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L’essentiel des apports et modifications de la nouvelle procédure de divorce judiciaire. Par Caroline Le Bot, Avocat.
Parution : mercredi 22 avril 2020
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La loi n°2019-222 du 23 mars 2019 est venue réformer la procédure de divorce judiciaire.

Depuis le 1er janvier 2017, le divorce par consentement mutuel s’effectue désormais sans le contrôle du juge.

Trois cas de divorce restent néanmoins concernés par cette nouvelle réforme : le divorce pour acceptation de la rupture du mariage, plus communément appelé le divorce « accepté », le divorce pour altération définitive du lien conjugal et le divorce pour faute.

Le décret 2019-1380 du 17 décembre 2019 fixe la date d’entrée en vigueur de la nouvelle procédure au 1er septembre 2020.

En raison des circonstances actuelles dues à la crise sanitaire du COVID-19, l’entrée en vigueur de cette nouvelle procédure serait susceptible d’être reportée.

Un petit tour d’horizon sur les nouvelles mesures applicables s’impose néanmoins.

I. Apports et modifications relatifs à l’introduction et au déroulement de l’instance

A. La suppression de la procédure en 2 étapes.

Le principe actuel veut que la procédure de divorce judiciaire se déroule en 2 temps :

Première étape, l’un des deux époux saisit le Tribunal d’une requête initiale en divorce, par laquelle il sollicite la fixation de mesures provisoires.

Chacun des époux est convoqué à l’audience de conciliation où le juge les reçoit séparément pour vérifier leur consentement et que la non conciliation est acquise.

L’ordonnance de non conciliation est ensuite rendue, statuant sur les meures provisoires et valable 30 mois. Durant ce délai, l’un des époux doit entamer la deuxième étape de la procédure, à défaut l’ordonnance est caduque.

La deuxième étape consiste dans l’assignation en divorce, rédigée par l’avocat d’un des époux et délivrée à l’autre époux, qui devra constituer avocat pour faire valoir ses arguments, puisque cette deuxième étape est soumise à ministère d’avocat obligatoire.

L’assignation sera ensuite enrôlée au greffe.

Une première date de mise en état sera fixée puis, après la phase d’échange des conclusions en mise en état, le dossier sera clôturé et fixé à plaider, pour enfin obtenir le jugement du divorce.

La nouvelle procédure applicable met fin à cette procédure en 2 étapes, la procédure est initiée au moyen d’une assignation introductive d’instance.

La voie de l’assignation est généralisée, sauf dans le cas du divorce accepté où les époux ont contresigné avec leurs avocats un procès verbal d’acceptation du divorce. Il s’agit donc en l’espèce d’un acte d’avocat.

La procédure est alors initiée par une requête conjointe des époux, à laquelle est annexé l’acte d’avocat.

B. Mentions obligatoires de l’assignation introductive d’instance.

Outre les mentions propres aux assignations et requêtes prescrites aux articles 54 et 56 du Code de procédure civile, l’assignation en divorce devra toujours, comme auparavant, contenir une proposition de règlement des intérêts pécuniaires et patrimoniaux du divorce (article 257-2 du Code civil), à peine d’irrecevabilité de la demande.

L’assignation introductive devra également contenir les date, heure et lieu de tenue de l’audience d’orientation et sur mesures provisoires, à peine de nullité de celle-ci, ainsi que les dispositions relatives à la médiation, la procédure participative et les accords complets ou partiels sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale et les conséquences du divorce.

C. La place des mentions provisoires.

Il s’agit des mesures qui sont actuellement sollicitées dans la requête initiale en divorce.

Les mesures provisoires pourront être présentées de 2 façons.

Elles peuvent d’abord être contenues dans le corps de l’assignation.

Si l’assignation contient des demandes sur les mesures provisoires, celles-ci devront être présentées de manière distincte des mesures au fond.

En d’autres termes, l’assignation devra contenir une partie relative aux mesures provisoires et une autre concernant les demandes au fond [1].

L’assignation ne contiendra pas automatiquement de demandes relatives à ces mesures.

Dans ce cas, il sera possible pour les parties de solliciter ces mesures en cours de procédure, par voie de conclusions, sur la base de l’article 789 du Code de procédure civile.

Il ne sera pas nécessaire dans ce cas de justifier d’un élément nouveau.

D. La saisine du tribunal.

La date de l’audience d’orientation doit être mentionnée à peine de nullité dans l’assignation introductive de l’instance en divorce.

