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Protection du consommateur en Droit Ivoirien et Contrats électroniques. Par Jonathan Péléni Koné, Juriste.
Parution : vendredi 22 mai 2020
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Le développement rapide ces dernières années des nouvelles technologies et l’accès à l’information via la généralisation de l’internet a permis une forte expansion du e-commerce par l’accroissement du nombre de consommateurs Ivoiriens. Au moyen d’un marché offrant plusieurs services aussi diversifié que dynamique, Internet admet une véritable ascension par l’accomplissement de plusieurs actes sur cette plateforme immatérielle, dont les contrats électroniques.

Au cours de ces dix dernières années, notre société a été dominée par une véritable révolution technologique, une révolution en croissance rapide dans le monde actuel. Les progrès des TIC technologies de l’information et de la communication ont fait considérablement évoluer le quotidien de plusieurs en offrant de nouvelles possibilités aux consommateurs et aux entreprises à travers la fluidité du marché.

Cette sphère immatérielle qu’est internet étant utilisée pour l’exécution de plusieurs opérations dont l’achat, la communication etc.

Le commerce électronique connaît un grand essor en Côte d’Ivoire depuis quelques années. Autrement appelé e-commerce ou vente en ligne, le commerce en ligne regroupe les transactions commerciales s’opérant à distance par le biais d’interfaces électroniques ou digitales connectées à internet.

Au moyen des terminaux connectés à Internet, ce commerce électronique se matérialise à travers de très nombreux types de prestation dont d’une part entre entreprises (business to business ou « B to B ») et d’autres part en qui concerne les consommateurs, un commerce dit « résidentiel », (business to consumer ou « B to C ».

Sachant que le marché ivoirien est l’un des plus dynamiques de l’Afrique de l’Ouest offrant de nombreuses opportunités d’investissement avec 40% du PIB de l’UEMOA, au regard de l’expansion des technologies de l’information et la communication, de la complexité des produits et services et des difficultés afférentes, la préoccupante question de protection du consommateur Ivoirien admet tout son sens.

Cette protection ayant pour essence d’établir l’équilibre entre les commerçants ou professionnels qui sont en raison des meilleures connaissances techniques de ce domaine, généralement en position de supériorité par rapport aux consommateurs. Les contrats électroniques admettant une particularité contrairement aux contrats de Droits commun, cette protection aura donc pour but de protéger les intérêts de la partie faible qu’est le consommateur.

De ce fait dans le but d’accorder une protection au consommateur dans l’accomplissement des actes en ligne et en vue d’adapter la législation interne aux nouveaux enjeux de la mondialisation et au développement du commerce électronique, la Côte d’Ivoire s’est doté dans son ordonnancement juridique de diverses dispositions se rattachant aux transactions électroniques.

A ce titre, la loi n°2013-546 du 30 Juillet 2013 relative aux transactions électroniques pour réguler le secteur des échanges virtuels, et au niveau communautaire, l’ Acte uniforme de l’Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA), portant droit commercial général, adopté à Lomé le 15 décembre 2010, qui a consacré la signature électronique dans le cadre de l’informatisation du Registre du Commerce et du Crédit mobilier (RCCM).

Et d’autre part en droit de la consommation, la loi n°2016‐412 relative à la consommation. Au sens des dispositions de l’article premier alinéa un et deux de ladite loi, le législateur Ivoirien défini le consommateur comme « toute personne qui achète ou offre d’acheter des technologies, des biens ou services pour des raisons autres que la revente ou l’utilisation à des fins de production, de fabrication, de fourniture de technologies ou de prestations de services ; reçoit ou utilise des technologies, des biens ou services pour lesquels il y a déjà eu un paiement ou une promesse de paiement, ou tout autre système de paiement différé. Cette définition inclut tout utilisateur de technologies, de biens et services autre que la personne qui les achète ou en paie le prix lorsque cette utilisation est approuvée par l’acheteur ».

Ainsi à travers ce dispositif juridique existant en Droit Ivoirien, l’Etat Ivoirien entend combler les insuffisances juridiques en conférant aux consommateurs les armes pour la prise en main de sa propre défense contre le professionnel dominant lors des contrats électroniques.

Notons cependant qu’en dépit des règles protectrices existantes à l’endroit du consommateur Ivoirien dans le but de le protéger contre les pratiques des professionnelles en supériorités, les règles existantes dans le e-commerce Ivoirien ne cernent pas toutes les difficultés pouvant résulter du contrat électronique ce qui met remet en cause la protection du consommateur au regard des contrats électroniques.

