malgré un devoir de réserve inhérent à son statut. Sa liberté d’expression est remarquable et fait mouche.

Quelques précisions sur cet ex-gouverneur qui connait bien le monde des colonies.

En 1849, Le Myre de Vilers entre à l’école navale. En 1861, il démissionne et rejoint le corps préfectoral. En 1877, il est directeur des affaires civiles de l’Algérie. En 1879, il est nommé premier gouverneur civil de la Cochinchine et le reste jusqu’en 1885. En 1885, il est résident général à Madagascar jusqu’en 1889 puis ministre plénipotentiaire à Bangkok en 1893 pour le règlement des affaires du Siam. Il fait le discours d’inauguration du Musée Pigneau de Béhaine vers 1914.

Dans les « Institutions Civiles de la Cochinchine » pages 69 et suivantes, Le Myre de Vilers commente longuement le rôle du gouverneur dans la justice à qui tout procureur doit soumettre pour approbation la peine de fer, de l’exil ou de mort, prononcée par le juge. Tout condamné à la peine capitale a droit au sursis et recours en grâce au président de la république. Sa peine ne peut être exécutée qu’après le rejet de sa demande. En tout cas, tel est le droit. Quant à l’application, c’est autre chose.

Le message de Le Myre de Vilers est clair. La justice n’a de justice que le nom et elle s’accole parfaitement avec l’adjectif « politique ». Puisque la séparation des pouvoirs n’existe pas dans les faits.

Citons quelques extraits des pages 67 et suivantes où les années ne sont pas précisées mais doivent correspondre à certains mandats de gouverneurs militaires dont les noms ne sont pas cités. En fait, Le Myre de Vilers a tendance à dénoncer un système plus que des hommes.

Notamment cette correspondance quelque peu gênante. « Saigon, le 23 avril. J’ai l’honneur de vous retourner ci-joint une expédition de jugement administratif concernant 19 rebelles fusillés. Signé : le directeur de l’Intérieur. La condamnation est postérieure à l’exécution.

Puis…

Monsieur le Gouverneur (18 mai), j’ai l’honneur de soumettre à votre approbation le jugement condamnant le nommé Tu, qui pris hier, a été exécuté hier soir à 4h30.” Le jugement : attendu que le prévenu avoue avoir déjà été Huyen de rebelles et avoir fait sa soumission à Saigon et qu’il avoue également avoir reçu des mains de Huan un Bang Kap de Phu qu’il a caché sur le sommet d’un arbre. Attendu que quand on l’a arrêté à Huong-Dinh, en se défendant, il a déchiré l’habillement d’un des notables. Attendu qu’il ne veut faire aucun aveu compromettant d’autres personnes, le déclarons coupable de rebellion et le condamnons à la peine de mort ».
Le gouverneur approuve en annotant “approuvé”
.

Prenons un autre jugement du 24 mai. « Attendu que ces deux derniers accusés sont lettrés et que Messieurs les lettrés ont été l’âme de la rebellion et le seront encore longtemps. Considérant que les trois accusés se sont présentés pour faire leur soumission, mais seulement deux jours après l’exécution de Huan, et que d’après leur physique, ils paraissent être nés pour la piraterie et la rebellion et qu’ils n’ont fait que des aveux incomplets. Les déclarons coupables de rebellion etc… et les condamnons tous les trois à la décapitation et demandons que leur peine soit commuée en celle de dix ans de détention à Poulo Condore ». Approuve le présent jugement sans commutation de peine : procéder immédiatement à l’exécution. Signé : le Gouverneur.

Continuons avec le jugement du 3 juin qui fait état ni plus ni moins d’aveux obtenus sous la violence, sinon sous la torture : « Monsieur le Gouverneur, j’ai l’honneur de soumettre à votre approbation le jugement concernant Tuen Phu. Un des rebelles Lam-Le, son frère le Doc-Binh, a été exécuté, il y a quatre jours, à Duong-Xuang. Je crois que Lam-Le pourrait être exécuté à … J’ai été obligé de faire donner quelques coups de rotin à Lam-Le pour lui arracher quelque chose. Sa première version était qu’il ne connaissait rien et qu’il avait tout oublié ». Le jugement approuvé – le Gouverneur.

