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La rétention de sûreté : une nécessité qui en appelle une autre, par Gabriel Jean-Louis
Parution : vendredi 22 février 2008
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Si la création du dispositif de la rétention de sûreté comble un vide dans notre arsenal répressif (1), la naissance d’un tel dispositif suppose la mise en place de nouvelles garanties pour les libertés individuelles comme la saisine directe du Conseil Constitutionnel par les citoyens (2).

1) La rétention de sûreté comme substitut de la peine capitale :

Si de nos jours on ne croit plus aux loup-garous et aux vampires, les psychopathes sont en revanche une réalité de notre temps. De Marc Dutroux en passant par Fourniret et Emile Louis , la liste des tueurs en série et/ou auteurs de crimes atroces est une réalité à laquelle ne pouvait plus répondre notre arsenal répressif depuis l’abolition de la peine de mort.

En effet, la peine de mort a laissé la place à la réclusion criminelle à perpétuité mais qui n’a de perpétuelle que le nom du fait des remises de peines tant automatiques que sollicitées. Dès lors il n’y avait aucune mesure pour protéger la société des auteurs de crimes atroces et pathologiques. Aussi, le législateur a mis en place la période de sûreté, c’est-à-dire un laps de temps pendant lequel le condamné ne peut prétendre bénéficier de remises de peines. Mais là encore, cela n’empêchait pas la libération à terme de personnes dangereuses pour autrui.

Aussi, la rétention de sûreté répond à cette nécessité qui s’impose de mettre à l’écart de la société des psychopathes et autres criminels pathogènes. Cependant, cette possibilité de maintenir en détention des personnes sans qu’elles aient commis de faits est une nouveauté extrèmement attentatoire aux libertés et doit s’accompagner de protections nouvelles pour le citoyen comme la saisine directe du Conseil Constitutionnel.

2) La nécessaire mis en place de la saisine du Conseil Constitutionnel par les citoyens :

Notre droit comprend plusieurs curiosités parmi lesquelles la possibilité de contester une loi par les citoyens fait partie. En effet, tout citoyen peut soulever l’exception d’inconstitutionnalité d’une loi qui serait contraire aux droits de l’Homme devant une juridiction et peut saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour une loi qui violerait les Droits de l’Homme, mais il ne peut saisir la seule juridiction capable de censurer une loi contraire aux droits et libertés fondamentales à savoir le Conseil Constitutionnel.

Or, il peut être tentant pour un gouvernement d’étendre les hypothèses pour lesquelles la rétention de sûreté pourrait être appliquée. Confronté à une vague de criminalité voir de terrorisme, l’Etat français pourrait être tenté de développer la rétention de sûreté pour enrayer une vague de violences comme par exemple lors des émeutes en banlieue. La mise en place de la prison de Guantanamo par l’un des pays symbole de la liberté montre qu’il peut être tentant pour un état démocratique d’abuser de son pouvoir pour préserver ses intérêts.

C’est pourquoi, pour éviter un tel risque et ne pas faire peser de procès d’intention sur les gouvernements actuel et à venir, il est indispensable que le droit de chaque citoyen de saisir le Conseil constitutionnel pour faire censurer une loi contraire aux Doits de l’Homme doit être institué.

Le rapport de la Commission Balladur relative à la réforme des institutions promises pour le mois d’avril prévoit la mise en place de cette possibilité. Faisons confiance dans nos élites, et notamment Mr Jean-Louis Debré Président du Conseil Constitutionnel pour faire en sorte que cette disposition soit effectivement adoptée.

GABRIEL Jean-Louis

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