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Indemnisation de la victime d’accident de la vie. Par Avi Bitton, Avocat.
Parution : dimanche 5 avril 2020
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L’indemnisation des accidents de la vie :
- Quels sont les préjudices indemnisables ?
- Qui est responsable ?
- Comment négocier avec la compagnie d’assurance ?
- Qu’est-ce que la garantie accidents de la vie ?

I. Définition d’un accident de la vie.

Les accidents de la vie regroupent les accidents survenant au cours de la vie privée à l’exclusion des accidents du travail et des accidents de la circulation.

Ainsi, sont des accidents de la vie :

- Les accidents domestiques (survenant à l’occasion d’activités de bricolage ou de jardinage notamment)
- Les accidents survenus à l’occasion de la pratique de sports ou de loisirs
- Les accidents scolaires
- Les accidents médicaux
- Les accidents dus à une catastrophe naturelle
- Les attentats ou infractions.

Deux hypothèses coexistent : soit un tiers responsable de l’accident peut être identifié (II), soit l’assuré est lui-même responsable de l’accident ou le responsable ne peut être identifié (III).

II. La responsabilité d’un tiers.

A. La phase amiable.

Si un tiers est responsable de l’accident et qu’il a pu être identifié, il faut alors prendre contact avec son assurance et lui demander de prendre en charge le sinistre.

Il revient à la victime de prouver la faute, le préjudice et le lien de causalité.

Si l’assurance accepte le principe d’une prise en charge, une expertise médicale sera en général diligentée pour évaluer les préjudices de la victime.

Il y a aura ensuite une négociation sur le montant des indemnités.

B. La phase contentieuse.

Si l’assurance n’accepte pas de prendre en charge le sinistre ou si les négociations n’aboutissent pas, la victime peut saisir la justice afin que son préjudice soit indemnisé.

Le tribunal compétent est en principe le tribunal judiciaire. Toutefois, si le responsable de l’accident a aussi commis une infraction (par exemple, violences involontaires), il est possible de saisir les juridictions pénales.

C. Les préjudices indemnisables.

Le principe est la réparation intégrale des préjudices subis par la victime. Il s’agit d’indemniser tout le préjudice mais rien que le préjudice.

On distingue les préjudices patrimoniaux, qui touchent le patrimoine de la victime, et les préjudices extrapatrimoniaux qui ne concernent pas le patrimoine de la victime.

On distingue aussi les préjudices temporaires, qui ont été subis par la victime avant la consolidation de son état, et les préjudices permanents qui sont les préjudices existants après la consolidation.

La consolidation est le moment où l’état de santé de la victime est stabilisé, n’est plus susceptible d’évoluer.

1/ Les préjudices patrimoniaux qui peuvent être indemnisés sont :

• Pour les préjudices patrimoniaux temporaires :

o Les dépenses de santé actuelles : il s’agit des dépenses de santé (hospitalières, pharmaceutiques) qui sont restées à la charge de la victime entre la date de l’accident et celle de la consolidation.

o Les frais divers : ce sont les frais exposés par la victime entre le moment de l’accident et la date de consolidation (par exemple frais d’expertise, frais de transport).

o Les pertes de gains professionnels actuels : il s’agit d’indemniser les pertes de revenus de la victime.

• Pour les préjudices patrimoniaux permanents :

o Les dépenses de santé futures : ce sont des dépenses de santé qui seront exposées par la victime après la consolidation de son état et qui resteront à sa charge.

o Les frais de logement adapté : ce sont les frais d’équipement du logement de la victime (par exemple douche à l’italienne, rampes).

o Les frais de véhicule adapté : il peut s’agir de prendre en charge l’aménagement du véhicule de la victime (par exemple changer une boîte de vitesse manuelle en automatique), de prendre en charge les frais relatifs à l’achat d’un nouveau véhicule ou les frais découlant de la nécessité d’utiliser les transports en commun.

o L’assistance par tierce personne : il s’agit de l’aide humaine apportée par des proches de la victime ou par un prestataire pour l’aider à accomplir les actes de vie courante (notamment toilette, alimentation, habillement, ménage, surveillance).

o La perte de gains professionnels futurs : elle est définie dans la nomenclature Dintilhac (un document de référence en matière de dommage corporel), comme l’indemnisation de « la perte ou de la diminution des revenus consécutive à l’incapacité permanente à laquelle la victime est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du dommage. »

o L’incidence professionnelle : ce poste vise à indemniser les conséquences négatives de l’accident sur la carrière professionnelle de la victime (notamment perte de chance de promotion, pénibilité accrue).

o Le préjudice scolaire, universitaire ou de formation : il vise à indemniser le retard dans la formation ou l’interruption de la formation en lien avec l’accident.