Puis le jugement du 30 juin : « Condamnant quatre rebelles à la décapitation et six à la détention, le gouverneur condamne tous les accusés à la décapitation avec confiscation de leurs biens. Commue la peine capitale en celle de dix années d’exil en ce qui concerne Yovi et Hai ».

Enfin, mais les exemples pourraient continuer, le jugement du 23 juillet : « Administrateur de … à Monsieur le directeur de l’intérieur. Le Doc-Binh Khanh dit Kiet, arrive ce matin de Mytho, a été jugé et condamné à mort ». Le gouverneur a approuvé le jugement par télégramme. Khanh a été exécuté.

Page 70, Le Myre de Vilers évoque « M X… atteint d’une dysenterie violente dont il mourut, rendant ses arrêts sur sa chaise percée et s’imaginait remplir un devoir en se montrant impitoyable ».

Quelques descriptions de Peter Zinoman du système judiciaire colonial.

Peter Zinoman évoque aussi les détentions arbitraires à Poulo Condore.

The combination of Tonkin’s infant judicial system with the French Army’s aggressive military pacification campaign in the 1880s and 1890s resulted in the indiscriminate imprisonment of hundreds of suspected rebels. The haphazard workings of this piebald system were revealed in 1890, following an investigation into the arbitrary internment of Tonkinese prisoners on Poulo Condore”.
Certaines injustices flagrantes dénoncées par le procureur Daurand Forgues, un magistrat bien rare qui ne craint manifestement pas sa hiérarchie, sont mises en exergue par Peter Zinoman.

« The investigator, Attorney General, Daurand Forgues, detailed fifteen separate instances in which apparently innocent civilians had been seized by colonial troops, turned over to corrupt or inept local authorities, and sent to the islands, in many cases with-out intervening court proceedings as exemplified by the following excerpts from his report. “Pham Van Bao from Nam Sach district, Hai Duong Province, was fourteen when he was arrested. During a search of his village, someone informed the authorities that he had served as the domestic servant of a rebel chief. He was sent to a French resident who passed him on to the indigenous authorities. Without ever being questioned, they was sentenced to ten years hard labor by a mixed tribunal.

The case of 21-year-old Nguyen Pham Tu from Thuan Thanh district Bac Ninh province, is particularly remarkable. He told me that the wife of a rebel chief had lived in his village. When soldiers searched the village, they seized him and five other inhabitans, but not the woman, in question. After several days, four of the six paid a birbe and were released. He and Trinh Duc Pham, however, were too poor to afford the bribe. They were sentenced by the Bac Ninh mixed tribunal to life in prison. I have corroborated this story with Trinh Duc Pham who is currently deadly sick in the prison hospital. “

Au bagne de Poulo Condore, nombre de détenus n’ont jamais eu en main leur jugement. Certains ne savent pas non plus quand leur libération est prévue ou même pourquoi ils sont au bagne.

Le bagne I.

La priorité est de construire une prison digne de ce nom. Les bâtiments existants sur la Grande Condore ne sont pas adaptés aux Français et à leurs critères de sécurité. Les travaux de construction sont immédiatement engagés dès l’arrivée des Français pour aboutir au bagne I. Il rentre en fonctionnement en 1875. Il est construit par les détenus au prix d’efforts physiques très éprouvants. Cette installation accueille officiellement les droits communs mais aussi de nombreux Vietnamiens qui ont combattu les Français.

Dès le départ, la vie des prisonniers est très dure.

Les détenus dorment dans des grandes salles, sur des bats-flancs en béton armé, sur une natte, sans couverture.

La violence règne.

Sur dix crimes, neuf sont liés aux dettes de jeu. Les détenus jouent en effet au Ba-Quan, aux cartes, au xoc-dia. Les surveillants prennent des commissions sur les gains. Les armes permettant les règlements de comptes, sont des clous, des cercles de tinette travaillés, ou de crachoir, des pierres aiguisées.

Pendant une période, les détenus sont attachés deux par deux, par « de lourdes branches brancardes » qui leur meurtrissent les chevilles.

Quand l’un souhaite aller aux latrines, l’autre doit le suivre.

