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Les violences contre les enfants mineurs au sein de la famille. Par Avi Bitton et Lois Pamela Lesot, Avocats.
Parution : jeudi 23 avril 2020
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Quels types de violences sont sanctionnées par le Code pénal ?
Comment ces violences sont-elles dénoncées à la justice ?
Quelles sont les sanctions encourues ?

Les violences faites aux enfants peuvent prendre de multiples formes : violences physiques, violences psychologiques, et négligences. Elles sont toutes punies par la loi et des procédures spécifiques existent afin que les auteurs soient poursuivis en justice.

I. Les violences physiques.

Constituent des faits de violences physiques à l’encontre d’un enfant le fait de le frapper avec la main, le pied ou un objet, de le mordre, de le droguer, de le brûler, de l’étrangler ou de l’étouffer, de le secouer, de le bousculer, etc.

La commission d’un de ces actes, même de façon non répétée ou habituelle, suffit à constituer une infraction pénale punie par la loi.

La sanction prévue par le Code pénal est plus grave lorsque ces actes ont été commis par un parent ou par un proche de l’enfant.

Lorsque la victime a 15 ans ou moins, les violences physiques commises par ses parents, ses grands-parents ainsi que par toute personne ayant autorité sur lui sont punies jusqu’à :

- 30 ans de prison lorsqu’elles ont entrainé la mort de l’enfant ;
- 20 ans de prison lorsqu’elles ont entraîné une infirmité permanente ;
- 10 ans de prison et 150 000€ d’amende lorsqu’elles ont entrainé des blessures graves ;
- 5 ans de prison et 75 000€ d’amende lorsqu’elles ont entrainé des blessures moins graves.

Lorsque la victime mineure a plus de 15 ans, les violences physiques commises par ses parents, ses grands-parents ainsi que par toute personne ayant autorité sur lui sont punies jusqu’à :
- 20 ans de prison lorsqu’elles ont entrainé la mort de l’enfant ;
- 15 ans de prison lorsqu’elles ont entraîné une infirmité permanente ;
- 5 ans de prison et 75 000€ d’amende lorsqu’elles ont entrainé des blessures graves ;
- 3 ans de prison et 45 000€ d’amende lorsqu’elles ont entrainé des blessures moins graves.

Est également sanctionné par la loi pénale le fait de forcer un mineur à consommer des substances dangereuses (alcool, tabac, stupéfiants), ou à en faire un usage illicite.

Par ailleurs, le « droit de correction », qui permettait aux parents d’user de violences physiques et psychologiques (fessées, gifles, humiliations, insultes, brimades, etc.) à l’égard de leur enfant dans un cadre éducatif, tant que ces actes n’étaient ni excessifs ni habituels, est interdit depuis la loi du 10 juillet 2019. Aucune sanction n’est néanmoins prévue en cas de non-respect de cette interdiction. La distinction entre ces violences dites éducatives et les violences physiques et psychologiques punies par la loi pénale est laissée à la libre appréciation du juge.

II. Les violences psychologiques.

Les violences psychologiques sont plus difficiles à discerner que les violences physiques, mais leurs conséquences peuvent être tout aussi graves.

Sont par conséquent punis par la loi les insultes ou les propos dénigrants, les humiliations, les menaces, les intimidations, etc., et ce au même titre que les violences physiques précédemment décrites.

III. Les négligences.

Constitue une négligence envers un mineur le fait pour une personne responsable d’un enfant (parents, grands-parents ainsi que toute personne ayant autorité sur lui) de le priver des éléments indispensables à son développement et à son bien-être. Il s’agit d’une forme de maltraitance par omission, qui peut prendre la forme de privation de nourriture, de soins, de sommeil ou encore d’attention.

Le fait, pour un parent ou pour une personne détentrice de l’autorité parentale de priver un enfant de nourriture ou de soins au point de compromettre sa santé est puni jusqu’à 7 ans d’emprisonnement et de 100 000€ d’amende. Lorsque ce fait a entrainé la mort de l’enfant, ce crime est puni jusqu’à 30 ans de réclusion criminelle.

