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Non-respect du confinement : le point sur les sanctions. Par Flora Labrousse, Avocat. .
Parution : jeudi 9 avril 2020
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Depuis le mardi 17 mars 2020, les citoyens français ont l’obligation de rester chez eux et ne sont autorisés à se déplacer à l’extérieur de leur domicile qu’en cas de « nécessité » et obligatoirement munis d’une attestation dérogatoire de déplacement énumérant les déplacements autorisés.

Tous les citoyens français qui se déplacent pour des motifs non autorisés, ou en l’absence d’une attestation dérogatoire de déplacement complétée en bonne et due forme, ou bien encore en violation des mesures prises par le préfet concernant les interdictions d’accès à certains lieux, ou des couvre-feux dans certaines villes de France, s’exposent à de lourdes sanctions.

Toutefois, depuis la date du 17 mars 2020, les sanctions pour non-respect des mesures de confinement ont été modifiées à quatre reprises.

Je vous propose un aperçu des sanctions qui ont été actées, en cas de non-respect du confinement, au fil des jours, depuis le début de la crise sanitaire en France :
- Le 17 mars 2020 : L’amende pour non-respect du confinement avait été fixée à 38€, il s’agissait d’une amende de 1ère classe.
- Dès le 18 mars 2020 : La contravention est passée de 38€ à 135€ [1] outre l’application des dispositions de l’article 529 du code de procédure pénale.
L’amende à laquelle chaque citoyen français s’expose en cas de violation des règles de confinement est une contravention de 4ème classe qui a été spécifiquement créée pour la violation des interdictions de se déplacer hors de son domicile et en cas de non-respect de l’obligation de se munir du document justifiant les déplacements durant la période de la crise sanitaire.
- Le 24 mars 2020 : de nouvelles sanctions étaient applicables, par palier, en cas de violation réitérée de l’obligation de confinement :
- En cas de première violation à l’obligation de confinement, l’amende était toujours fixée à 135 € (majorée à 375 € si elle n’est pas payée dans le délai imparti) ;
- En cas de nouvelle violation dans les quinze jours suivants, il avait été annoncé pendant quelques jours seulement que l’amende serait portée à 1.500 € ;
- En cas de verbalisation à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, il était prévu que l’infraction devienne un délit puni de 3 750 € d’amende et d’une peine d’emprisonnement de six mois au maximum, outre des peines complémentaires (travail d’intérêt général ou suspension du permis de conduire).
- Le 28 mars 2020 de nouvelles sanctions ont été édictées, qui sont applicables à ce jour :
- En cas de première violation à l’obligation de confinement, l’amende était toujours fixée à 135€ (majorée à 375€ si elle n’est pas payée dans le délai imparti) ;
- En cas de nouvelle violation dans les quinze jours suivants, l’amende a été portée de 1 500 € à 200 € (majorée à 450 € si elle n’est pas payée dans le délai imparti)  ; il s’agit d’une forfaitisation de la contravention de 5ème classe, conformément au décret [2] qui est venu modifier l’article R49 du code de procédure pénale.
Pour information, il s’agit d’une nouveauté : avant le 29 mars 2020, la contravention de 5ème classe - la classe la plus grave sur l’échelle des contraventions – ne faisait pas l’objet d’une amende forfaitaire. Seul le tribunal de police était compétent pour fixer le montant de l’amende, laquelle ne pouvait dépasser la somme de 1.500 € sauf en cas de récidive.
- En cas de verbalisation à plus de trois reprises dans un délai de 30 jours, les dispositions de l’article L3136-1 du code de la santé publique prévoient que la violation réitérée des mesures de confinement devient un délit puni de 3.750 € d’amende et d’une peine d’emprisonnement de six mois au maximum, outre des peines complémentaires (travail d’intérêt général ou suspension du permis de conduire).

A noter que : les délits constituent la catégorie intermédiaire d’infractions, en ce qu’ils sont plus graves qu’une contravention mais moins graves que les crimes. Toutefois, la personne qui se rend coupable d’un délit est jugée devant un tribunal correctionnel.

Quelques exemples de condamnations en comparution immédiate pendant le confinement.

C’est ainsi que, par exemple, un homme de 22 ans a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris le mardi 31 mars 2020 à 105 heures de travaux d’intérêt général pour non-respect réitéré du confinement.

Une femme de 24 ans a également été condamnée par le tribunal correctionnel d’EVRY le mardi 24 mars 2020, en état de récidive légale, à sept mois de prison ferme et 350 euros d’amende, pour ne pas avoir respecté les mesures de confinement et après avoir craché sur les policiers qui l’ont contrôlée en leur indiquant être infectée par le coronavirus.

Quid du délit de mise en danger d’autrui ?

Par ailleurs, depuis le début des mesures sanitaires, de nombreuses personnes déjà verbalisées en raison de la violation des mesures de confinement ont été placées en garde à vue pour « mise en danger d’autrui », infraction prévue et réprimée par les dispositions de l’article 223-1 du code pénal qui prévoient une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende pour « le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ».

Pour que cette qualification pénale puisse être retenue, plusieurs éléments doivent être réunis :
- 1°) une violation d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement (en l’espèce, le confinement),
- 2°) un agissement manifestement délibéré (en l’espèce, l’intention de nuire)
- 3°) ayant exposé directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente (en l’espèce, le covid-19, avec cette circonstance qu’il convient de démontrer un lien de causalité).

La caractérisation du délit de mise en danger d’autrui nécessitant la réunion de plusieurs éléments dont la preuve est difficile à rapporter en cette période de crise sanitaire, cela explique la création d’un nouveau délit « de réitération de l’infraction de non-respect des règles du confinement ».

Flora LABROUSSE, Avocat au Barreau de Paris Consultation : https://consultation.avocat.fr/cabinets/cabinet-flora-labrousse-75009-41967a87ce.html Site internet : https://9trevise-avocat.com/

[1Conformément au décret D. n° 2020-264, 17 mars 2020, JO 18 mars.

[2D. n° 2020-357, 28 mars 2020, JO 29 mars.

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