Le bruit infernal empêche alors tous les prisonniers de dormir.

Pour dominer, épuiser, rien de tel que de priver de sommeil ces bagnards.

Les peines disciplinaires :

Outre les articles 6 et 7 du règlement du bagne, le décret du 17 mai 1916 crée une peine d’isolement dans une salle ou une cellule spéciale pour les détenus dangereux ou qui refusent le travail. Le gouverneur prononce les peines d’isolement supérieures à trois mois.

Les peines disciplinaires sont nombreuses. Elles ont vocation à imposer une discipline visant à soumettre les hommes.

Les cellules disciplinaires ont un bat-flanc en béton armé. Elles sont munies d’un recipient pour les besoins naturels. Le détenu est attaché à une barre de justice. Un judas permet de surveiller le prisonnier. Les fers sont enlevés au prisonnier pendant deux jours au bout de chaque quinzaine. Pendant les dix premiers jours, le prisonnier est nourri avec une boulette de riz sec, un peu de sel et de l’eau. Une ration dite normale est donnée ensuite. Encore faut-il que le détenu ait survécu.

Maurice Demariaux nous explique qu’il y a la chaine simple. Les maillons sont dissimulés dans le pantalon, suspendus à la hanche par une ficelle. Il y a « la double » ou "la triple » chaine. Le condamné a les chevilles réunies par deux ou trois chaînes de un mètre cinquante de long. Il y a la chaîne avec le boulet, (le « coco » qui pèse cinq kilos).

Certains surveillants frappent les détenus avec la cadouille, une queue séchée de raie géante. Les cicatrices profondes sont caractéristiques. Elles permettent à la police de repérer les évadés.

Le directeur Cudenet aménage les salles 6 et 7 du bagne I afin d’y installer une centaine de prisonniers semi-politiques.

Mais qu’entend-on par l’expression semi-politique ?

Les semi-politiques sont des paysans, des intellectuels, des étudiants, des employés ayant eu un rôle dans les rebellions face à la colonisation. Beaucoup ont commis des faits connexes à des crimes politiques mais ont été jugés comme des délinquants de droit commun. La plupart ont été condamnés sur le fondement de l’article 91 du Code pénal cité plus haut.

Le bagne II.

En 1909, on relève le chiffre de 1.000 détenus. Le bagne I ne suffit pas à accueilir les convois de prisonniers. Beaucoup stationnent à la prison centrale de Saigon en attente de venir à Poulo Condore.

Le bagne II est achevé en 1917.

Il accueille alors officiellement les politiques. Maurice Demariaux, page 191 de son livre, fait la description d’installations qui s’améliorent au fil du temps. « Une grande cour de 120 m de long sur 80 de large. La mer est à 100 mètres. Des murs hérissés de tessons de bouteilles. Au milieu, 4 puits à margelle basse ». Mais au début du vingtième siècle, les aménagements sont très sommaires.

Maurice Demariaux décrit, bien après les débuts du bagne, des roses, des chrysanthèmes, des immortelles, des bégonias jaunes, des légumes, quelques volailles, propriétés privées chez les nationalistes, collectives chez les communistes. Les communistes arrivent après la première guerre mondiale. Les déportés et les détentionnaires ne sont pas obligés de travailler. Mais certains confectionnent des filets, des cordes, des vêtements, font de l’artisanat. Une activité permet de survivre, de contrôler mieux le temps.

La salle 1 du bagne II accueille certains tuberculeux. Les lépreux sont isolés dans de terribles conditions. Nous verrons l’histoire médicale du bagne dans un prochain article.

Le bagne III.

Signalons juste que le bagne III est construit à partir de 1928. Le bagne IV devait accueillir les prisonniers de guerre lors de la guerre d’Indochine mais il n’a jamais été terminé.

Le bagne III accueille les évadés repris, les assassins d’autres détenus, les auteurs d’actes de piraterie, les voleurs à mains armés, les auteurs de razzias et de rackets dans les territoires reculés. Les détenus arrivant du continent y séjournent pendant une huitaine de jours. Ainsi, les informations qu’ils donnent sont déjà obsolètes lorsqu’ils intègrent le bagne I ou II. Maurice Demariaux, page 197 de son livre, dit que les Cambodgiens sont les plus nombreux au bagne III. Nous verrons ce bagne III dans un autre article.

