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[Témoignage] Qu’est-ce qu’une collaboration en arbitrage et contentieux international, comment se spécialiser ?
Parution : mercredi 21 octobre 2020
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Pratiquer l’arbitrage et le contentieux international donne de nombreuses occasions d’accompagner les entreprises dans l’adaptation ou la résiliation de leurs engagements contractuels avec leurs clients, fournisseurs ou sous-traitants et de les représenter devant les tribunaux judiciaires ou arbitraux.
Pour celles et ceux d’entre vous qui souhaiteraient se spécialiser dans ce domaine, je reviens ci-dessous sur deux étapes clés de cette spécialisation : le choix d’une formation adaptée et le choix du bon cabinet.

Dans le contexte de crise sanitaire que nous connaissons, de nombreuses entreprises se sont engagées dans la renégociation de contrats nécessitant une connaissance de la procédure civile et une pratique des mécanismes contractuels de résolution des litiges, pour définir la meilleure stratégie et s’y tenir. Notre connaissance du droit des contrats nous permet par exemple d’armer nos clients avec une meilleure compréhension de concepts tels que la force majeure ou l’imprévision, pour désamorcer ou mettre toutes les chances de son côté dans les contentieux qui découleront de la crise.

Être au cœur des contentieux nous rend également témoins de la tension que la crise fait peser sur nos juridictions. L’engorgement des tribunaux ne date pas d’hier mais cette tendance est désormais amplifiée. Dans ce contexte, les modes alternatifs de résolution des litiges comme l’arbitrage font montre de toute la flexibilité qui les caractérise pour proposer des solutions adaptées et efficaces de résolution des différends.

En témoigne le fait que, dans les affaires que j’ai eues à connaitre, le recours à l’arbitrage a permis la négociation de nouvelles ordonnances de procédure par voie de courriel et conférence téléphonique, afin de moduler les calendriers procéduraux et permettre un dépôt entièrement électronique des écritures. Le déroulement des audiences a également pu être adapté rapidement, pour permettre des interventions virtuelles. Fin septembre, alors que certains pays annonçaient des mesures de quarantaine au retour d’Ile de France, nous avons par exemple pu organiser au pied levé une audience hybride au centre d’audience de la Chambre de Commerce Internationale, pour permettre à toutes les parties prenantes d’assister virtuellement à l’audience. Cette pratique a donc encore un bel avenir.

Pour celles et ceux d’entre vous qui souhaiteraient se spécialiser dans ce domaine, je reviens ci-dessous sur deux étapes clés de cette spécialisation : le choix d’une formation adaptée (1) et le choix du bon cabinet (2).

1. Choisir une formation adaptée.

Les profils de collaborateurs que j’ai croisés en arbitrage sont extrêmement variés mais ils ont tous deux choses en commun : leur internationalité et leur maitrise de l’anglais. Mon conseil aux étudiants et stagiaires souhaitant exercer dans ce domaine serait donc de développer des stratégies permettant d’avoir une expérience transfrontalière et de pratiquer l’anglais.

Ensuite, il est important de disposer de bonnes bases en droit des contrats, de la procédure civile et des conflits de lois. Etant donné que ce sont les principales règles que les spécialistes de l’arbitrage utilisent, une connaissance approfondie permet d’acquérir une certaine aisance.

Pour ma part, j’ai étudié le droit français et la Common Law à l’Université de Nanterre (au niveau Licence et Master) et je me suis spécialisé en contentieux et arbitrage international à l’occasion d’un LL.M à NYU. J’ai ensuite passé le barreau de New York avant de revenir à Paris, où j’ai enseigné le droit comparé à l’Université de Nanterre et passé le barreau de Paris.

Conseils pour le Barreau de New York :
1. Un LL.M. étant indispensable, en profiter pour sélectionner des cours dans les domaines où l’on souhaite exercer plus tard.
2. Suivre attentivement les cours de LL.M. obligatoires pour passer le barreau de New York.
3. Choisir avec soin une prépa (celles qui proposent un grand nombre de QCMs ressemblant à ceux de l’examen ont les taux de réussite les plus élevés).
4. S’assurer d’avoir le temps de bien réviser.

Quelques conseils pour préparer l’équivalence au Barreau de Paris :
1. Anticiper le temps que prend la constitution du dossier de candidature.
2. Rassembler des cours à jour ou trouver une bonne prépa.
3. S’assurer d’avoir le temps de bien réviser.
4. Faire de nombreuses simulations d’examen, à l’oral et à l’écrit.

2. Choisir le bon cabinet.

Lorsque vous postulez pour un stage, vous devez bien sûr penser à la réputation du cabinet et la nature de ses clients, mais pas seulement. Il est extrêmement important de savoir si vous pourrez rédiger des documents juridiques et si vous aurez des retours constructifs et bienveillants de la part des avocats avec lesquels vous travaillez. Votre objectif doit être d’affiner vos compétences en matière d’arbitrage, car c’est cette expérience qui compte lorsque vous candidaterez pour une collaboration.

L’arbitrage international est par ailleurs un domaine qui exige de longues heures de travail et un dévouement absolu à la cause de vos clients. Les dossiers sont généralement stratégiques et donc extrêmement importants pour les clients, qui doivent être sûrs que leurs avocats feront de leur mieux pour défendre leur affaire. Les exigences sont donc extrêmement élevées, ce qui est une bonne chose si vous aimez les défis. A tous les niveaux, avocats et stagiaires doivent : travailler dur, être dévoués, être curieux et être proactifs.

Pour ma part, j’ai d’abord effectué des stages au sein de cabinets internationaux et intégré l’équipe d’arbitrage international de Hogan Lovells, avant de rejoindre Signature Litigation. Le cabinet Signature Litigation étant un cabinet "boutique" spécialisé dans le contentieux et l’arbitrage, je trouvais extrêmement séduisante l’idée de travailler avec des associés disposant d’une expertise de pointe.

Lorsque Flore Poloni, avocate associée, m’a proposé de l’assister dans le lancement du département d’arbitrage international de Paris, je l’avais déjà rencontrée à plusieurs reprises et je savais qu’elle était une avocate dont je pouvais apprendre beaucoup. De plus, le cadre dans lequel ce projet s’inscrivait était solide car le cabinet disposait déjà d’équipes opérationnelles dans les domaines de la responsabilité du fait des produits, des assurances, de la fraude civile, des voies d’exécution, des enquêtes et de la compliance.

Thibaud Roujou de Boubée, Avocat.
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