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La mise en oeuvre de la notion de dommages intermédiaires. Par Cécile Hoestlandt, Juriste d’affaires.
Parution : mercredi 8 avril 2020
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D’origine jurisprudentielle, la notion de dommages intermédiaires permet la mise en oeuvre de la responsabilité contractuelle d’un constructeur. Mais quelles conditions sont requises et est-elle compatible avec le jeu des garanties légales ?

Par un arrêt de principe du 10 juillet 1978, l’arrêt Delcourt, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a instauré la notion de « Dommages Intermédiaires » [1].

Ce nouveau cas d’indemnisation fondé sur la mise en jeu de la responsabilité contractuelle du constructeur s’ajoute aux garanties légales de celui-ci régies par le code civil, que sont :

De manière similaire aux garanties légales, sont concernés l’ensemble des entreprises de construction et les constructeurs assimilés par l’article 1792-1 du code civil, à savoir :

A titre d’exemple, la responsabilité du vendeur d’un ouvrage à construire (vente à terme ou vente en état futur d’achèvement) est susceptible d’être engagée au titre des dommages intermédiaires, tout comme les promoteurs immobiliers.

Concernant d’abord le champ d’application de cette responsabilité contractuelle :

Le vendeur-constructeur a l’obligation de remettre à l’acquéreur un bien exempt de vices. Sa responsabilité pourra alors être mise en cause en présence de dommages apparus après la réception de l’ouvrage. Pour autant, ces dommages sont a priori exclus du champ d’application des garanties légales sus évoquées pour les raisons suivantes :

S’agissant ensuite de la mise en œuvre de cette responsabilité contractuelle :

A l’inverse de la garantie décennale qui est un mécanisme de responsabilité présumée du constructeur, la mise en jeu de la responsabilité du constructeur-vendeur en cas de vice intermédiaire est subordonnée à la preuve de sa faute.

Ainsi, alors que le constructeur sera réputé responsable de tous dommages de nature décennale, à charge pour lui de démontrer que les dommages proviennent d’une cause qui lui est étrangère, il appartiendra, a contrario, au Maître d’ouvrage de démontrer que son constructeur a commis une faute, faute qui est à l’origine du dommage. La seule existence du dommage ne suffit pas pour engager la responsabilité contractuelle du constructeur-vendeur.

Il a ainsi été jugé qu’un entrepreneur n’avait pas commis de faute en choisissant un matériau à l’origine des microfissurations du revêtement d’un mur de façade sur recommandation de son fournisseur habituel.

Cependant, la responsabilité contractuelle a déjà été retenue en présence d’un manquement au devoir de conseils vis-à-vis du Maître d’ouvrage en raison du choix fait par lui d’un produit inadéquat et du non-respect des dispositions du DTU lors de la mise en œuvre du revêtement plastique.

Par ailleurs, il convient de noter que l’entrepreneur peut voir également sa responsabilité contractuelle engagée pour les désordres intermédiaires causés par un de ses sous-traitants.

La question du régime de prescription s’est également posée puisque aucun article du code civil ne venait aborder ce sujet d’origine jurisprudentielle. Les juges appliquaient le délai de 10 à compter de la réception et non le délai trentenaire de droit commun. Aujourd’hui et depuis la réforme de la prescription de 2008, le débat est clos. Trouve à s’appliquer l’article 1792-4-3 du code civil qui uniformise les délais de recours à l’encontre des constructeurs à 10 ans à compter de la réception des travaux. En l’absence de réception, le délai de 10 ans court à compter de la manifestation du dommage.

A noter enfin, qu’à l’instar de la garantie biennale, la souscription d’une assurance couvrant les désordres intermédiaires est facultative, alors que la garantie décennale fait l’objet d’une obligation d’assurance pour les ouvrages qui y sont soumis.

Cécile Hoestlandt