Les trois couleurs du bagne.

Le bleu est la couleur de la tunique des détenus qui travaillent. Le blanc est celle des boys, des cuisiniers, des coolies-bébés, des secrétaires, des comptables, des vigiles, des embusqués. Le kaki est celle des soldats du 11 e colonial et des gardiens.

Il y a la « bourse clandestine » des places de Tui Ao Trang. Les meilleures places pour les détenus sont mises aux enchères.

Les prisonniers portent une médaille en bois du nom de dinh bai, indiquant leur statut.

Selon Peter Zinoman, “caplans were distinguished from other prisoners by the bright and insignin C-M for contremaître”.

Les relegués.

Les relégués sont notamment dans le village de An Hai, occupé autrefois par l’empereur Gia Long, Les détenus sont bouviers, maçons, tailleurs de pierres, pêcheurs, cuisiniers, veilleurs de nuit, cantonniers, ramasseurs de fumier, charretier, légumier, garde-bananiers, chercheur et porteur d’eau, planton, boy de gardien, caplan ou mata, garde-cocotiers.

Sous les directeurs Cudenet et O’Connel, des terrains sont attibués en guise de concessions aux relégués. Mais la Grande Condore est limitée. Nous verrons dans un prochain article sur le bagne après la seconde guerre mondiale que le directeur Jacques Brulé dénonce la situation misérable des relégués.

La décortiquerie.

Le riz. La denrée alimentaire de base. Il en faut beaucoup, même si comme nous le verrons, les rations alimentaires restent nettement insuffisantes et contribuent grandement à la mortalité.

La décortiquerie est le lieu le plus craint, tant par les détenus que par le personnel de surveillance.

Matas, caplans, gardiens y pénètrent le révolver sorti, toujours à plusieurs, se couvrant mutuellement.

Pour éviter cet enfer, il faut réussir à corrompre. Mais les sommes à verser sont élevées.

Les détenus qui y travaillent ont le profil de meneurs, d’évadés de repris, d’agresseurs, de tortionnaires, de racketteurs, de récidivistes.

Les « frères ainés », les caïds aux tatouages représendant dragons et serpents, appartenant aux triades, mafias, confréries des bas-fonds de Saigon et de Cholon sont nombreux.

Ils ne se soumettent pas. Ils s’imposent au besoin en tuant tant les gardiens, matas, caplans que d’autres détenus.

Dans la décortiquerie s’épuisent des dizaines d’hommes. La poussière obstrue les yeux et infecte les poumons. Quatre machines, moins, plus, cela dépend du nombre de bagnards à nourrir. Le rythme est toujours infernal. “Composée d’une barrique, coupée en deux, une partie munie de dents, le paddy est versé par le haut de la machine. Les grains de riz tombent de côté, sans leur enveloppe ».
Quatre bagnards par barrique. Qui tournent comme des mulets, arc-boutés dans une chaleur horrible et dans une poussière épaisse et toxique.

Le partage du travail est rodé. Il y a les tamiseurs, ceux qui séparent le riz rouge du son, les pileurs, les balayeurs, les ravitailleurs en riz, en eau, les dormeurs, les guetteurs, les cuisiniers.

L’absence de lumière crée des pathologies oculaires que le médecin du bagne est impuissant à soigner. Les caplans assignés au Rice-Mill Stockade survivent rarement plus de six mois. nous précise Peter Zinoman. Beaucoup sont assassinés. Beaucoup de détenus meurent des mauvais traitements aussi.

Les classes des détenus.

Le décret du 17 mai 1916 distingue les détenus en trois classes.
La première classe comprend les mieux notés. Ces détenus peuvent obtenir une concession urbaine ou rurale, être employés chez les habitants de la colonie.
Les condamnés de la la deuxième classe sont employés à des travaux de colonisation et d’utilité publique pour le compte de l’Etat, de la colonie, des municipalités.
Les condamnés de la troisième classe sont affectés aux travaux les plus pénibles, la plupart du temps, des comblements de marais, des constructions de routes, des coupes de bois.
Les détenus peuvent passer d’une classe à l’autre. C’est une méthode pour donner un peu d’espoir d’améliorer son quotidien et d’inciter au calme.