De même, le fait pour un parent de se soustraire, sans motif légitime, à ses obligations légales au point de compromettre la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de son enfant mineur est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000€ d’amende.

IV. La dénonciation des violences contre un enfant mineur au sein de la famille.

Toutes les formes de maltraitance à l’égard d’enfants au sein du cadre familial sont potentiellement lourdes de conséquences : les séquelles qui en découlent peuvent être physiques, mais également neurologiques, psychologiques et comportementales. C’est pourquoi la loi oblige les personnes témoins de maltraitances envers les enfants à en informer les autorités et met en place des procédures spécifiques pour ces témoins et pour les victimes.

A. L’obligation d’informer les autorités des violences subies par un enfant.

Le fait, pour quiconque ayant connaissance d’un crime dont il est encore possible de prévenir ou de limiter les effets, ou dont les auteurs sont susceptibles de commettre de nouveaux crimes qui pourraient être empêchés, de ne pas en informer les autorités judiciaires ou administratives est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

De même, toute personne ayant eu connaissance de privations, de mauvais traitements ou d’agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur doit en informer les autorités judiciaires ou administratives. A défaut, elle encourt trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.

Par ailleurs, toute menace ou tout autre acte d’intimidation commis en vue de persuader la victime d’une infraction à ne pas porter plainte ou à se rétracter est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000€ d’amende.

B. La procédure à suivre afin de dénoncer des violences subies par un enfant.

Si vous êtes la victime ou le témoin de violences perpétrées contre un enfant, il convient de vous adresser à des professionnels de la protection de l’enfance, dont le rôle est de vous conseiller et d’évaluer les suites à donner à la situation dont vous leur faites part :

- Appeler le 119, le numéro d’appel national de l’enfance en danger, gratuit et ouvert 24h/24 ;

- Adresser un courrier à la Cellule de recueil des informations préoccupantes (CRIP) au sein des services de votre Conseil départemental, composée de professionnels chargés d’évaluer les situations de danger et de déclencher si besoin des mesures de protection ;

- Contacter une association de défense des enfants victimes de maltraitances.

Dans les cas les plus graves (maltraitance avérée ou violences physiques, psychologique ou sexuelles), il est conseillé de faire appel à un avocat, afin qu’il puisse effectuer pour vous un signalement ou déposer une plainte auprès du Procureur de la République.

Le signalement peut être effectué de la part de toute personne, victime ou témoin de violences contre un enfant. En revanche, la plainte ne peut être déposée que par l’enfant victime ou son avocat, et ce même si ses propres parents sont impliqués dans les faits. Le but est de demander à la Justice, après une enquête et un procès, de condamner l’auteur des violences et maltraitances à :

- Des sanctions pénales (prison et amende) ;

- Des peines complémentaires (interdiction des droits civiques, civils et de famille, retrait total ou partiel de l’autorité parentale, suivi socio-judiciaire, etc.) ;

- L’indemnisation pécuniaire de la victime. Pour cela, il faut que celle-ci se constitue partie civile.

Un mineur ne peut se constituer lui-même partie civile : ses parents ou représentants se constituent partie civile pour lui. Néanmoins, si ceux-ci sont impliqués dans les violences, un administrateur ad hoc peut être désigné par la Justice.

Par ailleurs, en raison des liens étroits existant entre les violences conjugales et les violences à l’encontre des enfants, la loi prévoit que lorsque les violences exercées au sein d’un couple mettent en danger un ou plusieurs enfants, le Juge aux affaires familiales peut délivrer en urgence une ordonnance de protection. Les mesures ainsi prises peuvent consister en une interdiction pour l’auteur des faits de rentrer en contact avec le ou les enfants, une interdiction de se rendre dans certains lieux tels que leur domicile du ou des enfants, une interdiction de porter ou de détenir une arme, etc.

Avi Bitton, Avocat, Ancien Membre du Conseil de l’Ordre Lois Pamela Lesot, Avocat Tél. : 01.46.47.68.42 Courriel: [->avocat@avibitton.com] Site: [->https://www.avibitton.com]