L’expansion d’Internet étant considérable, certains actes s’y déroulant revêtent un caractère dérogatoire au régime de droit commun applicable au contrat, le consommateur étant encore plus en en situation de faiblesse sur cette sphère.

Cette faiblesse du consommateur au regard des contrats électroniques se traduit d’une part par plusieurs questions dont : la question des publicités mensongères, des informations et pratiques commerciales mensongères sur internet en ce qui concerne les biens, les services et les prix.

La question du maque d’information claire et précise sur le produit avant la conclusion du contrat, constituant une dérogation des dispositions de l’article 3 de la loi n°2016‐412 relative à la consommation, disposition qui impose au professionnel de communiquer les information de manière lisible et compréhensible aux consommateurs sur les principales caractéristiques du produit.

Le consommateur Ivoirien pouvant être également confronté aux questions : de l’anonymat des commerçants sur Internet, du manque d’informations claires et suffisantes concernant l’identité et la localisation des commerçants du fait du lieu de conclusion du contrat (en ligne), on ne saurait définir le siège social du professionnel.

La question des garanties des biens et services, le consommateur pouvant être confronté à la récurrente question des publicités mensongères, à la mauvaise qualité du produit. La question des barrières linguistiques, certains sites étrangers étant rédigés en d’autres langues.

D’autre part, la question des processus de remboursements longs et fastidieux. Le consommateur Ivoirien en cas de refus du produit du fait de son caractère défectueux, se retrouve confronté à une situation difficile du remboursement du paiement effectué. Des difficultés liées à la sécurité des données, l’irréversibilité des paiements électroniques, la question des fraudes en ligne ainsi que l’usurpation d’identité, considérant que la cybercriminalité conserve un grand impact en Côte d’Ivoire.

En dépit du fait que la Côte d’Ivoire pour parer aux nouveaux types d’infractions notamment les Cybers infractions a mis en place la loi n°2013-451 du 19 Juin 2013, loi relative à la lutte contre la cybercriminalité. Il n’en demeure pas moins que le consommateur Ivoirien est confronté à l’impérieuse question de la protection des données personnelles et de la vie privée.

La protection du consommateur se pose également au regard du manque de compétences de base en matière de technologies de l’information et de notions financières, plusieurs sites internet étant mal rédigés, mal conçus, des questions pouvant également se poser entre responsabilités des sites Web de commerce électronique et responsabilité des établissements bancaires notamment lorsque le paiement en ligne du consommateur se trouve bloqué, son compte ayant été débité sans manifestation de volonté personnelle.

Des difficultés également quant à l’inexistence d’un service après-vente et de rétractation, le paiement étant souvent irréversible même lorsqu’il s’agit d’une inadvertance de la part du consommateur.

In fine, considérant la question de l’internationalité, notons que le contrat électronique pourrait être appréhendé comme étant un contrat transfrontalier. Or qui dit, contrat transfrontalier, dit plusieurs lois applicables possibles. Cela se justifie par le fait que dès lors qu’une personne effectue un achat auprès d’une entreprise située dans un pays autre que celui de l’acheteur, il y a existence indéniable d’un contrat transfrontalier. Un tel contrat pouvant être conclu à l’occasion d’un séjour à l’étranger ou sans que l’acheteur puisse s’en rendre compte, lorsqu’il effectue un achat sur Internet.

Internet étant une zone qui regorge plusieurs sites de vente en ligne exerçants leurs activités dans différents pays étrangers, dont à titre d’exemple le célèbre site de vente en ligne : Amazon. L’aspect transfrontalier suppose ainsi un lien entre deux parties établies dans des pays différents. Ce faisant ainsi, la convention est susceptible d’être soumise à l’application de deux législations au moins : celle du pays de l’acheteur ou celle du pays du vendeur. Sous ce rapport, un intérêt s’attache à la découverte de la loi applicable à cette convention. Il conviendra de voir comment le droit international privé va appréhender cette question dans le domaine plus spécifique du conflit de lois et du conflit de juridictions.

Les contrats électroniques admettent des difficultés spécifiques quant à la licéité de l’offre, du consentement libre et éclairé, du paiement électronique, la question de la preuve électronique et plus largement de la protection du consommateur. Internet ayant atteint une dimension révolutionnaire sur la personne du consommateur au sein notre société dite moderne. Toutefois, au regard de son impact grandissant, cette révolution technologique devrait également entraîner une révolution juridique en vue de maintenir un équilibre entre la montée des TIC et la protection des consommateurs Ivoiriens.

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