Dans la réalité, les détenus sont dispatchés selon qu’ils sont droits communs, politiques et semi-politiques.

Tout depend des directeurs et des chantiers à l’extérieur. Mais de nombreux détenus ne dorment pas le soir au pénitencier, notamment les boys.

L’article 74 du règlement précise pourtant que les détenus, servant comme boys, ne peuvent ni de jour, ni de nuit, circuler sur le territoire des iles, c’est-à-dire, hors de l’enceinte du pénitencier, à moins qu’ils n’accompagnent les Européens auprès desquels ils sont détachés. Des dérogations existent dans la pratique, le personnel du bagne ayant besoin tout simplement de domestiques à des coûts imbattables.

La production du bagnard.

Chaque jour, le forçat doit normalement, cultiver, pêcher, aménager et produire. Pour les autres détenus, pour le personnel du bagne et dégager grâce à sa force de travail, un surplus permettant de rendre plus confortable la vie, et surtout de mieux manger. Pour un salaire misérable. Deux cents par jour en 1889. Sont déduits du pécule le prix des deux complets bleus par an, de deux nattes par an, et ... le prix du cercueil. Heureusement pour certains détenus, le jeu permet de faire circuler l’argent au sein du bagne.

Les révoltes et les évasions.

Ce ne sont que quelques exemples.

Le 28 juin 1862, la milice annamite en place sur la Grande Condore attaque les Français. Le décret de l’amiral Bonard date du 1 février 1862. Le 13 juillet 1862, le navire « le Norzagaray » débarque une section d’infanterie de marine pour mater l’insurrection. Les rebelles sont passés par les armes. La méfiance s’installe pour ne jamais plus se dissiper.

Le 9 avril 1864, une tentative d’empoisonnement est déjouée tout comme une tentative d’incendie de la prison. Gustave Viaud, médecin, remplaçant le directeur victime du choléra, aurait fait décapiter les meneurs.

En décembre 1864, l’état de Gustave Viaud qui a contracté le choléra s’aggrave. Il quitte Poulo Condore le 2 février 1865 pour se faire soigner à Saigon. Il meurt le 10 mars 1865 sur le bateau qui le rapatrie en France.

Les travaux de construction avancent. En juillet 1867, il y a environ 500 prisonniers dont certains refusent, par tous les moyens, grèves de la faim, mutineries, évasions, agressions, menaces, la captivité.

Le 1 janvier 1868, le directeur, Boubée, capitaine d’infanterie de marine, déjoue un autre complot. Dix neuf détenus sont pendus.

Le 27 août 1883, 150 détenus devant construire un phare à Bay Canh, se révoltent. Beaucoup sont repris mais certains disparaissent. Ont-ils survécu ? Le meneur Duong arrive à s’évader, mais on ne connait pas son sort. Une section d’infanterie de marine s’installe alors à demeure, prête à réprimer dans le sang toute nouvelle tentative de mutinerie et d’évasion collective. Les ordres sont clairs, abattre tout détenu qui tente de se révolter.

Le 17 juin 1890, 400 insurgés tentent de prendre le contrôle du bagne. 9 gardiens sont tués. Le directeur René fait donner la troupe. Des dizaines de prisonniers sont abattus, des dizaines sont blessés. L’infirmerie ne permet pas de soigner les blessés par balles. Ce qui renforce encore la haine des détenus pour le directeur et ses surveillants.

Le 28 août 1894, une autre révolte survient. Deux gardiens sont tués.

Le 25 juillet 1904, des prisonniers s’emparent d’une chaloupe et disparaissent. On ne sait pas ce qu’ils sont devenus.

En 1906, surviennent deux révoltes à la pêcherie. Le directeur, Morizet, licencié en droit, est sanctionné, pour ne pas être capable de détecter les tentatives d’évasions et savoir les réprimer. Pourtant, les informations remontent des matas, des caplans. Mais les détenus sont toujours à l’affût de la moindre occasion. Ils savent improviser.

