Village de la Justice www.village-justice.com

Covid-19 et recel successoral. Faux testaments olographes et arnaque aux assurances. Par Jean-Philippe Barthomet, Criminologue.
Parution : samedi 2 mai 2020
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/covid-recel-successoral-faux-testaments-olographes-arnaque-aux-assurances,35075.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Dans le cadre de la situation de crise actuelle, liée au Coronavirus, de nombreux testaments olographes et demandes de changement de bénéficiaire dans les assurances vie commencent à faire surface. Faire authentifier une signature par un expert en écritures permet d’identifier est très simple, rapide et normalement gratuit.

La période actuelle de pandémie mondiale liée au Covid-19 marquera, sans aucun doute, un avant et un après de la société, telle que nous la connaissons.

Si bien le taux de mortalité foudroyante recensé ces dernières semaines a été la première conséquence directe de la pandémie, les répercussions économiques, financières et sociales commencent à se faire ressentir, touchant toute la population.

Dans le cas particulier de la France, plusieurs grandes enseignes annoncent dès à présent une réduction drastique de personnel sans précédents, ce qui devrait avoir un impact direct sur les ménages et le pouvoir d’achat des français à très court terme.

Dans cette conjoncture, parmi les différentes conséquences directes de la crise, une ancienne connaissance refait surface, très connue des avocats, des notaires ainsi que de notre système judiciaire : le recel successoral.

Les procédés de recel successoral les plus répandus, ainsi que les plus simples d’exécution, sont la fabrication de faux testaments olographes et la modification frauduleuse de clauses bénéficiaire des assurances vie.

Hausse de demandes d’expertise de signatures.

Le nombre de demandes d’expertise de signatures augmente progressivement depuis quelques semaines, au sein des cabinets d’experts judiciaires en écritures et documents, concernant de testaments olographes retrouvés par les héritiers parmi les affaires de leurs proches, récemment décédés à cause du coronavirus.

Par ailleurs, les demandes des particuliers, ainsi que de la part des notaires et des assureurs connaissent aussi une légère hausse concernant les changements de clauses bénéficiaire, sur les polices d’assurance vie de clients récemment décédés.

Etant donné les circonstances actuelles, tout porte à croire que la demande d’authentification de ce genre de documents suspects va augmenter les mois à venir, lié à une troisième typologie criminogène traditionnellement liée aux décès : l’usurpation de signature sur chèque bancaire.

Rappelons que l’imitation d’une signature se fait en vue d’usurper l’identité d’une personne ou d’acquérir un droit à sa place, étant considérée un faux, une infraction pénale, dans la mesure où elle constitue une altération frauduleuse de la vérité.

L’article 441-1 du Code pénal prévoit une peine de trois ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende pour l’infraction de faux et usage de faux, pouvant aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende si le faux concerne un document délivré par une administration publique.

En ce qui concerne le cadre légal du testament olographe, l’article 970 du Code civil nous signale que le testament ne sera point valable s’il n’est pas écrit en entier, daté et signé de la main du testateur, le dernier en date annulant les précédents.

Faire expertiser un testament olographe suspect.

Les circonstances particulières dans lesquelles un testament olographe peut arriver chez les notaires sont nombreuses, en dehors de la voie légitime.

Il est connu que certaines personnes âgées, en situation d’isolement, tentent d’attirer leurs proches en promettant une partie plus conséquente dans la succession.

Il est fréquent de retrouver dans les affaires d’une personne décédée plusieurs testaments olographes, parfois des brouillons, parfois de différents testaments favorisant un ou plusieurs héritiers, et souvent dépourvus de date et de signature.

S’emparer de l’un de ces testaments olographes après le décès, pour le déposer ensuite dans un cabinet notarial, avec une fausse date et/ou une fausse signature devienne un jeu d’enfants, et dans la plupart de cas, aucune vérification ne sera faite.

L’authentification d’une signature sur un testament olographe est normalement gratuite chez les experts en écritures et documents, car elle fait partie de l’étude préalable du dossier d’expertise.

Lorsqu’on a un doute à propos de l’authenticité d’une signature, d’une mention manuscrite ou d’une date sur un testament, il est très conseillé de contacter un expert en écritures agréé auprès des tribunaux. La vérification initiale est très rapide, avec la possibilité de la faire à distance, par courrier ou par mél, permettant aux héritiers, aux notaires ainsi qu’aux conseils d’obtenir un premier avis, avant d’entamer toute action judiciaire.

La plupart de vérifications réalisées par les experts en écritures sont négatives. Les signatures sont souvent authentiques, mais l’un des héritiers avait trouvé de dissemblances inexplicables, que l’expert parvient à justifier scientifiquement.

Faire expertiser une signature sur une assurance vie douteuse.

Les raisons pour lesquelles un individu est amené à demander un changement de bénéficiaire sur un contrat d’assurance vie sont nombreuses, et n’importe qui peut en devenir le bénéficiaire.

Il est fréquent de retrouver une aide-ménagère, une infirmière, un ami ou un voisin en tant que bénéficier d’une assurance vie. Il s’agit d’un choix privé et libre de l’assuré, souvent justifié par le besoin de témoigner sa gratitude à quelqu’un.

Mais il est tout aussi fréquent de retrouver ce genre de proches communiquer un changement de bénéficier aux assureurs par courrier, à l’aide d’un formulaire ou d’une lettre type portant une signature imitée de l’assuré, souvent une personne âgée.

Ce type de fraude aux assurances est très difficile à repérer, dans la mesure ou les assureurs ne sont pas obligés de communiquer le versement de la prime aux héritiers légitimes.

Par ailleurs, la vérification de la signature est souvent peu approfondie ou inexistante. La fraude éclate au grand jour après le décès, si les héritiers sont au courant de l’existence de la police d’assurance vie.

Comme dans le cas des faux testaments olographes, le réflexe de faire expertiser la signature présente sur le formulaire de changement de bénéficiaire est très rapide, et souvent gratuite dans la plupart de cabinets d’experts en écritures et documents.

Jean-Philippe BARTHOMET Criminologue Expert en écritures et documents https://criminalistique.fr