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La constatation de l’état de catastrophe naturelle. Par Jérôme Blanchetière, Avocat.
Parution : vendredi 18 septembre 2020
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Les articles L125-1 et suivants du Code des assurances réglementent l’assurance des risques de catastrophes naturelles.
Selon la loi, la mise en jeu de cette assurance est subordonnée à la constatation de l’état de catastrophe naturelle par un arrêté interministériel.
Néanmoins, en dehors de cette indication essentielle, les prévisions légales sont succinctes concernant la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

Les prévisions de la loi concernant la constatation de l’état de catastrophe naturelle.

Il résulte ce qui suit de l’article L125-1 du Code des assurances :

1/ L’état de catastrophe naturelle est constaté par un arrêté interministériel, lequel précise, pour chaque commune ayant demandé la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, la décision des ministres.

Cet arrêté détermine :
- Le lieu des dommages ;
- Le moment où surviennent ces dommages ;
- Les dommages qui seront couverts par la garantie d’assurance des catastrophes naturelles.

2/ Cette décision est notifiée à chaque commune concernée par le représentant de l’État dans le département.

3/ L’arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle doit être publié au Journal officiel dans un délai de trois mois à compter du dépôt à la Préfecture des demandes de constatation de l’état catastrophe naturelle.

Par exception, si la durée des enquêtes diligentées par le représentant de l’État dans le département est supérieure à deux mois, l’arrêté est publié aux plus tard deux mois après la réception du dossier par le ministre chargé de la sécurité civile.

4/ La demande de constatation de l’état de catastrophe naturelle doit en toute hypothèse intervenir dans le délai de 18 mois après le début de l’évènement pour lequel elle est présentée (la loi précise que ce délai ne s’applique qu’aux événements naturels ayant débuté après le 1er janvier 2007).

Des précisions données par des circulaires ministérielles.

La procédure de constatation de l’état de catastrophe naturelle est précisée par des circulaires (Principalement par les circulaires interministérielles du 27 mars 1984 et du 19 mai 1998).

La procédure ordinaire de constatation de l’état de catastrophe naturelle.

Les dossiers de demande de constatation de l’état de catastrophe naturelle sont constitués par les communes et complétés par les services préfectoraux.

Les étapes à suivre pour la constitution et la présentation des dossiers de constatation de l’état de catastrophe sont décrites par les circulaires ci-dessus mentionnées, et sont les suivantes :

A. La demande de constatation de l’état de catastrophe naturelle.

La demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle est adressée par la commune à la préfecture.

B. La constitution du dossier.

Avec l’aide de la commune, et s’il considère que l’on est en présence d’un phénomène pouvant relever de l’assurance des catastrophes naturelles, le préfet réunit les éléments du dossier qui seront ensuite transmis à la direction chargée de la sécurité civile du ministère de l’intérieur.

A l’inverse, s’il estime que l’on n’est pas en présence d’une catastrophe naturelle, le préfet peut ne pas donner suite à la demande.

Le dossier constitué avec l’aide du préfet, et qui sera ensuite transmis au ministère de l’intérieur, doit impérativement comporter les pièces suivantes :
- Un “rapport circonstancié sur la nature et l’intensité de l’événement indiquant avec précision les dates et heures de début et de fin de l’événement, le nombre de communes concernées et les mesures de préventions qui ont été prises, qui peuvent être prises, ou qui sont envisagées [1] ;
- Des rapports techniques dont la nature dépend de l’événement en cause : par exemple rapports météorologiques, géotechniques ou hydrologiques ;
- La demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle présentée par la commune ;
- La liste des communes, cantons et arrondissements concernés ;
- La liste des communes ayant déjà bénéficié d’un arrêté ministériel au titre de la sécheresse et des mouvements de terrains différentiels consécutifs à la sécheresse et la réhydratation des sols.

A titre facultatif, peuvent également être jointes au dossier les pièces suivantes : des rapports de gendarmerie et des services d’incendie et de secours ainsi que des photographies des désordres.