Ses successeurs, Melaye, Cudenet, Gailland, administrateurs, seront eux aussi confrontés à quantité de révoltes. Le gouverneur leur demande d’être sans pitié.

Le 22 mars 1910, le gardien-chef Aujard et le gardien Burguez, sont tués. Deux rues de la Grande Condore portent leur nom.

Trois assassins sont guillotinés le 12 janvier 1911.

La guillotine est utilisée notamment dans la prison centrale de Saigon, Chi Hoa et de Hanoi, Hoa Lo. Au bagne de Poulo Condore, la pendaison, la guillotine, et exceptionnellement le peleton d’exécution (nous verrons le cas de Vo Thi Sau), sont utilisés.

Le 14 février 1918, le bagne I se révolte dans un bain de sang.

Le directeur Andouard, ancien combattant de la guerre de 14-18, manchot, croix de la légion d’honneur, fait intervenir l’infanterie coloniale.

La cuisine, la vannerie, la décortiquerie, la cour, et bien d’autres endroits où se réfugient les mutins, armés de masses, d’armes artisanales, sont criblés de balles.
Le bilan est très lourd : 83 morts, et de nombreux blessés qui mourront faute de soins.

Ce drame fait l’objet de critiques et d’articles. Qu’est ce bagne où les détenus sont massacrés ? Que peuvent-ils faire face à l’infanterie armée de fusils qui semble ne faire aucun prisonnier ?

Le directeur Andouard est jugé à Saigon par un conseil de guerre le 1 octobre 1918.

Acquitté à l’unanimité, il est confirmé à son poste en plus d’être cité à l’ordre du jour des troupes de l’Indochine.

Andouard aurait « lâché » deux tigres dans la montagne pour dissuader les évasions. En réalité, on ne trouve nulle trace de la moindre attaque tant vis-à-vis des villageois, des détenus, dont beaucoup travaillent sur des chantiers, que des hommes de la brigade des évasions.

Par ailleurs, les gardiens auraient été dotés d’armes beaucoup plus lourdes, si les tigres avaient rodé.

Le carnage de Andouard révolte les anticolonialistes. Ho Chi Minh sous le nom de Nguyen Ai Quoc, écrit alors un opuscule « C’est cela la justice des colonialistes français en Indochine ».

Mais le dossier Andouard s’étoffe.

Le 3 décembre 1919, le jeune Suu, boy du lieutenant Albert, commandant d’armes, pourtant un boy considéré comme un « élément fiable » s’empare d’un révolver. Il abat le directeur Andouard puis se suicide. Le lieutenant Albert prend alors le commandement du pénitencier et des iles, avec le grade de capitaine d’infanterie coloniale.

La vie du bagne est pontuée par des révoltes, des bains de sang, et des vengeances.

Tous les directeurs qui succèdent à Andouard savent qu’ils n’ont plus droit à l’erreur.

La brigade des évasions.

Une brigade, composée de volontaires, exclusivement motivés par la prime de capture, très crainte car capable d’exactions, de mises à mort et de tortures, entre en action dès les évasions constatées. Ni le Code pénal, ni le règlement du pénitencier ne prévoient cette brigade ad hoc.

Un effectif d’une vingtaine d’hommes. Des condamnés à perpétuité. La plupart du temps, des Cambodgiens. D’anciens pirates, des meurtriers, des trafiquants de drogue, des braqueurs, des assassins, des bandits de grand chemin, des proxénètes.

Les détenus vietnamiens et cambodgiens se détestent. L’administration française joue avec cette haine.

Certains membres de la brigade des évasions sont corrompus. D’autres sont de vrais limiers traquant les évadés dans les moindres recoins de la montagne. Ils portent un petit galon vert, les assimilant à des caplans.

Ces hommes ont des armes, des arbalètes, des coupe-coupe, des lances, des gourdins. Mais exceptionnellement, ils peuvent être dotés d’armes à feu lorsque les évasions sont massives.

Maurice Demariaux écrit page 134 qu’une fois repris, « les détenus sont frappés violemment, abattus parfois ».

Tout dépend de la poigne du directeur du bagne et de sa propension à "accepter" des exemples.