2/ Les préjudices extrapatrimoniaux sont :

• Pour les préjudices extrapatrimoniaux temporaires :

o Le déficit fonctionnel temporaire : il est défini dans la nomenclature Dintilhac comme visant à « indemniser l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle jusqu’à sa consolidation ». Il s’agit d’indemniser les « périodes d’hospitalisation mais aussi la perte de qualité de vie et celle des joies usuelles de la vie courante ».

o Les souffrances endurées : il s’agit des souffrances physiques ou psychiques qui ont été ressenties par la victime. Elles sont évaluées sur une échelle de 1 à 7.

o Le préjudice esthétique temporaire : il vise à compenser l’altération temporaire de l’apparence physique de la victime (exemple : nez cassé, dents cassées, claudication). Il est aussi évaluée sur une échelle de 1 à 7.

• Pour les préjudices extrapatrimoniaux permanents :

o Le déficit fonctionnel permanent : il vise à indemniser, selon la nomenclature Dintilhac, « non seulement les atteintes aux fonctions physiologiques de la victime, mais aussi la douleur permanente qu’elle ressent, la perte de la qualité de vie et les troubles dans les conditions d’existence qu’elle rencontre au quotidien après sa consolidation ». Ce poste de préjudice a aussi pour objet de réparer la perte d’autonomie subie par la victime.

o Le préjudice d’agrément : il s’agit de l’impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer certaines activités qu’elle affectionnait et pratiquait régulièrement ou à tout le moins de l’impossibilité de continuer à pratiquer ces activités dans les mêmes conditions (fréquence, intensité).

o Le préjudice esthétique permanent : c’est l’altération définitive de l’apparence de la victime.

o Le préjudice sexuel : il s’agit d’indemniser la perte de libido, de plaisir sexuel, de fertilité ainsi que l’éventuel préjudice morphologique.

o Le préjudice d’établissement : il vise à indemniser l’impossibilité pour la victime d’avoir un projet de vie familiale normale.

III. La garantie accident de la vie (GAV).

Si la victime est responsable de l’accident ou si le responsable de son accident ne peut être identifié, elle n’a aucune possibilité d’être indemnisée, sauf si elle a souscrit une garantie accident de la vie.

Le contrat GAV peut couvrir l’assuré uniquement ou couvrir sa famille (son époux, partenaire de PACS ou concubin et ses enfants).

Les garanties ne sont mobilisables qu’en présence d’un taux d’incapacité permanente minimal, prévu au contrat. Il ne peut pas être supérieur à 30% mais le plus souvent le taux prévu par les polices d’assurance est inférieur.

En général, une expertise médicale est nécessaire pour savoir si ce seuil a été atteint et ainsi, si le sinistre peut être pris en charge.

En outre, le montant de l’indemnisation est plafonné. Ce plafond ne peut être inférieur à 1 million d’euros.

Enfin, l’âge d’adhésion limite pour ce type de contrat est fixé à 65 ans.

Il est utile de recourir aux services d’un avocat dans les échanges avec l’assurance. L’avocat sera, en effet, en mesure d’analyser le contrat et de savoir exactement ce à quoi son assuré peut prétendre, ce qui sera un atout dans les négociations avec l’assurance.

L’offre d’indemnisation de la compagnie d’assurance doit intervenir dans les 5 mois après l’accident.

La victime a alors un mois pour refuser ou accepter l’offre. Si l’offre est acceptée, l’assureur doit procéder au paiement dans le délai d’un mois.

Avi Bitton, Avocat, Ancien Membre du Conseil de l’Ordre Tél. : 01.46.47.68.42 Courriel: [->avocat@avibitton.com] Site: [->https://www.avibitton.com]