Selon les circulaires du 27 mars 1984 et du 19 mai 1988, la transmission de ce dossier est adressée au ministère de l’intérieur dans le délai d’un mois à compter de la date de début du sinistre.

C. L’avis d’une commission.

Le dossier transmis au ministère de l’intérieur est soumis à une commission interministérielle.

Celle-ci est chargée de se prononcer sur l’intensité anormale de l’agent naturel.
Cette commission est composée d’un représentant du ministère de l’intérieur, d’un représentant du ministère de l’économie, des finances et de l’industrie, d’un représentant du secrétaire d’État au budget, et le cas échéant du secrétaire d’État à l’outre-mer.

D. L’arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle.

Sur la base de l’avis donné par cette commission, les ministres de l’intérieur, de l’économie et du budget prennent l’arrêté décidant de l’état de catastrophe naturelle.

Comme indiqué précédemment, selon la loi, cet arrêté détermine les zones et les périodes où s’est produite la catastrophe ainsi que la nature des dommages couverts par la garantie d’assurance des catastrophes naturelles.

E. Notification et publication de l’arrêté constatant l’état de catastrophe naturelle.

La loi laisse au préfet le soin de motiver la décision lorsqu’il notifiera l’arrêté aux communes ayant présenté la demande de constatation de l’état de catastrophe naturelle

Par ailleurs, l’arrêté doit être publié au journal officiel.

Cette publication doit intervenir dans le délai de trois mois à compter du dépôt des demandes présentées auprès de la préfecture.

La procédure rapide de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, en cas d’événement de nature exceptionnelle.

Parallèlement à cette procédure ordinaire, il a été créé par une circulaire du 23 juin 2014 une procédure rapide de reconnaissance des catastrophes naturelles.
Cette procédure rapide doit être mise en œuvre en cas d’événement de nature exceptionnelle.

Notamment, selon cette procédure accélérée, l’état de catastrophe naturelle sera prononcé par un arrêté interministériel signé à l’occasion du conseil des ministres, et publié au Journal officiel dès le lendemain.

Modernisation de la procédure : l’application « iCat Nat ».

Pour simplifier les demandes de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et les traiter avec plus d’efficacité a été créé un mécanisme de déclaration dématérialisée (par Internet) dénommé « iCatNat », lequel est disponible depuis 2019.

Vers une évolution de l’assurance de catastrophe naturelle.

Le 15 janvier 2020, a été voté par le Sénat, en première lecture (cette proposition ne deviendra une loi qu’après avoir été votée par l’Assemblée Nationale) une proposition de réforme de l’assurance des catastrophes naturelles.

La réforme proposée, qui est importante, porte notamment sur la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

L’objectif est notamment de remédier au manque de transparence de cette procédure, et d’éviter les soupçons sur les décisions rendues.

Cette proposition a par ailleurs pour effet de favoriser les demandes de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle en prévoyant le dépôt d’une seconde demande, après un refus, et en allongeant le délai dont disposent les communes pour présenter leur demande de reconnaissance.

Les mesures, relative à la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, contenues dans la proposition de loi adoptée par le Sénat sont les suivantes :
- La loi ferait désormais état de la commission créée par la circulaire de 1984, et préciserait qu’elle doit comporter au moins deux titulaires de mandats locaux ;
- Par ailleurs, les avis rendus par la commission faire l’objet d’une publicité : ceux-ci devraient être publiés dans le délai de 10 jours suivant leur adoption ;
- Le délai accordé aux communes pour présenter une demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle serait porté de 18 à 24 mois après le début de l’événement naturel au titre duquel la demande est présentée ;
- En cas de refus d’une première demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, une seconde demande pourrait être présentée par une commune, ce dans un délai de six mois à compter de la notification du refus opposé à la première demande.

Jérôme Blanchetière Avocat au barreau de Paris Société d'avocats Virginie Miré et Jérôme Blanchetière www.mire-blanchetiere-avocats.fr

[1Circulaire du 19 mai 1998.