De très nombreux détenus s’évadent du pénitentier mais restent dans les îles. Ils « marronnent » parfois, notamment eu moment de la fête du Têt. Réfugiés dans les grottes, dans des excavations, se nourrissant de lézards, de fruits sauvages, ils dérobent la nuit aux villageois du riz, des denrées, des légumes. La végétation est hostile. Des arbres pleins d’épines. Des singes. Des varans. Des serpents. Des requins. Toute évasion doit être minutieusement préparée pour avoir une chance de réussir. De très nombreux détenus ne peuvent quitter l’île. Ils sont repris, punis, encore plus désespérés, malades, blessés, mourants, atteints du paludisme.

Les embarcations.

Les évadés ont besoin de temps pour confectionner des radeaux à défaut d’avoir pu s’emparer de chaloupes par la force ou par la ruse.

Maurice Demariaux dans son livre mais aussi Pierre Darcourt dans « Bay Vien, le maître de Cholon » donnent quelques indications.

« Le radeau est formé de dix troncs de sagoutiers de 6 mètres de long, reliés par des cordes de chanvre épaisses de 3 centimètres. Le mât en bois est en bois de manguier. Les provisions sont enfermées dans un abri en rondin couvert de feuilles de bananiers superposées. Il faut une poulie, un cordage. La grande voile carrée est en paille de riz, enroulée à deux cannes de bambous. Il y a les gaffes, les avirons, plus un aviron de gouverne. Les évadés se passent une corde autour du corps pour ne pas être projeté à la mer. Il y a les touques d’eau douce ».

Le calfatage des embarcations est une priorité. Le chemin varie. Incertain. Imprévisible. Comme la météo. Phan Thiet ou bien plus loin, le golfe du Siam. La mort. Rapide. Lente. Des cas d’antropophagie sont signalés. Souvent la chute à l’eau. Les requins nettoient. Mais aussi des succès.

Les guetteurs de baie.

Les évadés volent des embarcations, radeaux, chaloupes ou les construisent dans la montagne. Ils doivent ensuite accéder à une plage. Le danger : les guetteurs de baie. Des détenus libérables sous peu, chargés de surveiller en permanence les immenses plages. Abattage d’arbres, traces de pas, bruits, vols, caches de matériel, vols de nourriture, complicités de villageois, de gardiens, de caplans, des commerçants chinois sur l’ile, tout doit alerter ces guetteurs qui se retrouvent aux fers en cas de faille. Toute anomalie doit être signalée au gardien-chef.
Certains guetteurs de baie sont usuriers. Ils financent des évasions. D’autres se font corrompre. D’autres partent avec les évadés. De gré ou de force. Jetés en pleine mer aux requins ou débarquant sur le continent pour une nouvelle vie de fugitif. Le destin n’est pas figé. Tout est possible.

La France a signé un traité d’extradition en 1876 avec l’Angleterre pour rapatrier les évadés français du bagne de Nouvelle-Calédonie, parvenus au prix de bien des efforts, en Australie. Concernant les évadés du bagne de Poulo Condore, aucun instrument juridique n’existe car les détenus parviennent très exceptionnellement en Thaïlande, en Malaisie ou aux Philippines, à part quelques évadés recueillis en mer.

En général, les évadés qui échappent à la mort en mer, arrivent dans le delta du Mékong mais aussi dans la région de Phan Thiet où ils se fondent dans la population.

Jamais le bagne de Poulo Condore ne sera l’objet d’une attaque extérieure contrairement à beaucoup d’autres prisons. Toutefois, le contexte de la première guerre mondiale génère un certain nombre d’attaques, selon Georges Coulet.

Les sociétés secrètes en terre d’Annam.

Georges Coulet a écrit en 1926 “les sociétés secrètes en terre d’Annam”. En 1916, la prison centrale de Saigon est attaquée par des centaines d’adhérents d’une secte millénariste bouddhiste. Pour délivrer le pseudo-empereur Phan Xich Long, disent certains.

Mais selon Georges Coulet, les attaques sont organisées pour recruter avant tout des membres. Georges Coulet parle des attaques des prisons où étaient enfermés ceux qui refusaient de partir à la guerre 14-18. L’auteur precise qu’il y a eu des attaques dans 13 provinces.

Ce n’est donc pas un phénomène limité à Saigon.

