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Les défis de la justice numérique au Maroc. Par Ilias Belbachir, Juriste.
Parution : mercredi 27 mai 2020
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Les nouvelles techniques de l’information et de la communication (NTIC) sont devenues au fil du temps des moyens incontournables dans plusieurs domaines dont le domaine judiciaire. La révolution informatique a en effet impacté la façon de procéder de la majorité sinon la totalité des pays, le Maroc y compris.

La justice marocaine, qui a connu divers flottements principalement à cause de la lenteur et de la complexité de ses procédures, a commencé ces dernières années à adopter ces nouvelles techniques afin de moderniser son système et permettre ainsi un meilleur accès à ses services grâce aux différents portails électroniques mis à la disposition du justiciable.
Que signifie donc la notion de justice numérique ? A quoi sert-elle ? Et quelles sont les conditions nécessaires à sa consolidation ?

La notion de justice numérique.

La justice numérique signifie l’utilisation des nouvelles techniques de l’information et de la communication permettant ainsi l’accès instantané aux services judiciaires, facilitant par la même, la communication entre les différents acteurs du domaine de la justice tels que les avocats, les magistrats, et les greffiers.

Parmi les bienfaits de la justice numérique figurent la consolidation de l’efficience judiciaire, grâce notamment à la diminution des coûts liés par exemple aux déplacements des accusés du lieu de leur détention jusqu’au tribunal, la réduction des délais pour statuer, la simplification des procédures, son rôle dans la prévention et la lutte contre la corruption, sans oublier le rapprochement de la justice du justiciable.

Les exigences d’une bonne justice numérique.

Toutefois, afin de créer une justice numérique efficace et universelle au Maroc, un ensemble d’exigences techniques doivent être remplies . En premier lieu, bâtir une infrastructure numérique basée sur les NTIC et ce en équipant les tribunaux du Royaume d’ordinateurs, y généraliser l’accès à internet, mettre en place des services permettant d’archiver et de protéger les données juridiques des justiciables grâce à un système de cryptage, sans oublier bien évidemment la formation du personnel judiciaire et des autres acteurs du domaine judiciaire.

Cette dématérialisation permettra également de réduire le nombre de justiciables au sein des différents tribunaux et dispensera les avocats et huissiers de s’y rendre continuellement.

Pour ce qui est du cadre légal, le législateur marocain a mis en place un arsenal juridique adéquat permettant à la fois de règlementer l’échange des données électroniques (la Loi [1] relative à l’échange électronique de données juridiques), et de protéger contre toute cyber-attaque les données personnelles des personnes juridiques ( la Loi 07-03 complétant le code pénal en ce qui concerne les infractions relatives aux systèmes de traitement automatisé des données et la Loi 09-08 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel).

La loi 53-05, tel qu’il est énoncé par son article premier, fixe le régime applicable aux données juridiques échangées par voie électronique, à l’équivalence des documents établis sur papier et sur support électronique et à la signature électronique.

Elle détermine également le cadre juridique applicable aux opérations effectuées par les prestataires de service de certification électronique, ainsi que les règles à respecter par ces derniers et les titulaires des certificats électroniques délivrés.

D’un autre côté, la loi 07-03 incrimine toute atteinte aux systèmes de traitement automatisé des données. Cette atteinte se constitue par le fait d’accéder frauduleusement à un système de traitement automatisé de données, et par le fait de s’y maintenir après y avoir accédé par erreur alors qu’on n’en a pas le droit.

Dans le même sens, la loi 09-08 a pour objectif de protéger les données à caractère personnel des personnes physiques. De ce fait, la loi a défini les données à caractère personnel comme étant toute information, de quelque nature qu’elle soit et indépendamment de son support, y compris le son et l’image, concernant une personne physique identifiée ou identifiable.
Le traitement de ces données est, quant à lui, défini comme toute opération ou ensemble d’opérations effectuées ou non à l’aide de procédés automatisés et appliquées à des données à caractère personnel, telles que la collecte, l’enregistrement, l’organisation, la conservation, l’adaptation ou la modification, l’extraction, la consultation, l’utilisation, la communication par transmission, diffusion ou toute autre forme de mise à disposition, le rapprochement ou l’interconnexion, ainsi que le verrouillage, l’effacement ou la destruction.

La dématérialisation des services judiciaires est l’un des chantiers importants que le ministère de la Justice s’est engagé à réaliser. Plusieurs applications ont été lancées dont l’application « e-justice mobile » qui permet au justiciable de suivre à distance le traitement de son dossier, aux demandeurs de leur casier judiciaire de consulter le traitement de leurs demandes, et se renseigner sur tout ce qui concerne l’inscription aux registres de commerce.

Ilias Belbachir Avocat.

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