Cette date doit être demandée auprès du greffe, qui la communique par tous moyens.

A terme, le but est de généraliser la communication électronique.

Seule la remise de l’assignation au greffe saisit valablement la juridiction.

Ce délai est de :
- 2 mois avant l’audience d’orientation lorsque la date de l’audience a été communiquée par voie électronique.
- 15 jours avant l’audience d’orientation, si la date a été communiquée par un autre moyen ou si l’audience d’orientation a été fixée à moins de 2 mois.

Le non respect de ces délais entraîne la caducité de l’assignation, relevée d’office par le juge ou à la demande de l’une des parties.

Le défendeur dispose quant à lui de 15 jours pour constituer avocat, comme dans toute assignation.

E. Le déroulement de l’instance.

La première audience est l’audience d’orientation et éventuellement de fixation des mesures provisoires, si l’assignation contient des demandes à ce sujet.

Il n’y a plus d’entretien séparé des époux avec le juge et la présence es parties à l’audience d’orientation devient facultative.

Lors de l’audience, les parties assistées ou représentées par leurs avocats peuvent opter pour la procédure de mise en état classique ou la procédure participative.

Le juge aux affaires familiales est juge de la mise en état mais aussi juge de l’urgence. Il statue sur les demandes urgentes, non plus fondées sur l’article 257 du Code civil, qui disparait au profit de l’article 789 du Code de procédure civile.

F. L’audience de plaidoirie.

Cette audience peut être supprimée avec l’accord express des 2 époux [2].

Si le juge l’estime nécessaire ou si l’une des parties le demande, une audience de plaidoirie peut avoir lieu.

II. Apports et modifications propres à chaque cas de divorce.

A. Le divorce accepté.

L’acceptation du principe de la rupture du divorce peut intervenir soit lors de l’audience de conciliation, dans ce cas les époux et leurs avocats contresignent un procès verbal d’acceptation du divorce, qui est annexé avec la requête initiale en divorce à l’ordonnance de conciliation, soit ultérieurement et en cours de procédure, par une déclaration d’acceptation du divorce de chacun des époux.

Ces deux formes d’acceptation ont été conservées dans le cadre de la nouvelle procédure mais une troisième forme d’acceptation fait son apparition : l’acte sous signature privée contresignée par les avocats des parties.

La demande en divorce sera alors dans ce cas formulée par voie de requête conjointe des époux, à laquelle sera annexé cet acte d’avocat.

B. Le divorce pour altération définitive du lien conjugal.

L’apport de la réforme tient au délai.

En effet, en application de l’article 238 du Code civil, le divorce peut être obtenu si les époux vivent séparés depuis 2 ans à la date de la demande en divorce, soit à l’heure actuelle, à la date de l’introduction de l’assignation en divorce, intervenant après la première étape de l’audience de conciliation et de l’ordonnance de conciliation fixant les mesures provisoires.

Ce délai était déjà passé de 6 ans à 2 ans lors de la réforme du divorce issue de la loi du 26 mai 2004.

La nouvelle réforme réduit une nouvelle fois ce délai à 1 an, la date d’appréciation de ce délai se fera en fonction de la date à laquelle ce fondement de divorce est présenté :

Si le fondement de divorce est présenté dés l’introduction de l’assignation, il sera apprécié à cette date, les époux devront donc vivre séparés depuis un an à la date où l’un des époux saisi le tribunal de son assignation en divorce.

Si le fondement du divorce est présenté en cours de procédure, le délai de 1 an s’apprécie au moment du prononcé du divorce. Les époux devront donc vivre séparés depuis 1 an lorsque le juge prononce leur divorce.

C. Le divorce pour faute.

Dans ce cas, le fondement du divorce et les faits à l’origine de celui-ci ne peuvent être mentionnés dans l’assignation introductive [3].

La procédure de divorce nouvelle mouture perd donc une partie de ses spécificités pour ressembler davantage à une procédure classique devant le Tribunal Judiciaire.

Si le principe de l’oralité a été conservé lors de l’audience d’orientation, la procédure de divorce issue de la réforme s’oriente vers une procédure quasi, voire exclusivement écrite où la présence des parties n’est plus que facultative.

Caroline LE BOT Avocat au Barreau de Valenciennes

[1Article 1117 alinéa 1 du Code de procédure civile.

[2Article L-212-5-1 du Code de l’organisation judiciaire.

[3Article 1107 alinéa 3 du Code de procédure civile.