Rappelons que 44 000 soldats vietnamiens servent dans des bataillons combattants sur le front, à Verdun sur le chemin des Dames, dans les Vosges, et sur le front d’ouest dans les Balkans.

Ils sont cuisiniers, infirmiers, chauffeurs, brancardiers, cantonniers, porteurs, armuriers. Ils “assainissent”le champ de bataille, c’est-à-dire qu’ils ramènent et enterrent les morts.

49.000 vietnamiens sont recrutés comme travailleurs sous régime militaire de 1916 à 1919. Ils travaillent dans les usines d’armement, à l’arsenal de Tarbes, aux poudreries de Bergerac. 93.000 soldats et ouvriers indochinois ont partipé à la première guerre mondiale.

La question est de savoir combien de Vietnamiens étaient consentants.

Afin de mieux illustrer cet article, essayons de faire un portrait d’un directeur qui a compté, et qui justement dirigeait le bagne en 1914 : Hugues O’Connel.

Portrait de Hugues O’Connel.

Hugues Joseph Eustache O’Connel est directeur de Poulo Condore en 1914. Son parcours est relativement bien connu, ce qui n’est pas le cas de beaucoup d’autres directeurs. Hugues O’Connel a démarré sa carrière comme commis-rédacteur. Il a été chef de service de l’immigration par arrêté du gouverneur général du 29 septembre 1894 après avoir été administrateur civil de 4 e classe à Can Tho.
On nous dit qu’il parle le tamoul, l’annamite et l’anglais. Il se lance dans la production et la plantation d’hévéas en 1904. Les quatre frères O’Connel se sont installés en Indochine à partir de 1885. Joseph est administrateur civil. Marcel est policier. Daniel travaille aux eaux et forêts.

Hugues O’Connel favorise le statut des relégués. Il développe la culture de la terre et l’élevage. Il donne une certaine indépendance aux prisonniers cambodgiens. L’inspecteur des affaires publiques, Quesnel, le 15 mars 1918, a fait un rapport de 27 pages, précisant les styles différents des directeurs. 0’Connel est repéré comme un directeur qui prend des initiatives visant à améliorer la vie des prisonniers. Initiatives toujours dangereuses selon le gouverneur car les détenus ont tendance à demander toujours plus.

A l’époque de Hugues O’Connel, les prisonniers politiques sont autorisés à vivre “in the Island ‘s bustling market town where they ran a grocery store and a small distillery” selon Peter Zinoman. Cette expérience est limitée, à cause des tentatives d’évasions.

Même les prisonniers répertoriés comme dangereux voient leur liberté accrue.
O’Connel augmente le Huynh Thuc Hkang (salaires). Il promeut certains détenus au grade de caplan. Il interdit les punitions corporelles.

Hugues O’Connel part à la retraite le 31 décembre 1917, avec le statut d’administrateur de 2 e classe des services civils de l’Indochine.

"L’avenir du Tonkin” du 25 janvier 1934 dit que Hugues O’Connel, est mort à 70 ans, à Saint-Girons, en Ariège.

Hugues O’Connel est remplacé par le lieutenant Andouard.

Deux directeurs bien différents. Le contraste ne peut être plus saisissant.

Ainsi, dans ce deuxième article sur l’histoire du bagne de Poulo Condore, quelques informations et citations de livres donnent des indications sur la vie au sein du bagne. Le prochain article sera consacré à la santé des détenus. On verra le rôle de l’Institut Pasteur, des épidémies, la piètre alimentation, et les violences physiques, morales, le manque d’espoir, qui ont tué énormément de détenus.
On se penchera notamment sur le sort tragique des prisonniers lépreux. Mais pas seulement...
A suivre...

Vincent Ricouleau Professeur de droit -Vietnam - Titulaire du CAPA - Expert en formation pour Avocats Sans Frontières - Titulaire du DU de Psychiatrie (Paris 5), du DU de Traumatismes Crâniens des enfants et des adolescents (Paris 6), du DU d'évaluation des traumatisés crâniens, (Versailles) et du DU de prise en charge des urgences médico-chirurgicales (Paris 5). Fondateur et directeur de la Clinique Francophone du droit au Vietnam.
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